POÈMES DIVERS
L'axe du ciel s'est sauvé
Noir
Plus de rues de boulevards
Cherchons
« Monsieur, pardon » le monsieur c'est une dame
Cherchons
Ombre
Dénombre
les millions de petits regards aux noms
différents
mais ne nous éclairent pas
Les paroles se cognent
p.213
AMELIE
Vagues charmantes ô peut-être votre essaim
Mouille le ramage des vieux oiseaux moqueurs
Ils se moquent de nous qui perdîmes un cœur
Cœur d’or que l’océan veut garder en son sein
Faire entendre raison à des âmes pareilles
En vain vous gazouillez bijoux à ses oreilles
Cher René nous savons que c’est pure folie
Ce voyage au long cours à cause d’Amélie
Moissonneurs de nos mains fanées par les hivers
Les mousses se noyaient dans vos regards déserts
Auprès des matelots ce silence nous nuit
Vous devez avoir tort on ne meurt pas d’ennui
Orages sur le pont si le champagne mousse
Versons une liqueur de fantaisie au mousse
Pour nous remercier de ces verres de menthe
Il nous épellera le nom de son amante.
LES JOUES EN FEU
L’ANGE
Au front de bon élève, l’ange
Lauré de fleurs surnaturelles.
Pour ne pas manquer ses calculs,
Appliqué, il tire la langue,
Tentant de suivre à cloche-pied,
Au verger des quatre saisons,
Le pointillé de leurs frontières.
La neige, est-ce bon à manger ?
L’ange pillard en a tant mis
Dans sa poche, à jamais il reste
Parmi nous les forçats terrestres
Que cette boule rive au sol,
Faite en neige qu’on croit légère.
Sans cesse empêché dans son vol,
Comme nous dans notre délire,
Cet ange enchaîné bat des ailes,
De ses amis implorant l’aide ;
Aussitôt qu’il s’élève un peu,
Retombe dans les marronniers,
Où la gomme de leurs bourgeons
S’accrochant à ses cheveux d’ange
L’empêche à jamais de nier.
Croyez-vous que ce soit pour rien,
Qu’au poirier le pépiniériste
Laisse blettir ses belles poires ?
C’est qu’on reconnaît le voleur,
À la molle empreinte du doigt.
Mais Dieu examine les mains
Des anges voleurs de framboises,
Des assassins, chaque dimanche,
Et dans les mains les plus sanglantes,
Met des livres dorés sur tranches.
Dites ce que sont vos prisons,
Demande l’ange par trop niais,
Aux deux gendarmes l’emmenant
Avec pièce à conviction,
Dans le char des quatre saisons.
p.108-109
LES JOUES EN FEU
ÉLÉGIE
Araignée. À moins que l’espoir
Du matin dure jusqu’au soir,
La voilette en fils de la vierge
Dérobera notre adultère.
Ariane, faudrait-il taire
Ta chance d’être parvenue
À démêler tous ces mystères
Où s’embrouillait même Vénus
Y perdant pied, perdant haleine,
Comme nous dans ses tendres pièges.
Êtes-vous pelote de laine,
Mon cœur, par la chatte agacé ?
Vierge, voici le fil cassé.
C’est bien de ta faute, Vénus,
Puisque nos cœurs sont la pâture
De tes tigres en miniature.
Et la Parque pendant ce temps
Tisse des bonnets de coton,
Pour que les anges en pantoufles,
Visitant les vivants qui souffrent
Les coiffent telle une bougie
De l’éteignoir. Fais-tu défaut,
Coiffure de mon élégie,
Sur les âmes eux-mêmes soufflent ;
Mais les anges sont des ténors
Se ménageant pour chanter haut
Notre louange, dès la mort.
p.112-113
LES JOUES EN FEU
BOUQUET DE FLAMMES...
Bouquet de flammes (que délie
Des faveurs l’innocent larcin)
Où se noyer en compagnie
Des colombes de la Saint-Jean.
De l’eau qui ne peut en son lit
Obtenir la tranquillité,
Et des feux oisifs qui s’ennuient
Loin des lieux par Vénus hantés,
Roucoulent les vagues, singeant
Dans leur adorable colère
Un sein qui se gonfle de lait.
Ou de désir ? Plutôt cela.
p.89
LES JOUES EN FEU
À UNE PROMENEUSE NUE
Prends exemple sur la colline
Qui doit accoucher du raisin.
Elle, des feuilles de ses vignes,
Pourrait aussi se contenter.
Pourtant, des châles en gazon,
De la fourrure des buissons,
Des bonnets, des manchons de thym
Où cachent leurs jeux les lapins,
Elle costume sa beauté.
– Et toi, coquette extravagante,
Qui de ta seule peau te gantes,
Avril, tu te crois en été !
p.106
Au regard frivoles les nues
Se refusent selon la nuit
Vers l'aurore sans plus de bruit
Dormez chère étoile ingénue
Sous les arbres de l'avenue
Les amours ne sont plus gratuits
Au regard frivoles les nues
Se refusent selon la nuit
Deux étoiles à demi nues
Semblables soeurs nées à minuit
Chacune son tour nous conduit
À des adresses inconnues
De vos regards frivoles nues
Au-dessous de zéro
Les visages sont muets
Tant mieux tu ne saurais plus dire Au revoir
La Belle saison est ailleurs On s'y fait
Et depuis que nous avons les jeux de hasard
Il a fallu mettre une rallonge à la table
En dépit du bon sens,
Ce jour fut le plus court de l'année
Divers prénoms
Un autre bien plus joli
En vain j'effeuille l'éphéméride
Encore une année trop courte
Pour toutes les fêtes à souhaiter
Pour tout doucement se griser
Nous ne connaissons rien de tel
Que sur nos lèvres le baiser
De l'aurore, rose cocktail.