La culture ne dispense donc pas, en soi, d'être barbare, car elle peut aussi se mettre au service de la pulsion de mort et, donc, l'augmenter, l'accélérer, la rendre plus nocive... Il existe des cultures de mort et ces dernières naissent quand elles prennent leurs distances avec les cultures de vie.
p. 72
Le présent qui subit lui aussi la loi du temps, bien sûr, semble n'être qu'un instant furtif dans lequel se joue cette métamorphose du futur en passé, car tout passé s'avère un ancien futur devenu.
p. 36
Cosmos
Sauf si l'on part du principe que la mort est un héritage, que le disparu a légué ce qu'il fut et que, quand on a eu la chance d'avoir eu un père et une compagne ayant confiné à la sainteté laïque par leur bonté, il nous reste à leur rendre le seul hommage qui soit : vivre selon leurs principes, être conforme à ce qui faisait d'eux des personnes aimées, ne pas laisser mourir leur puissance d'exister dans leur générosité d'être en la reprenant comme on relève un étendard tombé au sol après un combat, agir sous leur regard inexistant et leur rester fidèle en incarnant leurs vertus, en épousant leur art de produire de la douceur.
Transformer une catastrophe en fidélité, voilà ce que propose Cosmos …
p. 26
Découvrir ainsi l'immensité du temps et la petitesse de nos vies, c'est apprendre le sublime, le découvrir, y tendre et vouloir y prendre place.
[...]
Le ciel étoilé offre une leçon de sagesse à qui sait le regarder s'y perdre, c'est se trouver.
p. 15
Tout passé s'avère un ancien futur devenu.
Le désir ne tient jamais ses promesses
Schopenhauer
Il ne fait pas confiance aux mots qui travestissent les choses et médiatisent un réel s'enfuyant dès qu'on le nomme.
Nous sommes dans un temps qui nous fait être ce que nous sommes et contre lequel nous ne pouvons donc rien. Il faut en faire son deuil et vivre avec - il faut, comme le dit la sagesse populaire, être philosophe. En revanche, ce sur quoi on a du pouvoir, il faut le vouloir. Il existe donc des possibilités de construire un contre-temps comme antidote au temps mort dans lequel beaucoup survivent.
On le sait depuis les stoïciens, nous vivons la plupart du temps comme si nous ne devions jamais mourir ; mais vivre comme si nous devions mourir demain n'est pas non plus une solution. L'innocence et l'inconscience valent autant que la frayeur ou l'affolement, ni fou qui ne veut pas savoir, ni fou qui paniquerait de savoir ce qu'il sait, il faut tâcher d'être sage. Comment ? En supprimant les écrans qui s'interposent entre le réel et nous. En allant directement au monde. En voulant le contact avec lui. En écartant tout ce qui s'interpose, s'intercale, se met entre lui et nous et nous empêche de voir, donc de savoir.
A la façon de Diogène qui méprisait l'argent et la propriété, les honneurs et les colifichets, les Tziganes dédaignent le pouvoir. Comme le philosophe au chien qui anéantit le pouvoir d'Alexandre en lui disant qu'il a aucun pouvoir sur lui, les Tziganes expriment la liberté libre chère au cœur de Rimbaud, celle qui fait qu'on n'a peur de rien ni de personne.