“sexe, érotisme, amour sont les aspects du même phénomène, des manifestations de ce que nous appelons la vie. Le plus ancien des trois, le plus considérable et fondamental est le sexe. C’est la source première. L’érotisme et l’amour sont des formes dérivées de l’instinct sexuel : cristallisations, sublimations, perversions et condensations qui transforment la sexualité et la rend, bien des fois, inconnaissable. ”
Poésie et érotisme naissent des sens mais ne s'achèvent pas avec eux. En se déployant, ils inventent des configurations imaginaires : poèmes et cérémonies.
L'idée de l'amour a été le levain moral et spirituel de notre société, un millénaire durant. Elle est née dans un recoin de l'Europe, et comme la pensée et les sciences occidentales, elle est devenue universelle. Aujourd'hui elle menace ruine ; ses ennemis ne sont plus ceux de jadis, l'Église et la morale de l'abstinence, mais la promiscuité, qui transforme l'amour en passe-temps, et l'argent qui la convertit en esclavage. Si notre monde doit recouvrer la santé, le traitement doit être double : la régénération politique inclut la résurrection de l'amour.
Le capitalisme a fait d'Éros un employé de Mammon.
À notre époque la politique absorbe l'érotisme et le transforme : ce n'est plus une passion, c'est un droit. Profit et perte : la légitimité l'emporte mais l'autre dimension, passionnelle et spirituelle, disparaît. Au cours de ces années-là ont été publiés, comme je l'ai dit, quantité d'articles, d'essais et de livre sur la sexologie et autres questions analogues, telles que la sociologie et la politique du sexe, étrangères toutes au thème de ces réflexions. Le grand absent de la révolte érotique de cette fin de siècle a été l'amour.
Le sexe est la racine, l'érotisme est la tige et l'amour est la fleur, et le fruit? Les fruits de l'amour sont intangibles.