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Critique de Syl


Aujourd'hui, il fait beau. C'est une matinée à prendre son thé dans le jardin, un livre sur les genoux. La campagne est silencieuse, seuls les oiseaux parlent. Un petit air balance les branches des arbres. J'ai trois grands marronniers qui crissent dans un petit bruit argentin, ce sont des chuchotements coquins. Les fées m'observent… je le sais, on le dit dans mon livre.

Le jardin recèle un univers enchanteur. Cette communauté est aussi vieille que notre monde. On ne sait jamais où la trouver, mais parfois, elle se livre au regard d'un promeneur au détour d'un chemin, d'une balade en forêt, dans un verger…
Ainsi par une nuit sombre et lugubre, comme on peut l'imaginer dans un conte, un fermier de Cornouaille, Mr. Noy, les découvrit en traversant la lande. Il rapporta que c'était dans "le plus merveilleux des vergers". Fleurs, fruits, arbres, tout y était épanoui et luxuriant. le dramatique de l'histoire, c'est que Mr. Noy y vit aussi sa fiancée défunte. Elle n'était pas morte, mais simplement prisonnière d'un enchantement pour avoir croqué un fruit de ce verger. Son éternité maintenant était parmi les fées. Mr. Noy dut la quitter et toute sa vie, il pleura cet amour.
Cherry de Zennor, de Cornouaille également, raconta son amour avec un homme du peuple des fées… Il ne faut jamais brusquer ces créatures surnaturelles, sinon, elles disparaissent à jamais et leur monde nous ferme ses portes.

Dans les arbres, chênes, frênes, noisetiers, noyers, sureaux… ils aiment s'y reposer, ou surveiller. Les légendes citent souvent l'arbre comme le portail du royaume. Les nymphes des bois, les lutins sylvestres, peuvent se transformer en arbre, en ramage, et ainsi garder les lieux. Malheureux celui qui s'aventurerait à tronçonner sans réfléchir ! Des créatures maléfiques viendraient aussitôt le tourmenter.
L'aubépinier a un pouvoir qu'il ne faut pas négliger. En 1920, "… on avait prévu de défricher pour construire un hôpital. Un bûcheron avait été prévenu que cet abattage risquait fort d'être le dernier pour lui, mais il rétorqua : "Je reviendrai sauf, sans aucune peur, et allez donc au diable avec vos foutues superstitions !". La vengeance des esprits fut impitoyable. le bûcheron fut foudroyé par une attaque dans la nuit même. Il retourna en ville, ainsi qu'il l'avait juré, mais dans un cercueil, l'année suivante. L'hôpital fut construit mais n'a jamais été en fonction."

D'hier et d'aujourd'hui, les contes et légendes témoignent qu'il ne faut pas prendre à la légère les avertissements des fées. Elles peuvent se montrer bonnes comme mauvaises si on commet un impair. Il est donné dans le livre quelques consignes pour ne pas être impudent et les vexer.
Un jour, le jeune Willy du comté de Durham, à Midrige, se montra sot en oubliant les consignes : Ne pas leur adresser directement la parole, venir seul pour les rencontrer, se montrer poli… Il fut donc poursuivi par les esprits furieux jusqu'à sa maison et fut à deux doigts d'être embroché par la lance du roi des fées.

Campagnes, vergers, arbres, chemins, collines et aussi eaux… mers, lacs, rivières, étangs, marécages, puits. Elles sont partout. Un topographe écossais, Gérald Cambresis, a découvert un palais sous un lac. Sirènes, ondines, naïades, elles n'hésitent pas à rejoindre la terre par amour, mais s'enfuient dès leur susceptibilité chatouillée.

La lune est l'astre propice pour les rencontres. Dès que le soir tombe, on peut les surprendre entrain de danser. Il faut se montrer patient, d'un bon oeil, et être accompagné d'une chatte noire. Un petit rituel est alors préconisé… si vous êtes curieux, demandez-le moi et je vous le transmettrai…
Vous pouvez aussi voir d'autres choses moins belles. le peuple des fées a des créatures que l'on appelle des gnomes. Ils vivent sous terre et dans des grottes. Ils se montrent vindicatifs, hargneux, et protègent les trésors. Les illustrations qui les représentent ne sont pas très sympathiques ! ils sont moins élégants que les petites créatures ailées.
Certaines fées ont été photographiées. Sir Arthur Conan Doyle en a écrit un livre et nous présente les jeunes filles qui les ont saisies dans leur parade. Elsie Wright et Frances Griffiths sont deux petites friponnes… le romancier qui a donné vie à Sherlock Holmes, se questionnait encore à la fin de son livre ; les ont-elles vraiment vues ?

A la moitié de mon livre, j'arrête ma lecture et m'attarde sur les dessins qui le parent. le papier a une teinte beige rosé, et donne un aspect vieilli. Les couleurs sont douces, un peu fanées, aquarellées. de belles illustrations enluminent les textes, certaines récentes sont de Kim Glass, d'autres sorties d'ouvrages anciens, dans le style de Cicely Mary Barker.
La magie fut immédiate, l'évasion aussi.

La deuxième partie révèle un herbier magique. Je pense alors à Benjamin Lacombe et son magnifique album "L'herbier des fées" et à Jean-Jacques Grandville avec "les fleurs animées".
J'en conçois que fées et fleurs se confondent.
"La magie "verte" génère d'innombrables sortilèges. La force vitale dégagée par nos plantes est telle que, lorsqu'on l'exploite, elle transforme inévitablement nos existences."
Les saisons offrent ses fleurs et délicatement, on peut les récolter. Chacune à ses particularités, ses emblèmes, ses senteurs, ses histoires, ses secrets. Admirées, célébrées, priées, elles sont plus que des corolles, elles sont magiciennes, et leurs pouvoirs sont multiples.

Mais avant la cueillette des fleurs, il faut cultiver son jardin. Nous passons ainsi dans la troisième partie.
Un jardin est personnel, il se créait amoureusement et méthodiquement. N'allez pas croire que les fées apprécient toutes les terres ! Il faut la travailler suivant les astres et les conseils des anciens pour avoir une belle moisson. Ici, nous parlons d'un jardin de plantes magiques. Il sera alors divisé en quatre loges ; un massif pour l'amour, un deuxième pour la protection, un troisième pour la médecine et un quatrième pour l'âme. Quelques sortilèges sont dévoilés, ainsi que le cérémonial pour le faire et il est indispensable d'avoir un couteau rituel, seulement approprié à la coupe des plantes.
"Le couteau devra être neuf et propre, avec un manche en bois et une lame d'acier…"

Le boudoir fleuri de la reine Titania, dans "Le songe d'une nuit d'été" de William Shakespeare, et le bosquet des fées, closent cette incursion au pays imaginaire et féérique des légendes. Après le jardin, il nous faut préparer un bois avec au moins cinq arbres. le chêne est un réceptacle de gui ("sacré pour les druides"), le frêne pour les baguettes magiques, l'aubépine pour le sabbat, le sureau pour la protection et le saule pour exaucer les voeux.
Avec ces essences végétales, nous sommes parés pour passer la frontière qui sépare nos deux mondes.

Je lisais et je vous écrivais. Nous sommes à présent l'après-midi, nous aurons pratiquement passé la journée ensemble. Il fait toujours beau, le vent est plus taquin, les oiseaux s'égosillent allègrement. J'ai reçu la visite du chat de la voisine (dommage, il n'est pas noir), j'ai entrecoupé ma lecture de pauses, j'ai une théière pleine de thé de Chine à la bergamote et au citron, je suis allée visiter mon potager et mes parterres de fleurs en fouillis (il en faut pour mes fées), je suis allée caresser mon aubépine en lui promettant de ne plus jamais la couper. J'ai remarqué que je n'avais pas de saule ! J'ai essayé d'écouter, de voir… je crois qu'il faut que je me montre patiente. Voilà… je referme ce livre et je me sens rajeunie et contente.
Je vous conseille ce beau livre dont l'initiation se fait avec bienveillance, charme et sourire…
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