Aimer n'est pas un dû. C'est un choix que l'on renouvelle chaque jour.
_ Pourquoi tu ne réponds jamais au téléphone, tête de mule ? Je t'ai appelé toute la semaine !
D'une main, Laurel dissimula le sourire que suscitait l'accent de Tamani, plus fort à chaque mot. Shar ouvrit une des poches à sa ceinture pour en extraire son Iphone avec un air de dégoût digne de la mère de Laurel face aux restes moisis au fond du frigo.
_ Je n'arrive pas à faire archer ce truc pourri, avoua Shar. La plupart du temps, je ne l'entend pas bourdonner, et même quand c'est le cas, je le mets contre mon oreille, comme tu m'as dis, et rien ne se passe.
_ Tu ne glisses pas ton doigt sur la barre ? demanda Tamani.
_ Quelle barre ? Ce machin est aussi lisse qu'une feuille de houx, répliqua Shar en examinant le téléphone qu'il tenait à l'envers, comme put le constater Laurel. Tu m'avais dit qu'il suffisait de le prendre,et de lui parler. C'est ce que j'ai fait.
- Je n'ai jamais réussi à te haïr.
- Et ne va pas croire que c'est pour toujours.
- Je ne demande que cet instant.
Elle était à court d'arguments. Enfin, presque. Les seuls qui lui restaient, si faibles, si minces, ne pouvaient tenir alors qu'elle sentait les mains de Tamani, qui lui caressaient les épaules, et ses lèvres à un souffle des siennes.
Elle se pencha, toute distance abolie.
- Ça n'a rien à avoir avec ça, éluda Tamani d'un geste vague de la main.
- Quoi, alors ? demanda Laurel, exaspérée.
- C'est simplement que je ne veux pas copiner avec le type à qui j'ai l'intention de piquer la nana, lâcha-t-il, impassible, sans la regarder.