Citations sur Histoires pragoises (9)
Cette solitude dans laquelle je me suis affermi depuis vingt ans ne saurait devenir une exception, un "congé" que je devrais quémander, sur présentation de justifications diverses, auprès d'un bonheur surveillant. Je dois vivre en elle sans limitations. Elle doit rester la conscience fondamentale où je puisse toujours revenir, non pas dans l'intention de lui extorquer sur l'instant, tout de suite, tel ou tel gain, non pas dans l'espoir qu'elle me soit fructueuse ; mais involontairement, discrètement, innocemment : comme au lieu qui est le mien.
Le peintre doit peindre le peuple et lui dire : Tu es beau.
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Le poète, poursuivit-il, doit célébrer le peuple et lui dire : Tu es beau.
Il lui semblait que le poète parlait avec avec injustice et beaucoup d'objections affluaient à son esprit. Il était tenté de se lever et, debout et joyeux, de prendre la défense du printemps qui était malgré tout plein de victoire et de soleil.
Ses pensées n’étaient plus en lui, elles couraient devant lui, et il devait les poursuivre, pour les reprendre. Pouvait-on ainsi les laisser courir? Hors d’haleine, il les rejoignait chaque fois au même endroit.
Notre peuple est encore dans l’enfance. Souvent, je me dis que notre haine pour les Allemands n’est pas du tout politique, mais plutôt ,comme, dirais-je…humaine. Notre ressentiment ne provient pas de ce que nous sommes contraints de partager notre patrie avec les Allemands, mais de ce que nous grandissons sous la coupe d’un peuple adulte, et c’est cela qui nous rend tristes. C’est l’histoire de l’enfant qui grandit auprès de parents trop âgés. Il apprend à sourire avant d’avoir pu rire.
(A propos des artistes)
- Ces gens-là devraient plutôt être fiers de notre peuple. Mais croyez m’en ils ne savent rien les uns des autres, ni le peuple d’eux, ni eux du peuple. Je vous le demande, que sont-ils donc ? Sont-ce des Tchèques ? Regardez n’importe lequel d’entre eux. Karas écrit dans des journaux allemands sur notre art. Et notre art, qu’est-ce ? Des chansons peut-être, comme les pourrait chanter ce peuple tout jeune, sain et à peine éveillé ? Des récits sur sa force son courage et sa liberté ? Des images de son pays ? Jamais de la vie.
De cela ces messieurs ne savent absolument rien.
Le roi Bohusch
…
― Oui bâilla-t-il (Norinski) avec nonchalance, puis d'une
voix condescendante : Et que fait votre pièce,
Machal ?
Un instant le poète, en silence, regarda au fond
de son verre d'absinthe, puis il répondit d'une voix
douce et dolente :
― C'est le printemps.
Tous attendaient une explication plus complète,
mais le poète était déjà reparti pour le pâle jardin
de ses rêves.
Il regarda grandir son verre d'absinthe, jusqu'à
ce que lui-même se sentît, au milieu de cette
lumière opaline, tout léger et dissous dans cette
atmosphère étrange.
p.14
La place du Palais-Royal à Prague a, malgré l'avenue misérable qui la traverse, assez ière allure. C'est qu'elle est entourée de palais. La large façade du vieux palais royal, avec sa grande cour d'honneur blanche, derrière les grilles baroques de laquelle le factionnaire va et vient, infatigable comme un pendule, est la plus puissante.
Notre peuple est encore dans l’enfance. Souvent, je me dis que notre haine pour les Allemands n’est pas du tout politique, mais plutôt, comme, dirais-je… humaine . Notre ressentiment ne provient pas de ce que nous sommes contraints de partager notre patrie avec les Allemands, mais de ce que nous grandissons sous la coupe d’un peuple adulte, et c’est cela qui nous rend tristes. C’est l’histoire de l’enfant qui grandit auprès de parents trop âgés . Il apprend à sourire avant d’avoir pu rire…