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Critique de Fabinou7


On sait ce qu'on perd mais on ne sait pas ce qu'on gagne.

Aux confins de l'autoroute du soleil, entre les pins et les criques de la côte d'Azur, Cécile, la jeune héroïne de Sagan, se fait hara-kiri. La jeune femme eut tout pour être heureuse, elle sait pertinemment ce qui est mieux pour elle, car elle est d'une désarmante et désinvolte sincérité, mais elle décide de céder à l'appel enivrant de la cruauté.

Toute à sa candeur, avouant sa culpabilité, Cécile n'est pas mauvaise. Sagan décrit avec flegme cet art de se mettre dans les pires situations, d'initier les engrenages les plus mortifères, de ceux qui laissent des bleus à l'âme, indélébiles, alors même que tout va bien, que le bonheur est à portée de main.

Dans son premier ouvrage, paru en 1954, Sagan, prémonitoire, résume sa vie à venir : sous le signe de l'auto-sabotage. Elle a le volant en main, le pied sur la pédale, elle sait pertinemment qu'elle doit freiner, mais elle accélère.

« Que cherchons-nous, sinon plaire ? ». J'eus avec Françoise Sagan le même soupçon que celui que j'entretins sur Jean Cocteau. Je me méfie des écrivains mondains. de plus, Françoise Sagan n'a pas l'imposante plume de Yourcenar ni le magnétisme esthétique de Duras, pourtant elle fut toute sa vie plus populaire que ces deux contemporaines.

« Je me rendais compte que l'insouciance est le seul sentiment qui puisse inspirer notre vie et ne pas disposer d'arguments pour se défendre. » Rien que le mot « tristesse » du titre (emprunté à Eluard) nous informe que le drame sera ouaté, amorti, engourdi. C'est là sa mondanité, les émotions sont priées de se tenir en société. Ce n'est pas « déchirure », « deuil », « désespoir » non, juste : tristesse. C'est sa modestie ou son élan vital plus fort que tous les chagrins. Pourquoi en rajouter ?

« Je comprenais que j'étais plus douée pour embrasser un garçon au soleil que pour faire une licence ». le coté scandaleux est certes daté, mais le tempérament provoquant de la jeune Françoise se lit toujours entre les lignes. Une nonchalance bourgeoise qui doit rester bien peu dosée pour ne pas agacer des lecteurs aux difficultés autrement plus diverses que de simples soucis d'études supérieures dans une villa de vacances (louée pour plus d'un mois).

Au sortir, ce roman, très facile à lire, est une agréable surprise, il y a une humilité dans ce style discret mais plus travaillé qu'à première vue, il faut attendre d'avoir des pages jusqu'à la taille, à moitié plongé dans l'intrigue pour admettre que, cette petite musique de Sagan, nous l'entendions depuis les premiers mots … « le beau nom grave de tristesse ».

Bel été,
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