Un ver dans le fruit

Avant le succès des "petits ruisseaux", Pascal Rabaté avait déjà un bon nombre de publications qui valaient le détour. Celle-ci en fait partie. Datant de 1997, on ressent déjà la maîtrise technique et graphique de celui qui s'essaiera au cinéma. Son trait noir et blanc est homogène de bout en bout, expressif et voit poindre la sensibilité des "petits ruisseaux".
Nous sommes là aussi au coeur du monde rural, mais dans les vignobles de la Loire, au début des années 60. L'histoire malheureuse d'une famille terrorisée par un père alcoolique et violent est tout aussi importante que son cadre historique et géographique. Les pratiques religieuses sont très fortes et d'ailleurs le jeune curé est le personnage central de l'histoire. Pour autant il ne s'agit pas d'une critique de cet aspect du monde rural, mais plutôt de la persistance d'une vie alourdie par les on-dit, les réseaux informels et immuables, la méfiance réciproque... La "modernité" pointe son nez (lecteur audio, automobile), sans opposition du village, mais comme un cheveu sur la soupe. La description des personnes n'est pas du tout caricaturale.
Mon seul petit reproche concerne la fin de l'histoire, un peu brusque.
Bref, une lecture bien agréable, que je recommande à ceux qui apprécient Étienne Davodeau, dans le même genre (Les mauvaises gens, Rural !), ou encore Manu Larcenet, Chabouté...

Une première partie particulièrement réussie avec une narration fluide mais un essoufflement par la suite. La sensation que la deuxième moitié est beaucoup moins exaltante et quelques impressions de "longueurs" et "maladresses" dans le récit. Dommage !
A souligner un découpage parfaitement maitrisé

1962. Pierre Ferra a deux raisons d'être heureux de quitter Tour. La première est que ce départ est l'occasion de mettre enfin de la distance entre lui et sa vieille mère aimante mais tellement envahissante. La seconde, c'est qu'il va prendre ses fonctions de prêtre pour la première fois à la paroisse de Restigné, un bled perdu au milieu des domaines viticoles. Malgré quelques appréhensions liées à son inexpérience, il est assez satisfait de cette affectation dans cette petite bourgade conviviale et calme… en apparence ! A y regarder de plus près, les personnalités y sont farouches et les haines solidement ancrées de générations en générations. D'autant que le récent décès de Deguelo, riche propriétaire viticole, cache des rancoeurs et des tabous qu'il n'est pas bon de percer à jour. On aurait pu rêver un meilleur accueil…
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