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Critique de Dandine


"La Poniatowska" vient de feter ses 90 ans.
"La Princesse Rouge": Une princesse polonaise nee a Paris que les parents emmenent precipitamment au Mexique lors de la deuxieme guerre mondiale. Une princesse engagee a la cause du petit peuple.
" La Belle Helene": Quand elle assistait a une reunion litteraire tous les yeux etaient rives sur ses jambes, mais des qu'elle ouvrait la bouche c'etait au tour des oreilles d'etre rivees aux sons de sa bouche.
Pour ses 90 printemps je deterre un vieux billet (de 2017!), sans y rien changer:

Diego Rivera est un peintre celebre.
Diego Rivera est un monstre sacre.
Diego Rivera est un monstre. Un ogre cannibale qui engloutit la substance vitale de ceux qui l'entourent et n'en laisse que les os.

C'est du moins comme ca qu'il apparait dans ce petit livre de Poniatowska. Un livre qui imagine les lettres que lui aurait ecrit sa premiere femme, abandonnee sur le vieux continent apres dix ans de mariage, quand il repart, seul, pour le Mexique. Lachee, jetee comme du lest, oubliee. Loin des yeux loin du coeur? Rivera a de tres bons yeux de peintre, mais a-t-il du coeur?

Un roman epistolaire emouvant, parce qu'il soumet a notre lecture des lettres auxquelles ne repond qu'un silence humiliant, avilissant. Des lettres d'une femme desemparee par sa solitude. Sans lui, elle est seule et esseulee, et aucun des amis qui l'entourent et essayent de la soutenir n'arrivera a remplir le vide qui s'est empare d'elle. Elle est inconsolable. Elle continue a aimer, elle aimera toujours, tout en sachant qu'elle ne peut esperer ni amour, ni aucun sentiment en retour, de celui qui l'a delaissee. Ses lettres exhibent la passion obsessive d'une femme, peintre elle aussi, qui pendant dix ans avait laisse son art en arriere, deperir, pour mieux servir l'objet de son amour. Des lettres qui pleurent l'enfant qu'elle a eu de Rivera et qui est mort bebe, parce qu'il ne lui reste donc rien de lui. Des lettres de desarroi: sans lui, quel avenir? Pourquoi un avenir? Avant elle etait Quiela, comme lui l'appelait. Maintenant elle n'est plus qu'Angelina Beloff, ou La Bielova, comme la denomment les autres.
Les lettres sont datees de 1921-1922. Entre les lignes on sent que, si en amour elle n'arrivera jamais a se remettre, son art, renouvele, lui permettra de respire, de continuer a vivre. de s'accepter comme La Bielova. Dans une sorte de courte postface, Poniatowska nous dit qu'en 1935 elle reussit a rejoindre le Mexique, sans essayer d'importuner Rivera. Se rencontrant dans un concert, il passera a cote d'elle, sans meme la reconnaitre.

Elena Poniatowska, La Poniatowska, La Belle Poniatowska, La Princesse Poniatowska, a reussi un livre emouvant. Un roman, un livre de fiction, qui restitue une vraie histoire et qui m'a semble plus veridique que tout ce qui aurait pu etre dans la vraie vie. Elle a ecrit de nombreux livres sur des femmes, et elle arrive a exprimer toute une palette de sentiments, d'emotions, que peut-etre seule une femme aurait pu traduire en mots. Elle le fait magistralement.

P.S. J'ai lu les autres critiques sur Babelio. Ce livre a rappele a certains la Lettre d'une inconnue, de Zweig. Moi je le rapproche plutot de A la hauteur de Grand Central Station je me suis assise et j'ai pleure, d'Elizabeth Smart. le meme amour inconditionnel que rien ne pourra jamais remplacer.
D'autres se sont revoltes face a l'effacement, voulu, de la protagoniste derriere l'homme qu'elle a admire et aime, au nom du feminisme. Et moi je me dis que l'amour se developpe dans une autre dimension que la politique ou le social. Qu'en amour il n'y a peut-etre de place ni pour du machisme ni pour du feminisme. Ces notions rendent les armes devant l'amour. Et de toutes facons, je crois que l'ecriture de Poniatowska est en soi feministe. Et c'est tres bien comme cela.
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