Cette souffrance n’était pas la sienne et leur présence l’empêchait de s’en défaire. Il était temps pour elle d’ignorer leurs plaintes, d’écouter ses propres désirs et d’entendre à nouveau l’écho de son rire chatouiller ses oreilles.
Elle prenait tout et ne donnait rien. Elle n'avait en elle aucune douceur. Juste de l'angoisse, de la tristesse et de la souffrance. A son contact, ça faisait mal.
Chez elle tout était angoisse. Manie. Tyrannie. Rien de simple, tout allait en sens inverse. Il fallait que ça s'emmêle, que ça se torture, faire que tout soit dur. La gorge devait racler la colère accumulée, les mains devaient broyer toute la douleur supportée, le regard devait exterminer tout ce qui autour faisait comme si de rien n'était.
Il faut être fort pour ne pas se perdre. Notre chemin n’est pas tracé même si l’on naît du bon côté. Pile ou face. Encore faut-il avoir une pièce dans sa besace.
- Je suis parfaite, répéta Eva dans sa petite tirée à quatre épingles.
Elle aurait préféré des mots comme jolie ou mignonne. Parfaite, pour une fille de huit ans, ça ne voulait rien dire, surtout de la part d’une maman.
sur une terre à l'abri de l'univers,il faut etre fort pour ne pas se perdre.Notre chemin n'est pas via,ce meme si l'on nait du bon coté.Pile ou face.Encore fait-il avoir pièce dans se besace.
Un petit bout de cheminée pour y poser son cadre. Pour y exposer son sourire. Pour rappeler ses éclats de rire. Pour ne plus vivre dans le pire.
Tout n’est pas si simple. Les pauvres rient et les riches s’ennuient. Le sol que l’on foule n’est pas toujours le bourreau qui nous détruit. Et si le responsable était ailleurs ?
Et puis la vie avait repris le dessus. Parce que c’était comme ça. Parce qu’il y avait des bêtes à nourrir et des champs à entretenir. Parce que le temps avait réussi à panser les blessures les plus virulentes et à sculpter de solides cicatrices. Douloureuses mais ardentes. Vivantes. Parce que le soleil continuait de se lever.
Chacun avait secrètement décidé, à l’insu de tous et d’eux-mêmes, de défier le mauvais sort et de mettre un soupçon de plaisir dans la grisaille de leur quotidien en assaisonnant leurs journées comme bon leur semblait.