Citations sur Je suis l'hiver (37)
Il sait, il comprend de manière confuse, que parfois la meilleure façon d'apprendre quelque chose sur l'autre n'est pas de voir son regard mais de le sentir sur soi.
Gretel croyait fermement que les sourires révélaient l'âme des gens. Plus tard, elle a commencé à croire qu'ils la cachaient. Ce qui ne lui inspirait aucune méfiance. Les sourires cachaient l'âme parce que l'âme était une chose à cacher. Ça aussi, elle y croyait fermement, surtout quand elle voyait son père.
Un fantôme n'était rien de plus qu'un écho mécanique, un bout de quelque chose qu'on avait définitivement perdu. Et qu'est-ce que c'était ? Un bout, rien de plus, il n'y avait pas d'autre façon de le dire. Un fantôme était un extrême, une extrémité, un muscle qui continuait de fonctionner malgré tout. (page 106)
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Il .../... se surveillait du coin de l'œil dans les miroirs jusqu'à en être rassuré. Pampa, qui n'était ni superstitieux ni ingénu, était convaincu que s'il y avait bien une chose qu'un fantôme ne pouvait pas faire, c'était regarder du coin de l'œil. (page 106)
C’est l’effet de la neige. Les sons traversent le silence et se muent en pressentiment.
Le vent est coupant. Le ciel n’a pas de couleur, mais il y a dans les rues une lumière de cendre, comme si l’après-midi touchait à sa fin. Et il touche à sa fin, depuis un bon moment. La neige tombe, lente, mais l’après-midi est passé si vite.
Pendant quelques minutes, debout au bord de l’eau, Pampa sent sur son visage l’humidité gelée qui remonte. Il regarde maintenant le ciel sans nuage. Il rejette la tête en arrière et sent le vertige de l’immensité et du silence. Il aime cette sensation. La plaine s’étend, égale à elle-même, dans toutes les directions, et Pampa mâche cette terre dont le goût lui est resté en bouche. Un goût qui lui donne soif, mais autre chose aussi. Une texture qui est comme une fièvre. Et pour un instant, il ressent une sorte de fourmillement précis, exact. Sa mère est vivante et il lui vient l’envie de l’embrasser. Pampa se promet que la prochaine fois qu’il la verra, il le fera, et même si c’est une promesse qu’il ne pourra jamais tenir, il se le promet vraiment. Naïf.
Même s’il sait qu’elles vont venir, et même s’il les cherche, les larmes sont toujours inattendues. L’adjudant sous-officier Pampa Asiain s’en étonne comme si les larmes étaient étrangères à son corps, il frissonne et continue de chanter. Il gratte sa guitare, un peu maladroit, et continue de chanter.
(Incipit)
Dans ces années-là, Gretel croyait fermement que les sourires révélaient l'âme des gens. Plus tard, elle a commencé à croire qu'ils la cachaient. Ce qui ne lui inspirait aucune méfiance. Les sourires cachaient l'âme parce que l'âme était une chose à cacher. Ca aussi, elle y croyait fermement.
Écrire une phrase de mauvais goût au rouge à lèvres sur le miroir de l'armoire à pharmacie, par exemple. Mais elle n'avait pas de rouge à lèvres. Elle trouvait subitement très triste de ne pas avoir de rouge à lèvres. Une femme devrait toujours en avoir sur soi, au moins pour garder l'idée en tête, pour qu'il soit toujours possible d'écrire sur un miroir ses sentences et ses confessions.
Malgré la quantité d'arbres qui entourent la maison, on entend ni ne voit aucun oiseau. Pampa aimerait savoir quel effet produirait l'un de ses pas dans cette quiétude, mais il ne sait plus lire la nature qui l'entoure, la neige a changé les règles et le paysage où il se trouve lui est désormais étranger.