Citations sur Éloge de la lecture : La construction de soi (131)
Ou Joseph Winckler: "Avec mes mots, je dessine une cage autour de la frayeur."
Ceux qui lisent ne sont pas des pages blanches sur lesquelles le texte s'imprimerait, ils ne sont pas pure passivité. Ils changent le sens des ouvrages, les interprètent à leur guise en glissant leurs désirs, leurs angoisses, leurs questions entre les lignes : c'est toute l'alchimie de la réception.
(...) plutôt que de voir dans la lecture un investissement pour des lendemains plus rentables, voyons-là comme un espace où vivre un présent plus vaste, plus intense, où s'accorder au monde, et aux autres, avec un peu de poésie et d'intelligence.
Et si telle phrase a compté, c'est parce qu'elle leur [aux lecteurs] a permis de se reconnaître, non pas tant au sens de se reconnaître dans un miroir que de se sentir un droit légitime d'avoir une place, d'être ce qu'ils sont, ou plus encore de devenir ce qu'ils étaient à leur insu.
Leurs blessures et leurs espoirs secrets, d'autres ont su les dire, dans des mots qui les délivrent, dans des phrases où ils trouvent place, qui dessinent leurs contours; dans des textes qui révèlent celui ou celle qui lit - au sens où l'on dit "révéler" une photo -, qui font monter ce qui était, jusque-là, scellé et ne pouvait se dire.
La lecture relance une activité de symbolisation, et sans doute est-ce là l’essentiel. Un texte peut être l’occasion de renouveler, de recomposer les représentations que l’on a de sa propre histoire, de son monde intérieur, de son lien au monde extérieur.
Le monde n’est habitable que si sont ménagés des lieux qui permettent du mouvement, du détachement, du repos, des passages, des mises en rapport insolites ; des espaces qui ouvrent sur autre chose, récits d’ailleurs, visages inconnus, légendes ou sciences. Un livre, c’est cela, tout simplement.
"Le monde n'est habitable que si sont ménagés des lieux qui permettent du mouvement, du détachement, du repos, des passages, des mises en rapport insolites; des espaces qui ouvrent sur autre chose, récits d'ailleurs, visages inconnus, légendes ou sciences. Un livre, c'est cela, tout simplement."
"Ce que j'aimerais, c'est que le bibliothécaire ait du temps pour se consacrer à ce qui est de l'ordre de la vie, tout ce qui touche à la vie. Plutôt qu'être un conservateur de livres, être un magicien qui nous emmène dans des livres, dans des mondes..."
Un livre, c'est une hospitalité qui est offerte, une sorte d'abri que l'on peut emporter avec soi, où l'on peut faire retour, un refuge où résonne comme l'écho lointain de la voix qui nous a bercés, du corps où nous avons séjourné.