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Je suis toujours amusé, intéressé et sceptique quand un paléontologue croit reconstituer un dinosaure à partir de quelques osselets. François Noudelmann mène un projet encore plus ambitieux puisqu'il ne reste rien de son père et de son grand-père et quasiment pas de documents ou de souvenirs. Concernant Cadillac … les amateurs de voitures de luxe seront déçus, le Directeur de la Maison Française de New-York s'intéresse ici au cimetière girondin.

Chaïm, son grand père fuit l'empire russe et les pogroms antisémites du début du XX siècle, arrive en France, patrie de Dreyfus, et s'engage en aout 1914. Blessé, il perd la tête, devient violent, est interné à la demande de son épouse et évacué vers l'asile de Cadillac-sur-Garonne où il meurt en 1941 victime de malnutrition. Inhumé parmi les fous et non parmi les anciens combattants, le site internet qui recense ces morts précise « né en Israël » pays qui n'existait pas alors. Un projet d'aménagement a effacé les tombes et les défunts. Première partie passionnante car la folie est un aspect méconnu de la guerre.

Albert, son père conçu pendant la grande guerre, est appelé avec le contingent 1936 puis mobilisé, emprisonné, affecté à un camp de travail en Silésie, libéré par l'avancée des alliés, rapatrié et découvre que son épouse a refait sa vie … premier divorce, aventures diverses et enfin suicide. Deuxième partie sans grande originalité depuis que Francis Ambrière emporta le Goncourt en 1946 avec « Les grandes vacances » si ce n'est que le romancier peint les occupants en gentils organisateurs du Club Med et décrit les français en vacances (p 137) dans des lignes indignes d'un enseignant.

Le tutoiement père-fils, procédé littéraire employé, place le lecteur en spectateur, puis en voyeur lors des frasques de notre Albert, maquillé en Philippe, et finalement en gêneur pressé de s'éclipser.

La dernière partie m'a beaucoup plus intéressé. Interrogations sur ce qu'est un juif, un sioniste, un antisémite, un anti-sioniste. Longue Litanie (p 198) des français assassinés depuis 10 ans dans l'hexagone au cri de « Mort aux juifs ». Réflexions sur la place et le rôle des enseignants. Hésitations sur la transmission d'une culture ou des cultures et comparaison entre un regard français et un regard américain sur cette question. Une civilisation n'est elle pas un héritage transmis ?


François Noudelmann conclut en voyant en rêve son grand père monter dans une Cadillac décapotable pink, aux cotés d'Aretha Franklin, prolongeant ainsi un parcours débuté au siècle dernier avec la pitoyable charrette d'un émigré !

Hymne à la vie, à la liberté, à la culture française, ce premier roman est aussi la confession d'un Docteur en philosophie reconnaissant lucidement s'être trompé dans certains choix politiques. Un aveu courageux qui mérite d'être souligné.
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François Noudelmann raconte la recherche de ses racines à travers les portraits de son grand-père et de son père. Chaïm qui rendu fou par la Première Guerre mondiale est mort de faim dans l'hôpital psychiatrique de Cadillac, alors qu'Albert, prisonnier de guerre pendant la Seconde Guerre mondiale, a connu une vie d'instabilité et a fini par se suicider. Deux vies, deux chemins de douleur dont le fait d'être juif a déterminé le tracé, souvent pour le pire.

Alors s'interroge François Noudelmann, c'est quoi être le petit-fils d'un juif des pays baltes qui a fui les pogroms pour terminer dans les tranchées du côté français. C'est quoi être le fils d'un juif qui comme son père a cherché l'intégration mais a dû affronter la folie nazie. C'est quoi être le descendant de ces deux hommes qui voulaient être français avant d'être juifs et pourtant ont été maltraités parce qu'ils étaient considérés surtout comme juifs.
La réponse est dans le livre. Elle n'est pas simple, car contradictoire, parfois agaçante, mais sans aucun doute authentique, réfléchie et instructive.
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Avant de donner mon avis ( pour ce qu'il vaut), je m'autorise une digression : nombre d'auteurs français auraient-ils perdu le talent de savoir raconter des histoires qui ne soient pas issues de leur vécu, leurs racines, voire leur égo ?
Avec tous ces livres de rentrée littéraire d'automne qui nous évoquent à satiété un père, un grand-père, des origines ou une chronique familiale, force est de constater que notre littérature a perdu le goût de la fiction et ne s'appuie que sur la chose vécue.

François Noudelmann se place dans cette lignée d'écrivains à souvenirs et introspection familiale, sous couvert de réflexion sociologique, voire philosophique.
Du grand-père juif russe brisé par la guerre de 14/18, au récit quasi picaresque de son père prisonnier en stalag durant 5 ans, il visite ensuite son propre parcours, ses racines juives, son patronyme, l'appartenance à une lignée et une réflexion sur l'assimilation à un pays choisi ou pas.

L'ensemble est remarquable, agréable à lire, souvent documenté, très vivant.
Rien à dire sur la forme, remarquable écrit pour un premier roman (l'homme n'est pas docteur en philosophie pour rien !).

Je cale sur le fond, sempiternelle thématique qui s'invite de livre en livre dans la production de ce qu'on appelle roman et qui n'a rien de romanesque.
C'était le livre de trop …
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Un roman saisissant, qui mêle récit biographique et réflexion sociopolitique.

J'avais choisi ce livre pour son titre, mais pas celui de la voiture. Cadillac, c'est un nom connu dans le monde minier, la « faille de Cadillac » c'est une structure géologique riche en gisements aurifères en Abitibi-Témiscamingue au Québec. C'était aussi le nom d'une petite ville aujourd'hui devenue un quartier de Rouyn-Noranda.

Le Cadillac français du titre est beaucoup plus triste, puisque la ville a accueilli un « asile d'aliénés » où est mort de faim le grand-père de l'auteur en 1941. Une histoire tragique que celle de cet immigrant devenu « poilu » de la Première Guerre mondiale, gazé et interné pendant une vingtaine d'années. L'auteur ne l'a pas connu, mais lui consacre la première partie du livre.

La seconde partie, c'est l'histoire de son père, soldat de la Seconde Guerre mondiale, prisonnier pendant plusieurs années, un récit de survie où il change de nom pour éviter la purge mortelle. D'horribles conditions de détention, des tentatives d'évasion durement réprimées, des épreuves qui marquent une existence à jamais. Un dénouement funeste…

Finalement, sa propre histoire, un petit-fils d'immigrant qui est tellement Français qu'il est devenu agrégé de français. Il ne fait pas partie d'une communauté et ne partage pas de sentiments de judéité. On n'est pas ce qu'on est parce que « vient de » et d'autres personnes que nos parents peuvent avoir davantage d'importance sur nos destinées et la lignée généalogique ne détermine pas la valeur de la personne. (On sait aussi que venir d'une « Familia grande » n'est pas toujours un gage de vertu.)

Mais après ces histoires marquées par les atrocités des Guerres mondiales, en ce 21e siècle, dans une rue de Paris, il sera horrifié d'entendre crier « Mort aux Juifs ».
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A travers l'histoire de sa famille, François Noudelmann nous plonge dans cent ans d'Histoire, un témoignage, romancé au début avec l'histoire de son grand-père Chaïm et retranscrit pour celle de son père Albert, pour se terminer avec les questionnements de l'auteur sur notre identité. Est-elle généalogique ou se forge t-elle au hasard des rencontres et des opportunités de la vie ? Pour François Noudelmann qui a été élevé dans une famille où on ne transmettait pas, ce sont les rencontres qui font une personnalité. Mais lorsque une association pour la sauvegarde du cimetière des oubliés de Cadillac contacte l'auteur, celui-ci va faire des recherches et se "rapprocher" de ses racines familiales.

Chaïm Noudelmann, le grand-père de l'auteur, fuit les persécutions contre les juifs en Lituanie en 1911. Il choisit la France, le pays qui a défendu un juif Albert Dreyfus et peut-être aussi parce que ses moyens ne lui permettaient pas de traverser l'Océan pour aller aux Etats-Unis ? Pour être naturalisé français, il fallait s'engager dans la guerre de 1914, ce qu'a fait Chaïm. Touché par les gaz moutarde, il perd la raison et devient un "fou de guerre", interné pendant plus de 20 ans dans différents hôpitaux psychiatriques pour terminer se vie dans celui de Cadillac, village de Gironde, dans des conditions de soins déplorables, où les pratiques médicales et (in)humaines étaient malheureusement en usage à l'époque. Il obtiendra la nationalité française alors qu'il est interné, en 1927, mais reste oublié de tous, même par sa famille qui n'en parle pas. Chez les Noudelmann, on ne parle pas non plus de ses origines juives, par protection d'abord et par désir d'assimilation totale à la France.

Chaïm a un fils, Albert, le père du narrateur. Lui aussi va partir à la guerre, celle de 1939-1945, L Histoire se répète. Blessé à l'oreille à cause d'une bombe, puis prisonnier de guerre en 1940, il est déporté en Pologne, dans des camps de travail, jusqu'à la libération. de cette période, Albert ne parlera pas non plus jusqu'à ce que l'auteur, son fils, lui demande de raconter sa guerre. Pendant plusieurs heures, il va raconter ces années au parcours rocambolesque où il ira de camps de travail en évasion, sera repris, se re évadera... Où il rencontrera amis et amours, modifiant son identité car dénoncé par des amis français pour une ration de nourriture supplémentaire, il doit cacher ses origines juives pour survivre.

Dans la 3ème et dernière partie du livre, l'auteur nous parle de lui, de la judéité, de son engagement politique, de son questionnement sur l'appartenance (ou pas) à une nationalité à une Culture, à une religion, de son effarement quand il a entendu dans une manifestation pour la paix, fin 2008, à laquelle il participait, les mots "Mort aux juifs", de ce que ce constat d'éternel recommencement a eu (ou pas) comme effet sur lui et sur la suite de son parcours.

Maintenant habitant aux Etats-unis, peut-être comme une continuité au parcours qu'aurait pu faire son grand-père en 1911, François Noudelmann a le recul d'un français à l'étranger pour réfléchir de loin à ce qui fait son identité et de façon plus générale à l'identité de tout un chacun.

Un récit philosophique, historique, sociétal, magnifiquement écrit par François Noudelmann, docteur en philosophie, nous amenant à une profonde réflexion sur ce qui fait notre identité.

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Énorme coup de coeur de la dernière rentrée littéraire. Plus attirée par le titre que par le résumé de l'histoire en quatrième de couverture je me suis laissée happer par ce récit familial. Il y a le grand-père Chaim fuyant la Lituanie et les persécutions envers les juifs. En roulotte il traversera l'Europe et posera ses malles en France où il sera mobilisé lors de la première guerre mondiale. Il ne sortira de cette expérience ni vivant ni mort, entre les deux, interné d'asiles en asiles car ayant perdu la tête et la raison suite à une blessure chimique. Puis il y a son fils Albert qui lui vivra la seconde guerre mondiale et ne s'en remettra jamais tout à fait. C'est la deuxième partie du livre. le grand-père d'abord, le fils ensuite et enfin le petit-fils qui est l'auteur lui-même. Que de questionnements dans cette oeuvre sur l'identité, les racines, ce que c'est que d'être français, la généalogie.

Ce roman est une perle, tout simplement. Il se lit avec un grand plaisir malgré la noirceur des situations de chacun des protagonistes. L'écriture est belle et poignante, le propos fait réfléchir : une réussite.
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Il y a des romans ( mais ici est-ce vraiment un roman ? ) qui vous transportent par l'évidence et la clarté du récit. Pour ce premier roman ( puisque c'est noté ainsi sous le titre), François Noudelmann divise son ouvrage en trois parties distinctes. La première sera consacrée à son grand-père Chaïm, juif ayant fui la Lituanie à la veille de la première guerre mondiale et qui, pour s'intégrer à jamais dans le pays qui l'accueille, devient un de ses soldats, un poilu puisque c'est la France sa terre d'asile. La deuxième sera le récit de son père qui aura fait le même voyage dans l'autre sens ( et retour) ballotté par les aléas de l'histoire et plus précisément par la deuxième guerre mondiale. La troisième tournera autour du narrateur fils et petit-fils des précédents, qui s'interrogera autant sur ses racines, son identité de français, de juif dans un monde où l'histoire a la fâcheuse tendance à se répéter.
On pourrait penser à lire ce résumé que nous sommes dans un livre de souvenirs plus que dans un roman, même si, comme c'est le cas dans ces "enfants de Cadillac", la vie apparaît bien plus romanesque que tout ce qui pourrait sortir de la tête d'un auteur inspiré. Par la grâce d'une écriture limpide, la force de ces destins particuliers mais surtout par l'évident recul autant philosophique, sociologique qu'historique dont est capable l'auteur, le texte nous emporte autant dans le vent de l'Histoire et d'histoires singulières que dans un cheminement intellectuel des plus stimulants. Tout en nous passionnant pour le sort de son grand-père mort de faim dans un asile psychiatrique en 1941 ( comme plus de 45 000 autres patients dits fous de cette époque) ou de la rencontre de son père avec l'inhumanité en général mais aussi en particulier ( celle que des hommes plus que persécutés mettent en place à l'intérieur de camps pour assouvir leur pouvoir sur encore plus persécutés qu'eux) , c'est une profonde et très accessible réflexion qui nous attend au détour de pages percutantes, pertinentes, s'interrogeant, entre autre, avec un réel recul, sur ce qui compose notre identité, nos possibilités de nous intégrer dans des groupes sociaux comme religieux.

Oubliez la polémique vaine qui entoure ce roman ( et qui sans doute le fera disparaître à tort des listes des prix de l'automne) et partez à la rencontre de ces "enfants de Cadillac", lecture passionnante et vivifiante pour l'esprit, magnifiquement écrite et qui résonnera longtemps en vous. Sans conteste un des très bons livres de cette rentrée.
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Chaïm, le grand-père, a fui sa Russie natale en charrette pour trouver refuge dans la merveilleuse France. Il se bat pour elle en 14-18. Mais elle le laisse mourrir à Cadillac en 41, dans les conditions les plus terribles.

Albert, le père, donne 7 ans de sa vie à la France. Ces sept années sont une épopée incroyable, époustouflante, au milieu de l'indicible de la Seconde Guerre mondiale.

Francois, le fils, porte le poids de ces deux histoires, des Juifs désignés comme Juifs par des sociétés qui n'en veulent pas, mais des hommes avant tout qui tentent de survivre et de montrer qu'ils aiment la France.

François se souvient d'un temps où être Juif n'était plus un problème, un temps de mémoire et de repentir.
Ce temps est révolu. le “mort aux Juifs” est à nouveau crié sur la place publique.

Entre le récit et la réflexion philosophique, François Noudelmann tente de donner un sens à la judéité, à la transmission familiale et à l'identité.
Il passe judicieusement par le récit captivant des vies de son père et de son grand-père pour arriver à son but.

C'est passionnant, bien écrit et la troisième partie, plus réflexive, demande d'être lue (voire relue (j'avais écrit « remue »)) très lentement pour en peser tout le poids.

Je constate que j'ai encore des choses à apprendre sur cette guerre. Je n'avais jamais entendu parler des fous de Cadillac. J'en suis atterrée.

Un roman essai passionnant et une plume sublime. Bravo!
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C'est une histoire de famille qui s'étale sur trois générations.
Le grand-père juif lituanien traverse l'Europe avec sa carriole pour s'établir en France, pays mythifié. Il s'engagera dans l'armée française en 1914, subira les attaques du gaz moutarde et, « le cerveau mutilé » comme beaucoup, devra être interné dans un asile psychiatrique à Cadillac, où il finira sa vie.
Le père, Français avant d'être Juif, sera fait prisonnier de guerre en 1940, devra lui aussi traverser l'Europe d'Est en Ouest à la libération des camps. Il retrouvera la France dans la douleur, son épouse ayant convolé par ailleurs.
Le fils (l'auteur) à la jeunesse difficile s'interroge sur son identité, et conclut finalement que l'on peut-être autant sinon plus le fruit des rencontres de hasard que de sa généalogie.
Un beau témoignage sur trois générations et de justes réflexions sur l'identité. À méditer.
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« La recherche des ancêtres m'a toujours parue assommante, et même douteuse. »
C'est par ces mots que François Noudelmann commence son récit. Mais c'est pourtant bien à l'exhumation de secrets de familles qu'est dédié ce livre. Alors certes, à sa décharge, comme il l'explique vers la fin, c'est son grand-père, qu'il n'a jamais connu, qui est venu à lui et non l'inverse, par l'exhumation des ossements du cimetière des oubliés de l'hôpital psychiatrique de Cadillac.
S'ensuit trois récits.
Celui supposé, imaginé, de son grand-père Chaïm, qui a fuit les pogroms en Lituanie, s'est engagé volontairement comme poilu de la 1ère guerre mondiale, et qui a perdu la raison suite à une exposition au gaz moutarde, et s'est ainsi retrouvé interné et oublié à Cadillac.
Celui de son père Albert, transmis oralement une seule et unique fois, de son parcours de prisonnier en Pologne lors de la 2ème guerre mondiale.
Et enfin les conséquences de ces manques et absences sur sa propre vie, ses choix, son identité, sa judéité, sa nationalité, sa carrière. Car ces deux destins hors du commun, même cachés, ne peuvent pas ne pas avoir de répercussions sur le destin de la génération suivante.
Un texte court mais très intense, sans dialogue, très riche, où chaque mot est pesé et posé. Un récit très personnel, introspectif, sincère. Une écriture travaillée, qui rend la lecture peu fluide (est-ce la signature des philosophes ?), mais de grande qualité.
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