J'ai compris alors ce que c'est d'être adulte : apprendre à trancher face à une série de choix désastreux, et s'accommoder au mieux de l'horrible compromis qui en découle.
Ça m'a rappelé le dernière guerre, la Grande, où tout l'argent du monde ne pouvait vous permettre d'échapper à la mort. Devant elle, nous sommes tous égaux.
" J'aimerais que tu sois toujours là, m'a-t-il dit d'une voix douce. Tu pourrais te détendre, me laisser voir qui tu es vraiment, qui est la vraie Venetia, et non la comédienne qui joue à la friponne sûre d'elle." Il a souri, mais il y avait chez lui un sérieux désarmant à nouveau et une intensité manifeste dans son regard.
Elle m'a raconté qu'elle avait failli mourir de la malaria. Mais que l'idée de la mort ne lui faisait pas peur. Que le fait de se rendre compte qu'on va mourir rend en fait la vie meilleure, car c'est à ce moment-là seulement qu'on décide de vivre la vie qu'on veut vraiment, et non celle que les autres veulent pour nous. Et qu'on décide aussi de profiter de chaque minute.
Je resterai ici cet été et sans doute au-delà. La propriétaire de la maison, une certaine Mrs Tilling, infirmière de son état, paraît à redire à tout et à tout le monde, et à moi en particulier. C'est une femme sèche comme un coup de trique avec une provision inépuisable de robes de chambre gris terne.
Sa voix était parfaitement sèche et unie. On aurait dit une machine à coudre performante en train de piquer un ourlet.
J'ai pris la partition. Mrs Quail m'avait préparé " Greensleeves", ce magnifique morceau qui est censé avoir été écrit par Henry VIII. Moi, je suis convaincue qu'il a demandé à quelqu'un de l'aider, parce qu'on ne peut pas être roi et écrire une belle musique en même temps. Surtout quand on est très occupé à décapiter ses épouses .
Mr. Churchill dit que cette guerre doit se jouer dans les airs et on nous a demandé de donner nos casseroles au gouvernement afin qu'elles soient fondues pour en faire des bombardiers. J'en ai trouvé onze dans notre cuisine. Ça doit bien permettre de faire une aile au moins .
Je n'ai pas pu m'empêcher de penser que si j'avais autant de fric, je ferais beaucoup mieux et que je saurais égayer la pièce. Ça puait la mort, c’était vieux comme les défunts accrochés aux murs, moisi comme les yeux des cerfs empaillés qui observaient les lieux du haut de leur cloison lambrissée de chêne, couverte d'une couche de poussière et de cendre. Ça m'a rappelé la dernière guerre, la Grande, où tout l'argent du monde ne pouvait vous permettre d'échapper à la mort. Devant elle, nous sommes tous égaux.
L'enthousiasme ouvre toutes les voies, car il les éclaire d'une lumière vive.