Citations sur Les Chroniques des Vampires, tome 10 : Cantique sangl.. (33)
Rowan Mayfair, en revanche, ne pouvait échapper à son statut de génie scientifique. Elle ne pouvait ignorer l'impossibilité physique de la guérison de Mona. De plus, son esprit regorgeait de souvenirs si douloureux qu'ils ne s'appuyaient même pas sur des gens ou des images : il y régnait juste un sombre magma de sentiments en friche et de terrible culpabilité.
Chaque fois que nous te posons la question, tu te mets à pleurer. A vrai dire, ces dernières trente-six heures, tu as versé plus de larmes que n'importe quel autre novice, ce qui relève, à mon avis, de la nuisance à la fois ontologique, existentielle, épistémologique et herméneutique !
De temps à autre, je m'arrêtais.
Je regardais le ciel parsemé d'étoiles, si étincelantes en pleine campagne. Et je les détestais, comme d'habitude. Quel réconfort y avait-il à être perdu dans un univers infini, pauvre imbécile catapulté sur un minuscule grain de poussière en orbite, alors que ses ancêtres, eux, décryptaient les messages de ces points innombrables, d'un blanc feu glacé, dont la perpétuelle indifférence nous narguait sans cesse ?
Qu'elles brillent donc sur les vastes pâturages qui s'étendaient à ma droite, au-dessus des bosquets de chênes, par-delà les lointaines maisons éclairées d'une douce lumière.
Elle rejeta ses cheveux en arrière et leva les yeux au plafond, confrontée à une réalité qu'elle avait toujours récusée.
Jamais je ne l'avais vue souffrir autant. Ses crises de larmes avaient été empreintes d'une générosité et d'un altruisme peut-être contestables. Quant à sa fureur, elle s'en était vraiment délectée mais, à présent, elle semblait plongée dans les affres du désespoir.
Je concentrai la moindre parcelle de ma conscience dans ce rayon de chaleur intense. Le feu. L'appareil s'embrasa. Et sauta en plein vol.
L'hélicoptère était très loin de nous, mais tout le monde ressentit le souffle de l'explosion. Soudain, il fit clair comme en plein jour.
[...]
Pris de vertige, en sueur, je restait cramponné un moment au balcon, puis reculai de quelques pas, fasciné par l'énorme engin qui s'écrasa sur le flanc et fut lentement incinéré. J'avais encore la nausée. Et dire que j'en étais capable, que je l'avais fait ! Un sentiment de vide, d'absurdité s'empara de moi. Je ne croyais en rien. Je n'étais bon à rien. J'aurais dû mourir. Tout semblait clair dans mon esprit. Je ne pouvais ni bouger, ni prononcer un seul mot.
J'étreignis les doigts de Mona, qui se pencha vers moi et me planta un baiser sur la bouche. Elle brûlait d'un feu intérieur, comme si son corps était en train de consumer ses rêves passés. D'autant qu'une tristesse de cendre lui brouillait la vue.
J'avais touché le fond. Les pulsations de la nuit me rappelaient le néant. Le champ d'étoiles éparpillées venait me signifier toute l'horreur de notre univers - fragments d'un corps anonymes qui s'éloignait, à vitesse grand V, de sa source absurde et perplexe.
Saint Juan Diego, débarrasse-moi de tout cela. Accomplis un autre miracle !
Méfie-toi d'une existence banale. Aspire à un destin plus grand et plus beau. Je crois que c'est le message du domaine Blackwood.
Au fond de ma cellule, je me répétais que la beauté du monde se résumais aux vagues éphémères de la mer des Caraïbes. Il fallait que j'y croie. Seulement, l'univers est une telle débauche de merveilles. Je suis très heureux. Et mon âme n'est plus aux aguets pour Miravelle, ma douce et inconséquente Miravelle ! Je suis en sécurité. Elle aussi. Et je suis libre.