La vérité est que l’on perd à tous les coups. Se plier au jeu de l’image et de l’exposition médiatique, c’est se consumer dans la lumière, s’égarer, ne plus reconnaître son visage dans le miroir. Refuser les règles, c’est se condamner à la quête solitaire, à l’errance, à l’épuisement ; à force de s’en vouloir d’être passé à côté du succès, on finit par s’assécher, se ratatiner, vieillir avant l’heure. (p. 169)
Le paradoxe de l’interprétation est que la façon la plus directe de communiquer avec le public est d’oublier son existence. (p. 177)
A quoi tient la trajectoire d'une vie ? A son père. A sa mère. A son frère ou à sa soeur. A ses échecs, à ses succès. A la musique qu'on entend et aux livres qu'on lit.
Nous commençons par un silence.
Mais les minutes de silence, vous le savez bien, ne durent jamais soixante secondes pleines, y compris dans le recueillement d'une basilique Genèvoise, un jour de funérailles. L'impatience a vite fait de surgir, quoique l'assemblée se compose pour l'essentiel de musiciens de OSR , par définition respectueux du temps imposé par leur chef. Cette fois, Claessens n'est pas au pupitre. Il est couché dans le cercueil, couvé des yeux par un curé pénétré de sa mission célébrer l'artiste .....
L’Opus 77. C’était le visage du Christ sur sa croix. Souffrance extrême. Extase totale. L’union intime avec la musique, joyeuse et douloureuse. Tu as creusé si profond en toi, grâce à cette partition, que tu as fini par la trouver, cette porte de sortie. Le centre de la terre, voilà par où tu es passé, le noyau de toutes choses, puis tu ressorti par l’autre côté, aux antipodes.
Le vrai virtuose mondial, c’est celui qui a peur à s’en pisser dessus et qui s’avance seul devant trois mille spectateurs pour jouer Ravel, Chopin, Rachmaninov, sans ciller.
La vraie virtuose de classe mondiale, c'est celle qui cuve une cuite à coucher un bataillon ou un orchestre philharmonique sans faire une seule fausse note.
Tous nous fuyons quelque chose. Nous cherchons la porte de sortie. Nous pensons que c'est cela, l'existence.
Bien sûr, j'exagère. C'est en cela que consiste mon métier. Tout exagérer, rendre visible l'invisible...
À quoi tient la trajectoire d'une vie ? À son père. À sa mère. À son frère ou à sa soeur. À ses échecs, à ses succès. À la musique qu'on entend et aux livres qu'on lit.