Ce livre raconte déjà son histoire par la couverture, comme une nuit sombre où perlent de leurs éclats des fleurs australiennes, aux couleurs vives, à la beauté magnétiques, aux formes variables et multiples, le fond nocturne, laisse un tableau dont les fleurs sont le premier rôle de cette histoire au titre révélateur
Les fleurs sauvages. Mais L'auteur australienne
Holly Ringland avec ce premier roman dessine son oeuvre avec une minutie d'orfèvre, chaque chapitre constelle une étoile pour la mettre en lumière, une fleur, une plante, avec son nom, sa signification , sa racine latine, comme un herbier, cette interstice caresse tout le chapitre de cette fleur, comme si ces fleurs avait leur propre langage, une continuité de leur vie s'enroule dans celles des personnages, elles ne sont ni un décor, ni un paysage, mais des personnages d'une force immuable de ces vies qui fourmillent cette histoire. Comme le pois du désert de Sturt, de couleur rouge sang, symbole de notre Héroïne, Alice, de sa signification « à coeur vaillant rien d'impossible », sera ce fil d'Ariane invisible qui accompagnera ce personnage tout le long de ce roman,
Les fleurs sauvages.
Les fleurs sauvages chantent avec beaucoup de douceur une saga océanique très féminine. La plupart des personnes sont des femmes, les hommes ont des rôles furtifs, ancrés dans un souvenir amoureux et malsain, une dualité habite ces hommes, au destin mortel et de fuite. Même Oggi, l'amoureux de jeunesse disparaitra, comme une fumée qui se dissout avec le temps, Dylan le coup de foutre d'Alice dans sa nouvelle vie sera le double de son père, son miroir de violence, Moss le vétérinaire sera qu'éphémère. Ces femmes creusent le sillon de leur vie dans le secret du silence et de la parole des fleurs, comme une prison fleurit, elles sont esclaves des traditions familiales, ce mutisme est le refrain de ce roman. Les fleurs s'unissent aux livres pour un mariage d'amour si naturel, les contes enchantent les rêves des enfants, les adultes chantent le langage des fleurs, les mots sont aux creux de leurs mains, dès leur enfance, ceux des livres et des fleurs, mais leur voix est sourde dans l'esprit de ces femmes, le silence est un refuge dangereux, les secrets des tombes vivantes, les choix sont égoïstes.
Holly Ringland ouvre son roman par un vers d'Alfred, Lord Tennyson, petit écho fleurit de l'intrigue de ce roman, de cette petite phrase, je suis ici, ponctué plusieurs fois dans le roman, des fleurs protectrices d'Alice de leurs chants lointains des voix ancestrales. Alice petite fille solitaire de ces contes peuplant son imagination, recluse dans sa ferme, entre sa maman Agnès, enceinte de son futur frère, meurtrie par les coups de folie de son mari Clem, le papa toujours funambulisme de ces humeurs noires, s'isolant dans son atelier, lieu de ses souvenirs et de sa rancoeur, le monde d'Alice est différent de ses contes, seul l'amour de sa maman lui apporte le réconfort, étant pour Agnès lors de sa naissance son conte de fées. La découverte de la bibliothèque bouleversa sa vie, ainsi que la rencontre avec Sally y travaillant, s'attachant de cette petite fille, pour lui offrir sa première carte de bibliothèque, les livres et son chien Toby enivrent la vie d'Alice, pour s'enfuir dans le feu d'une vie futur. Cette trame tragique de la perte de ces parents, de son chien, de son petite frère encore le ventre de sa maman, de sa voix enfuit au fin fond de son âme en turbulence, recueilli par June sa grand-mère paternel, qu'elle ne connaissait pas va conduire cette fille à découvrir les secrets de famille à travers les fleurs que cultivent cette aïeule à Thornfield, le passé accueille Alice avec beaucoup de douceur et tendresse, de l'amour au spectre familial silencieux où la rivière cache ses secrets. Chaque personnage du roman cache une ombre, un secret lourd que va dissoudre les méandres du temps.
Sans trop découvrir le roman,
Holly Ringland de ce refrain fleurit, sème en nous un jardin, un éden de fleurs sauvages, de senteur incroyables, comme
le parfum de
Patrick Süskind, les odeurs embrasent notre chair, les couleurs papillonnent notre être d'une danse multicolore, la végétation s'ouvre à nous comme un trésor caché. Il y a aussi dans ce roman le coeur de l'Australie avec ces décors diverses, le bord de mer, le désert et sa terre rouge sang, ce territoire ancien des aborigènes, aux légendes du coeur de la terre sauvage. Les variétés végétales du territoire parsèment le livre tout le long de son histoire. Holly aime avoir la maitrise des histoires, ce lieu où travaille Alice au centre des terres est une pure invention, entremêlée des songes d'histoire vraie recueillies ci et là. Comme beaucoup contes de légendes se diffusant dans ce roman, d'horizon divers, du Mexique, de Bulgarie, des Aborigènes Arrernte, de Philippines….
Holly Ringland dans sa note de l'auteur aura cette phrase de son pays, « L'Australie à une histoire noire. Elle a toujours été et sera toujours un pays Aborigène. ». Son roman est un bel hommage à ce pays et ces légendes.
L'amour pour
Holly Ringland est à travers les âges des générations de cette famille, une malédiction. Les femmes, une forme de maladie génétique, transmise de femmes en femmes, que l'héroïne guérira peut être de la tourmente des amours féminins de cette famille. Il y a dans ce roman une explosion d'émotion,
Holly Ringland distille avec ces mots une musique où la mélancolie émotive se consument lentement, vous effleurant la peau comme le vent chaud balayant la terre rouge du centre de l'Australie, perle dans vos yeux une lueur incertaine et douloureuse de cette eau chavirant les coeurs de ces femmes, la rivière berceau des amours naissant, la mer soulageant les maux, les douleurs physiques, les bains et douchent apaisant l'esprit et le corps. Mais le feu aussi est présent comme la tragédie du début de l'histoire, avec ce conte du phénix renaissant de ces cendres et cet adage récurrent, le feu devient un sortilège, transformant une chose en une autre, ces histoires pour une petite fille sont une sorte de magie, ce qui transformera la vie de l'héroïne Alice, ce prénom d'une petite fille d'un conte.
Ce roman est un fleuve de larme et d'émotion, de fleurs et de livres, d'amour et de mort, de conte et de légende, d'Australie et de pluralité des cultures, avec Alice cette jeune fille cristallisant de son caractère, de sa fougue de son innocente de son amour pour les fleurs et les livres , le souvenir de sa mère se baignant dans la mer le corps parsemé d'ecchymose, grandissant avec le drame de ses parents morts, d'une grand-mère l'élevant dans une ferme de fleurs, s'évadant vivre sa propre histoire dans les profondeurs des terres australiennes hantées par des traditions ancestrales, pour enfin construire sa propre histoire en se libérant des secrets familiaux.
Un roman happant d'émotions.