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Critique de florigny


Mary Jago est une jeune femme trentenaire qui travaille au Musée Irene Adler, dans Charles Lane, qui bien loin d'être une création littéraire, est visité et apprécié par tous les amateurs de Sherlock Holmes. Il s'agit d'un clin d'oeil adressé par Ruth Rendell aux amateurs de romans policiers, puisque Irene Adler est un personnage imaginaire créé par Conan Doyle dans Un scandale en Bohème. Son travail n'est pas ce qui fait de Mary une personne d'exception, non. Ce qui la distingue, c'est qu'elle a donné sa moëlle osseuse pour sauver un jeune homme atteint d'une leucémie foudroyante : “C'était fini, elle l'avait fait, elle avait été capable de mettre sa santé au service d'un autre être humain, gravement malade, et de réparer ainsi une injustice de la nature”. Comme la réglementation l'autorise en Grande-Bretagne, le donneur et le receveur peuvent, s'ils le souhaitent tous les deux, sortir de l'anonymat et entrer en contact. Mary et Leo se rencontrent et s'apprécient, tandis que parallèlement, Mary a fort à faire pour mettre fin à sa relation nocive avec Alistair qui ne s'avoue pas facilement vaincu. Mary quitte Alistair, et sans point de chute, accepte d'être “la personne de confiance” de Sir et Lady Blackburn-Norris, celle qui gardera lors de leur voyage de plusieurs mois en Amérique du Sud, leur maison et leur petit chien Gushi.


Ces quelques lignes ne sont qu'un résumé a minima de Regent's Park. Si l'histoire de Mary et Leo sert de trame, Ruth Rendell donne vie à un grand nombre de personnages, qui vont se croiser et se cotoyer au cours de l'histoire : Bean, retraité dont la pension ne lui permet pas de vivre décemment, promène bi-quotidiennement les chiens de riches propriétaires pour améliorer son ordinaire. Hob, jeune homme drogué dont l'unique but est de trouver de l'argent pour se procurer n'importe quelle substance lui permettant de calmer les souris et les rats qui cavalent dans son cerveau. Carl, le frère de Leo, veille sur son cadet, malade comme une mère tout en brassant de mystérieuses affaires. Alistair, harceleur de Mary. Bien d'autres encore...


Mais ce sont surtout les laissés-pour-compte, les sans-domicile, les clochards, ceux que personne ne remarque jamais, qui sont les héros de Regent's Park : Pharaon, appelé également l'homme aux clefs, sans cesse à la recherche de nouvelles trouvailles serrurières qu'il accroche sur ses vêtements, faisant de lui une sorte de chevalier recouvert d'une armure métalllique. Effie, qui parle peu et boit beaucoup. Roman, l'homme à l'accent d'Oxford, qui lit Dostoïevski. le lecteur découvre peu à peu son histoire bouleversante au fil du récit. Tant d'autres.


Tous les personnages du roman vivent dans le même quartier, certains dans la rue, d'autres dans de grandes maisons victoriennes. Ils se croisent, se connaissent de vue, s'ignorent, vont se suspecter lorsque 3 cadavres sont retrouvés empalés sur les hautes grilles d'un parc. Très lentement, des liens se tissent entre eux, jusqu'au dénouement, époustouflant, conforme au talent inouï de Ruth Rendell, qui met à mal une fois de plus les idées reçues et déglingue les apparences. Regent's Park est aussi un roman sur Londres, ses parcs, ses musées, ses quartiers pauvres ou huppés, que Ruth Rendell décrit photographiquement, dans leurs moindres détails, faune, flore, architecture, aisance matérielle ou détresse sociale. Un très grand et beau roman qui accorde un coup de projecteur à tous ceux qui ont été oubliés au bord du chemin et rappelle subrepticement que le don de moëlle osseuse, de plaquettes ou de globules, sauve quotidiennement des malades.
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