Citations sur Le chat en 60 poèmes (10)
CHATS DE PARTOUT
Je suis le chat de cimetière,
De terrain vague et de gouttière,
De Haute-Egypte et du ruisseau
Je suis venu de saut en saut.
Je suis le chat qui se prélasse
A l'instant où le soleil passe,
Dans vos jardins et dans vos cours
Sans avoir patte de velours.
Je suis le chat de l'infortune,
Le trublion du clair de lune
Qui vous réveille dans la nuit
Au beau milieu de vos ennuis.
Je suis le chat des maléfices
Condamné par le Saint-Office;
J'évoque la superstition
Qui cause vos malédictions.
Je suis le chat qui déambule
Dans vos couloirs de vestibules,
Et qui fait ses petits besoins
Sous la porte cochère du coin.
Je suis le félin bas de gamme,
La bonne action des vieilles dames
Qui me prodiguent le ron-ron
Sans souci du qu'en dira-t-on.
Épargnez-moi par vos prières
Le châtiment de la fourrière
Où finissent vos émigrés
Sans demeure et sans pedigree.
Henri Monnier, Les Chansons du Chat Noir, 1881-1886
VENUS ET APHRODITE
Prends ton ciseau, sculpteur ; polis ton diamant,
Lapideur, émailleur, fonds ta pâte. Les belles
Que j'aime, les voici ; je les veux immortelles ;
Éternisez pour moi leurs grâces d'un moment.
Sauvez-les de la mort par votre enchantement.
L'une est noire ; ses cils couvent des étincelles.
Le jaspe étoile d'or me rendra ses prunelles,
Et le basalte noir son corps souple et charmant.
L'autre est de jais, d'albâtre, et d'ambre chamarrée ;
Pour sa robe taillez la roche bigarrée ;
L'émeraude fera la splendeur de ses yeux ;
Et j'aurai, pour peupler mon intime oratoire,
Parmi mes dieux privés, deux lares glorieux,
La Vénus tricolore et l'Aphrodite noire.
Hippolyte Taine, A trois Chats, douze sonnets, Les pénates, 1883.
Praxis
"Cultive ton jardin", disait Goethe et Voltaire;
Au-delà,ton ouvrage est caduc et mort-né;
Enfermons nos efforts dans un cercle borné;
Points d'écarts;ne cherchons le ciel que sur la terre.
Ainsi fait notre ami;comme un vieux militaire,
Il brosse son habit sitôt qu'il a dîné,
Dans son domaine étroit librement confiné.
Ministre de sa peau,tout à son ministère.
Il s'épluche,il se lisse,il sait ce qu'il se doit.
Pauvre petit torchon moins large que le doigt.
Sa langue est tour à tour éponge,étrille et peigne.
Son nez rejoins son dos;il lèche en insistant;
Pas un poil si lointain que la râpe n'atteigne.
Goethe,instruit par Voltaire,en a-t-il fait autant?
Hippolyte Taine, A trois chats, douze sonnets, 1883
Rien n'est plus doux
Rien ne donne à la peau une sensation
Plus délicate
Plus raffinée
Plus rare
Que la robe tiède et vivante d'un chat.
De Maupassant, Gil Blas.
Matin frileux !
Le temps se vêt de brumes;
Le vent retrousse au cou des pigeons bleus
Les plumes....
L'air est rugueux et cru
Un chat près du foyer se pelotonne;
Et tout à coup au coin du bois résonne,
Monotone et discord
L'appel tintamarrant des cors
D'automne.
Matins frileux
Matins frileux !
Le vent se vêt de brume ;
Le vent retrousse au cou des pigeons bleus
Les plumes...
L’air est rugueux et cru ;
Un chat près du foyer se pelotonne ;
Et tout à coup, du coin du bois résonne,
Monotone et discord,
L’appel tintamarrant des cors
D’automne.
Emile Verhaeren, Toute la Flandre, Automne, 1904-1911.
O beau chat
Je me retourne
O beau chat
Vers tes prunelles sacrées
Et il semble
Que devant moi
J’ai
Deux étoiles
Le Tasse, Rimes, 1579-1586
Douceur féline
Rien n’est plus doux
Rien ne donne à la peau une sensation
Plus délicate
Plus raffinée
Plus rare
Que la robe tiède et vibrante d’un chat
Guy de Maupassant, Gil Blas, 1886
Sombre complice
Panthère du foyer, tigre en miniature,
Tu me plais par ton vague et ton aménité,
Et je suis ton ami car, car nulle créature
N'a compris mieux que toi m'a sombre étrangeté,
Panthère du foyer, tigre en miniature.
Maurice Rollinat Les Névroses
Panthère du foyer, tigre en miniature,
Tu me plais par ton vague et ton aménité,
Et je suis ton ami, car nulle créature
N’a compris mieux que toi ma sombre étrangeté,
Panthère du foyer, tigre en miniature.