Un jour tu comprendras. Les morts n'attendent rien d'autre de nous que nous vivions.
Que le produit soit utile ou de bonne qualité n'avait rien à voir à l'affaire. Ce qui comptait, c'était ce dont le public s'imaginait avoir besoin.
Dans tous les domaines, le travail et la planification prenaient le pas sur la cueillette hasardeuse et nonchalante. La simple relation parasite qui unissait l’aborigène à la nature avait été mise en déroute et conduite de force vers les territoires, où elle resterait confinée. Le Peau-Rouge était fini.
Quel que soit le type d'agression que ces gamins s'infligent mutuellement, ils ont tout appris dans le livre de leurs parents, ces maniaques de l'élevage, toujours prêts à pousser leurs gosses, comme on pousse une machine. Ceux qui s'en tirent le mieux sont les pires. Ils n'arrêtent pas de jouer des coudes, d'écraser les autres pour être dans les premiers, depuis l'école privée jusqu'à l'année préparatoire de médecine.
Ne remettez jamais au lendemain ce que vous pouvez enterrer pour toujours dans une liste.
Les changements extérieurs sont toujours occultés par nos propres changements, tant nous préoccupent nos petits voyages intérieurs.
Son procédé de fabrication de la stéarine donnait à Ennis plusieurs longueurs d'avance sur ses concurrents bostoniens. Il montra aux Clare le récipient fermé et bouillonnant dans lequel il séparait le suif en présence d'un faible pourcentage de chaux. Aux dires d'Ennis, la chaux enclenchait le processus que la chaleur et la vapeur se chargeaient de mener à son terme.
Dans ce chaudron en ébullition, Ennis déversait juste assez d'acide sulfurique pour solubiliser les sels de chaux et les précipiter comme sulfate. A la surface du bain de glycérine qui en résultait venaient alors flotter les acides gras tant convoités. Ennis en prélevait la quantité souhaitée avant de la clarifier à plusieurs reprises. Il versait ensuite le produit dans des bacs de compression et attendait que les acides gras cristallisent en un joli magma.
La chute de l'un est le corollaire immédiat de l'ascension de l'autre. Comment une civilisation peut-elle raffoler à ce point d'un plaisir qui passe par le malheur d'autrui ?
Elle a vécu toute sa vie d’adulte avec le besoin de réduire le nombre de mauvaises herbes de l’univers. Non pas que la lutte contre les plantes indésirables puisse jamais être gagnée, ni même que quelqu’un ait vraiment envie de la remporter. Mais simplement que sur son petit bout de terre à elle, elle éprouve le désir de contribuer à embellir la nature.
(10/18, p. 243)
Une semaine après l'enterrement, Tim s'était rendu avec son père et sa sœur dans la maison de sa mère. Il fallait faire place nette. Le patron de l'agence Millennium offrait de s'occuper de la vente de la maison en réduisant sensiblement la commission et se montrait optimiste quant aux acheteurs potentiels. C'était Ellen qui avait trouvé le premier mot. Elle s’apprêtait à débarrasser le coffre en cèdre au premier étage quand elle avait vu, au dessus de la pile des pulls d'hiver, un Post-it jaune : « A laver à l'eau froide, programme doux. Faire sécher à plat sur une serviette. »
Ils avaient d'abord cru au hasard. Jusqu'à ce que Tim découvre bientôt un mot, sur une mangeoire dans la cave. « Si vous avez l'intention de lui faire passer l'hiver dehors, veillez à ce qu'elle soit toujours pleine. » Un moment plus tard, était venu le tour de Don, avec un Post-it vert sur un sac congélation dans le réfrigérateur : « Fév. Ratatouille préférée d'Ellen. A faire décongeler la veille. Four à 350°, env. 20 minutes. Très bonne fournée. »
Il y avait peut-être une centaine de mots du même genre dispersés dans toute la maison. Des conseils sur tout ce qu'aucun d'entre eux n'avait jamais su faire. Finalement, ils avaient vendu l'autre maison, celle de son père, pour venir habiter celle où tout était expliqué.