Si vous avez déjà admiré la délicatesse et la finesse des mosaïques du musée du Bardo, étudié à la loupe une eau-forte de Dürer, contemplé un ukiyo-e d'Utamaro, et mille autres beautés artistiques, vous aurez une idée de ce que l'auteur a ciselé là.
C'est court, incisif, prenant, d'une précision où chaque mot, chaque détail technique est soigneusement pesé, déposé à la brucelle dans sa phrase, serti comme de fines bélières d'argent ou de vermeil.
L'étonnement vient du fait qu'il nous est offert la plus grande exactitude dans les aspects technologies de cette mission « Mars Direct », que ce soit les équipements personnels, le vaisseau – qui, partant de l'espace, va mener ce petit groupe d'explorateurs sur cette planète qui fascine les humains depuis la nuit des temps – ou les installations sur ladite Mars. Mais aussi sur cette « Terre » potentielle, que ce soit les lieux, les conditions météorologiques, et mille autres détails.
Ensuite, vient le plaisir d'une présentation sous forme de journal de bord, ou plutôt d'extraits – de morceaux choisis – que nous livre le narrateur dont nous ne connaîtrons qu'une partie de l'enfance et de ses aspirations, d'une part nourries grâce à son père et son métier, d'autre part grâce aux innombrables revues, journaux illustrés et textes sur l'espace et la science-fiction. Journal dans lequel viennent fort naturellement les points clefs de ce voyage puis de cette exploration d'un petit bout de planète – en un lieu soigneusement sélectionné, comme vous le lirez. Mais viennent aussi ses peurs, ses doutes, ses convictions, autant que ses questions, ses envies, ses espoirs…
Enfin, c'est ce premier pas sur la « Rouge », celui qui n'amène pas la grandeur ni à l'héroïsme, mais va finir par nous interroger sur notre propre devenir. Celui de notre Terre, de notre monde fort saccagé et d'une idée que peut-être... Mars pourrait un jour…
Un texte qui s'adresse à la fois aux amoureux de la SF et d'anticipation – autant que de prospective – mais aussi aux passionnés de Mars, de voyages spatiaux et d'explorations, aussi bien qu'à ceux qui n'y ont aucun attrait particulier, mais se posent quelque question à son sujet. Et donc à qui n'est pas attiré par la SF. Un voyage où l'on pourrait se croire à découvrir le Groenland ou Terre-Neuve aux côtés de Corte-Real ou Cabot, l'Antarctique aux côtés de Dumont d'Urville, Bonne-Espérance avec Dias, …
Ajouterai-je… ? Oui, je l'ajoute : le texte se complète de photos de certains secteurs de Mars, de graphiques explicatifs, d'une liste détaillée des missions ayant eu lieu, de liens vers les sites de la NASA aussi bien que des oeuvres ayant trait à notre « rouge » cousine…
J'avais positivement adoré le premier tome de
FELINE, paru chez Rivière Blanche, parce qu'il offrait à l'imagination autant d'images que de mots. Je retrouve, ici, la même musique qui permet et d'entendre couler l'histoire et d'en voir le détail. Si j'ai quelque chose à souhaiter, ce serait d'espérer qu'un jour,
Arnauld Pontier puisse s'envoler vers Mars et la parcourir afin de nous offrir un récit encore plus vaste.