Citations sur Jours de crimes (15)
L’éloquence ne consiste pas à dire ce que l’on croit mais à croire ce que l’on dit.
(Jacques Charpentier, Remarques sur la parole)
Certains le disaient mort avant son procès. Peu importe : il est des âmes si noires qu’elles ne méritent pas que la justice les laisse en paix.
Un ressenti n’est rien. C’est un terme inventé pour donner de la consistance à ce qui n’est qu’une impression – rien qui vaille aux assises. Mais en ces temps incertains où la victime est tout et où il suffit d’avoir l’impression d’en être une pour devenir quelqu’un, le ressenti devient roi, alors qu’il n’est que l’assassin de l’intelligence.
Avant l’audience, généralement, les deux sont d’humeur conquérante. Le professionnel explique au justiciable comment cela va se passer dans le cabinet du juge ou le prétoire, et qu’on va voir ce qu’on va voir. Le client en est convaincu. Une dernière fois, son conseil lui passe les consignes, rappelle ce qu’il faut absolument dire et, plus important, ce qu’il est primordial de taire. Si l’avocat ne tient pas sa robe noire roulée sous le bras – c’est ainsi qu’elle se porte aux abords immédiats des palais de justice –, ou si les deux interlocuteurs sont vêtus de manière similaire, on reconnaît tout de même sans difficulté le plaideur : c’est celui des deux qui ne paie pas les consommations
On parle souvent de justice d’abattage pour évoquer les comparutions immédiates. On a souvent raison. Ce soir-là, exceptionnellement, tout le monde est reparti d’Évry le cœur léger. La justice a montré le meilleur d’elle-même, en mettant sept jeunes hommes en demeure de se montrer à la hauteur de leur procureur et de leurs juges.
Une épouse que l’on viole, frappe, insulte et humilie. Que l’on menace lorsqu’elle murmure des confidences à sa sœur au téléphone ou cherche à voir son père. Que l’on épie quand elle se tente de se confier à l’assistante sociale. Que l’on écrase et engloutit. Au XXIe siècle, dans une ville française, une ombre dans une caverne.
N’avons-nous jamais entendu une petite voix murmurer : « Celui-là, je vais le tuer » ? C’est vrai qu’il a souffert avant de devenir un meurtrier, et qu’à bien des égards il n’est pas foncièrement antipathique. Hier, ses larmes nous ont touchés. Mais aujourd’hui, ses remords nous semblent forcés, des témoins nous l’ont dépeint sous un jour gris. Hier, on aurait bien bu un café avec lui ; aujourd’hui, il nous rebute.
Il ne connaissait l’époux que par le portrait peu flatteur qu’elle lui en faisait et puis, surtout, il l’aimait bien, cette femme. Ils s’étaient croisés dans leur jeunesse et ils s’étaient retrouvés des années plus tard. Chacun avait fait sa vie, avec son lot de bonheurs et de heurts conjugaux. Il était disponible pour une aventure ; elle aussi, ça tombait bien.
Ils ont vécu le meilleur de l’adultère, la légèreté, le désir, les retrouvailles à l’hôtel, les voyages. Il y avait bien eu entre eux quelques moments de tension, comme ce jour où elle avait débarqué au domicile de l’amant sans le prévenir. Il n’avait pas apprécié la surprise et le lui avait dit. Il lui arrivait aussi de la trouver envahissante, avec ses textos enamourés. La lassitude commençait à le gagner, il songeait à prendre ses distances. Mais il ne savait pas trop par où commencer.
« Je ne parle pas seulement au nom de Marie, je parle au nom de toutes les futures Marie dans le monde entier. Je pense à toutes les femmes qui, à chaque instant, meurent sous les coups d’un homme. Alors, si cet homme est pardonné, ce serait comme si chaque homme aimant une femme portait en lui une promesse de mort pour elle ».
Il suffisait de divorcer, le divorce, c’est simple.” Non, le divorce ce n’est pas simple. Quand il faut dire à des enfants que l’on aime : “Je m’en vais.” Quand il faut dire à un père : “Votre fille est merveilleuse, le lit que je partage avec elle est merveilleux, mais je m’en vais.” Vous croyez que c’est simple ? Que c’est facile ? Quand il va falloir affronter le regard des amis qui estiment tous que Bernadette Bissonnet est une femme exceptionnelle et qui vont dire : “Mais Jean-Michel, tu es fou ? On ne quitte pas Bernadette ! Et as-tu pensé à tes enfants ?