Citations sur Pleine terre (107)
Fou, il le deviendrait peut-être à force de s’être entendu répéter qu’il avait tout l’air de l’être. Furieux, en tout cas, il l’était, il n’y avait plus aucun doute.
Il s'était demandé comment des individus qui n'avaient plus rien en commun pouvaient, malgré leurs coeurs secs comme des puits bétonnés, laisser leurs ventres se rejoindre dans le cloaque moite des chambres conjugales. Et il n'avait jamais compris par quel miracle il était possible de raviver les sources taries au point que deux êtres se vouant une réelle détestation étaient parfois encore aptes à donner la vie, à faire naître quelque chose de leurs amours mortes et qui serait un enfant perdu pour la joie car il pensait qu'on ne nait jamais indemne des aigreurs qui rodent entre les draps blancs des couples désunis.
Tout menait à la déshumanisation de leurs pratiques et à la négation de leurs savoir-faire ancestraux
Un livre merveilleux
Tout en pudeur .
Le monde paysan , réduit à peau de chagrin...sous une plume plus politique que Marie Helene Lafon, mais avec la m^me connaissance, le meme amour.
Un fait divers à peine romancé ...pour mettre sous nos yeux la detresse du monde paysan... loin de nos vies de confort...
Celle de bon nombres de petits agriculteurs acculés par les dettes et l'absurdité de demarches qui les enchainent ...le monde normatif inadapté, la machine à la broyer
Le monde du formel , du rendement.. loin de toute poésie , amenant, inéluctable, « à la déshumanisation de leurs pratiques et à la négation de leurs savoir-faire ancestraux »
Il faudrait en finir avec cette administration qui allumait des feux chez les petits éleveurs, leur reprochait aussitôt de ne pas savoir les circonscrire alors que d'imminentes catastrophes couvaient en toute impunité chez ceux que ce système avait décidé de placer sous son aile -parce qu'ils pesaient sur les emplois, qu'ils faisaient vivre les banques, les coopératives, les fabricants de glyphosate, les poids lourds de l'agro-industrie, les géants de la grande distribution.
Et l'affront fait aux ancêtres qui avaient transmis des terres fertiles, l'or vert devenu plomb.
Il s'était affranchi des abrutissements générés par des années d'espérance plus ou moins passive, se sevrant sans préavis de promesses de jours meilleurs administrées comme des sédatifs. Il avait dit non. Il avait refusé de se laisser à nouveau endormir par le refrain habituel : les allègements de cotisations, les crédits d'impôts, les aides aux calamités, les primes à l'hectare, les subventions à l'investissement, à la formation, l'exportation.
Il s'était détourné d'un système où il ne trouvait plus sa place, ni lui ni tous ceux animés du seul attachement à la terre et aux bêtes.
Il a dit que je ne pouvais pas savoir à quel point il était beau ce cheval blanc. Il a dit qu'on ne pouvait pas mourir comme ça, qu'on ne pouvait pas faire le noir avec tant de blancheur. Avec tant de vie et de beauté sous les yeux. C'est tout.
Eh bien c'est ça, la mélancolie, c'est la lune qui se glisse devant le cœur, et le cœur qui ne donne plus sa lumière, la mélancolie c'est la nuit en plein jour. C'est pas de moi, il a ajouté, c'est dans un livre, La Folle Allure, ça s'appelle.
Là-bas, au domaine, c’était pourtant le foisonnement éclatant du printemps. Semaine après semaine, le vert des prairies s’était intensifié, le troupeau s’étoffait des dernières mises bas, les veaux tout juste extraits des ventres batifolaient sur leurs pattes encore frêles, titubant de maladresse et de l’orgie des têtées.