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Citations sur Hope (29)

Jeff est mort deux mois avant mon départ pour les États-Unis. Le crabe. Jeff était mon ami. Il est mon ange aujourd'hui. Pour lui, j'ai traversé l'Atlantique. Il rêvait d'Amérique. J'y suis.

Aux Primevères, j'ai rencontré Simon. Je suis tombée amoureuse. Le premier amour, celui dont on reparle quand on est vieux. Celui qui comptera toujours plus. Il était aussi déréglé que moi. Deux moins, ça donne un plus. C'est mathématique, même si je n'aime pas les maths. Même si entre nous c'était aussi illogique que logique.

J'ai du sang polonais du côté de ma mère. Elle aime bien dire qu'elle est une polack dans l'âme. Ce qui me fait marrer puisqu'elle n'a jamais foutu un pied en Pologne.

Je redoute chaque soir d'éteindre la lumière. C'est bien connu, la nuit on cogite. C'est pas les trucs heureux qui nous viennent. Le visage de Simon m'apparaît. Puis c'est au tour de Jeff, je sens l'odeur de sa cigarette. Je colle ma tête sous mon oreiller. L'horloge tourne. Tic-tac tic-tac, Bianca. Je hais ce son, celui du temps qui passe.

Je lui demande s'il regrette. Il s'excuse pour cette nuit et la marque sur ma nuque. Cela ne se reproduira plus. Il me prie d'oublier. Je chute de cent étages. Il y a quelques heures, sur ce même pont, je touchais le ciel. Rien ne pouvait m'arriver. Cette nuit, c'était un kilo de cocaïne injecté dans le sang. Je redescends direct dans le caniveau.

J'ai failli m'évanouir quand je me suis vue. Je ressemble à une jeune prostituée des pays de l'Est, c'est l'effet recherché. J'aime bien. C'est comme les déguisements quand on est gamin. Je suis passée de la princesse à la pute en moins de dix ans. Je me plais à jouer ce rôle, ce n'est pas moi et tant mieux.

Ma mère marche vite. J'étais donc derrière et je l'observais avancer dans l'urgence. Nous étions toujours pressées avec elle. C'est la vie qui l'oppressait. La vitesse était sa façon de respirer. Je l'ai compris plus tard.

J'ai tout de suite aimé Paris. Tout ce monde, ce bruit et ces odeurs, j'en rêvais. Je l'imaginais sans ennui. Je la fantasmais. Il y avait tellement de vies qu'il suffisait d'y être pour combler le vide.

Enfant, on marque les lieux par une couleur, une odeur ou un ressenti. Les images disparaissent avec le temps mais pas la sensation.

Pour la première fois, j'entrevois ce qui plaît à mon père chez elle. Katy est une gentille. Elle apaise par son calme et sa bienveillance. Elle ne parle jamais trop fort. Elle ne juge pas. Elle n'angoisse pas. Elle aide à dormir. Elle aide tout court. Elle est différente de ma mère. Ma mère n'est jamais tranquille. Elle rendait mon père fou. Au début, fou d'amour. À la fin, fou tout court. Ma mère l'a écorché. Katy l'a pansé.

Je rêvais des États-Unis, mais l'histoire est la même partout. On passe plus de temps à dissimuler qu'à vivre. On cherche la normalité. Elle n'existe pas. Ni ici, ni ailleurs.

Je me souviens du film Sixième Sens, quand à la fin le petit garçon découvre que son ami Bruce Willis est mort et qu'il est le seul à le voir. C'est un peu ce que je vis. Sauf que nous ne sommes pas dans un film.

La mort exacerbe l'amour. L'amour rend la mort vaine. Il est plus facile d'aimer un mort qu'un vivant.

J'avais tort de vivre avec autant de douleur en moi. Si je meurs, l'amour se figera. Si je vis, il va grandir. J'ai de la marge. De la marge. Je suis sûre que j'ai de la marge.
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On passe plus de tps à dissimuler qu a vivre
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Si mon visage est harmonieux,mon cerveau est en guerre civile. Je suis belle pour compenser le bordel de l interieur.
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Sur mon dossier à l'hopital. Le mot anorexie figurait à plusieurs reprises. J arrive a le dire a voix haute aujourd'hui....

Anorexie, c est plus précis que dépression, et ça sonne plus scientifique que malheur.
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Je crois que c est ca mon truc : regarder, observer, absorber. Une éponge de vies.
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La tristesse est une prison
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Si j'avais eu du courage, je crois que j'aurais été capable de sauter par la fenêtre. Mais je n'avais pas envie que des dizaines d'inconnus m'épient la bouche ouverte pendant que j'aurais la tête fracassée dans une mare de sang, comme ils l'ont fait avec Vicky.
Dehors, j'entends la pluie tomber.
C'est simple, à présent.
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J'atterris dans un bar d'un tout autre style. La clientèle est différente : des métalleux aux cheveux longs, tatoués de la tête aux pieds pour la plupart. La musique à fond, je crois reconnaître un air de Deep Purple. Jo tient toujours ma main. J'ai le choix entre une IPA et une Brooklyn Lager, les deux seules boissons à la carte. Je le laisse choisir. Je n'aime pas la bière. Mais ce soir, c'est différent. C'est très rafraîchissant, comme Jo. J'attrape ma pinte. Jo disparaît. Je me retrouve toute seule à boire.
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J'aurais pu rentrer bouquiner mais une journée complète à brasser du vent ne m'a pas suffi. J'ai trouvé un pub juste à côté du Whole Foods Market. Il passe en boucle la compile de Noël. A force de boire du hot apple cider, avec du bourbon cette fois, je finis par chanter Jingle Bells avec d'autres habitués du whisky. C'est déprimant, Noël, pour les gens seuls. Je vois la tête de mon père dans mon verre. Un autre apple cider ? Oui merci. Ça panse, ça lance. Les maux. Ils rebondissent à l'intérieur, noyés dans le bourbon. Aux toilettes, je pleure whisky et pisse tristesse. Le tout sur We wish You a Merry Christmas.
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Après une semaine enfermée dans ma chambre, je n'ai pas eu le choix. Mon père en a fini avec la compassion. Je pourrais très bien mentir et sécher les cours. Mais je n'en ai pas l'énergie, et puis il n'y a plus de Coca dans le frigo. Il faut sortir en acheter. Mon premier choix de tenue s'est arrêté sur mon pyjama. Là encore, mon père n'est pas d'accord. J'aurais pu dire merde, mais je réserve ce mot à d'autres. Il a envoyé Katy dans ma chambre. Moment de complicité belle-mère-fille ? Pas du tout. Elle ne sait pas quoi me dire, alors elle me donne son shampoing. "Il fait de très beau cheveux, tu vas voir." C'est naze, comme cadeau de consolation. J'ai les cheveux gras, merci, je suis au courant. C'est peut-être parce que je ne vais pas très bien. Entre nous, offrir du shampoing à qui que ce soit, même à quelqu'un que l'on n'aime pas trop, c'est nul. Il sent bon, manquerait plus qu'il pue, en plus. C'est assez rare pour un shampoing. Quoique, je me rappelle que ma grand-mère, celle qui est morte, en avait un qui sentait vraiment mauvais. Les vieilles plantes, le genre de shampoing que l'on trouve en pharmacie, qui a pris l'odeur des médicaments. A chaque flacon vide, elle retournait acheter le même. Je n'ai jamais compris. Du coup, ses cheveux sentaient le vieux, comme elle. Celui de Katy est à la moelle de bambou. Je passe sous l'eau glacée afin de me réveiller. Le cauchemar continue. Katy me désespère : "L'eau froide c'est bon pour les cheveux, elle les rend brillants." Elle ferait mieux d'écrire un bouquin de recettes capillaires. Moi, la moelle de Bambou, je m'en fous. Elle fait peut-être briller les cheveux mais pas les yeux.
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