Je parle surtout pour les jeunes d'aujourd'hui.
Ils doivent connaître la barbarie d'hier pour défendre la démocratie d'aujourd'hui. La démocratie est un combat de tous les jours. Un peuple sans mémoire est condamné à revivre le passé. (Postface, p.191-192)
Il faut si peu de temps pour réduire un homme à néant. Une certaine persévérance suffit. Les SS l'avaient très bien compris. L'homme qui subit une injustice peut encore se relever pour faire face la tête haute. Mais l'homme qui, jour après jour, nuit après nuit, vit dans l'intimidation, la brutalité, l'humiliation, la terreur, sans savoir quel sort l'attend, devient vite une épave. (p.128)
Très tard j'ai rompu le silence.
Pour confondre les négationnistes qui prétendent que cela n'a pas existé, qu'il n'y a pas eu de chambres à gaz, de fours crématoires, de massacres en masse.
Je voudrais qu'ils aient raison, j'aurais gardé ma famille.
Ces gens sont dangereux: ils nient les crimes d'hier pour en commettre d'autres demain.
Je dois témoigner et celui qui entend un témoin devient témoin à son tour.
Tout allait si vite. Les aboiements des chiens, les portières claquées, les ordres en allemand, une agitation inhabituelle dans la rue... Puis les portes s'ouvraient, les Allemands entraient, avec les chiens, fouillaient les moindres recoins pour vérifier que personne ne s'y cachait, soulevaient les lattes du parquet dans l'espoir d'y trouver de l'argent ou des bijoux, schnell, schnell, raus! - et tous sortaient - les adultes, les enfants, les vieux - muets de peur, sans même avoir pu emporter un objet aimé, un souvenir, un bibelot, une photo... Un bébé au sein, un vieillard claudicant, schnell, schnell!, les aboiements des chiens, les ordres hurlés des hommes casqués et armés...