Comme
Horacio Lalia avec son album
le chat noir,
Alberto Breccia s'est lui aussi attelé à dessiner quelques-unes des nouvelles les plus célèbres d'
Edgar Poe :
le coeur révélateur,
William Wilson,
le masque de la mort rouge,
le chat noir et Monsieur Valdemar ont été mises en images pour certaines d'après les scénarios de Guillermo Saccommano ou
Carlos Trillo. le style adopté pour chaque nouvelle coïncide avec différentes périodes d'expériences graphiques d'
Alberto Breccia (consulter à ce sujet le site dédié au dessinateur). Comme le souligne
Agnès Carbonell dans sa préface, "une distance insondable semble séparer la géométrie laconique avec laquelle, en 1974,
Alberto Breccia adapte en noir et blanc,
le coeur révélateur d'
Edgar Poe et la débau
che d'arabesques colorées qui lui inspire, 8 ans plus tard, le conte du Masque de la mort rouge. Au premier regard seulement. Car entre ces extrêmes, les trois autres
Histoires extraordinaires de
Poe que
Breccia choisit de mettre en images permettent de renouer le fil de la logique qui unit ces deux oeuvres en apparence si opposées." Chaque nouvelle est-elle ainsi marquée d'une empreinte graphique très personnelle qui, telle la marque de fabrique d'
Alberto Breccia, fait de chaque vignette une peinture, un véritable tableau. Loin des ambiances gothiques ou romantiques habituellement attendues pour ce genre d'adaptations, les propositions de
Breccia très modernes, distillent un effroi muet presque exclusivement transcrit par l'image. Un album/recueil grandiose qui se situe entre la peinture et la brande-dessinée...
La comparaison entre Lalia et
Breccia est tentante : tous deux, amateurs de littérature ont adapté
Edgar Poe et
Lovecraft. Contrairement à
Horacio Lalia qui rend fidèlement l'esprit des contes d'
Edgar Poe par des dessins tout en noir et blanc avec l'accent mis sur l'expression des visages et une narration assez conventionelle (style pro
che des comics américains),
Alberto Breccia jongle quant à lui avec des techniques graphiques différentes. On notera par exemple les effets de répétition qui jouent avec la temporalité des récits ou le traitement des couleurs qui rappellera sans doute les techniques de la sérigraphie. le traitement presque cinématographique confère par ailleurs une puissance remarquable aux récits et révèle des techniques narratives admirablement maîtrisées. Souvenez-vous donc de ce dessinateur et partez donc à la (re)découverte de ses magnifiques travaux...
Pour aller plus loin, notons qu'
Alberto Breccia a stimulé dans son sillage la vocation de ses trois enfants qui se sont aussi consacrés au dessin. En témoigne le travail avec son fils
Enrique Breccia pour l'album
Che (1968), co-écrit avec
Hector Oesterheld, qui a valu aux trois collaborateurs censure et menace. Je reviendrai sur cet ouvrage à l'occasion d'un prochain compte-rendu...
Lien :
http://embuscades-alcapone.b..