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Critique de Tandarica


L'édition a plus de 20 ans (1994) et a assez mal vieilli : francisation des noms, diacritiques roumains à la trappe, pas mal de coquilles, les paragraphes plus longs que ceux de l'édition roumaine (pas de petites économies). Mais à part ça, traduction OK : en testant rapidement pas trouvé de manque, chapitrage identique au roumain, mais attention, la suite dévoile l'intrigue.
Lina, doctoresse, et son mari Rim, professeur universitaire de biologie et musicien amateur ont emménagé dans leur maison et engagé Sia, la fille du cousin de Lina, Lică, comme bonne. La soeur de Lică, Elena Hallipa, mariée au banquier Drăgănescu, veut organiser un concert de Bach. Un jour, Lică arrête le cheval qui a failli l'écraser, d'Ada Razu, princesse Maxence, qui tombe amoureuse de lui et réciproquement. Elle lui trouve un poste dans son écurie, alors que le prince Maxence, ancien fiancé d'Elena, se meurt de la tuberculose. Pendant ce temps, Rim jette son dévolu sur Sia, sans se douter qu'elle est aussi la fille de Lina et engage les frères jumeaux d'Elena à l'Université. Elena prend sa jeune soeur Norica à son service, qui avait gâché ses fiançailles. Ada s'introduit dans la société d'Elena grâce au cousin de Maxence, chef d'orchestre, Victor Marcian, qui dirigera le concert de Bach. Lică devient responsable de l'écurie et s'introduit dans la bonne société peu à peu, s'écartant complètement de Sia dans sa liaison avec Ada. Maxence doit se faire soigner à Leysin. Lina renvoie Sia qui trouve refuge chez les jumeaux. Pendant les préparatifs du concert, une liaison entre Marcian et Elena se construit. Norica tente une approche vers Drăgănescu, sans succès. Maxence meurt en Suisse, Lică a une opportunité pour se lancer en politique, Ada songe au mariage. Sia tombe enceinte et meurt d'une infection, ce qui n'empêche pas le lendemain le succès du concert de Bach.
Un peu d'autoflagellation dans la présentation, qui parle d'un „roman de moeurs comme on les aimait au début du siècle”. Certes, mais Houellebecq par exemple doit beaucoup au roman de moeurs. C'est aussi un prisme peu évoqué à travers lequel voir la littérature roumaine : plus tard l'oeuvre de Marin Preda, voire aujourd'hui Calin Torsan ou Savatie Bastovoi s'en approchent par bien des aspects. Dans l'ensemble, tout cela tient tout de même bien la route, comme Garabet Ibraileanu, au regard des modèles étrangers comme Edith Wharton, Henry James et d'autres.
Hortensia Papadat-Bengescu a une postérité assez particulière : la „plus grande romancière roumaine” peut-être, mais on ne trouve couramment (France ou Roumanie) en librairie et sur Internet que „Le Concert de Bach”, alors que le roman fait partie d'un cycle, celui des Hallipa, ce qui explique qu'on a parfois l'impression d'avoir raté un épisode : ce n'est pas le premier volume ! Papadat-Bengescu a un peu le même champ d'action que Proust : le monde. Et donc le Bucarest de l'entre-deux-guerres, où elle est solidement ancrée. Moins de digressions, construction narrative moins élaborée, un style plus explicatif et direct sur les intentions des personnages. Sur le fond, elle se montre bien plus pessimiste : chez Proust, le monde (ou l'élite) est superficiel éventuellement dépravé. Chez Papadat-Bengescu, il est corrompu, criminel, incestueux, souvent incompétent, hypocondriaque et la pureté de ses sons origine laisse à désirer. Parfois il vit même au crochet des pauvres. Roman plein de maîtrise, qui vaut le détour littéraire.
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