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Citations sur L'orientalisme : L'Orient créé par l'Occident (23)

Selon moi, l'histoire est faite par les hommes et les femmes, mais elle peut également être défaite et réécrite, à coups de silences, d'oublis, de formes imposées et de déformations tolérées (...).
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Si l’on n’étudie pas l’orientalisme en tant que discours, on est incapable de comprendre la discipline extrêmement systématique qui a permis à la culture européenne de gérer – et même de produire – l’Orient du point de vue politique, sociologique, militaire, idéologique, scientifique et imaginaire.
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... les sociétés humaines, du moins les cultures les plus avancées, ont rarement proposé à l’individu autre chose que l’impérialisme, le racisme et l’ethnocentrisme pour ses rapports avec des cultures “autres”.
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Pour Voltaire comme pour Cervantès, le bon sens enseigne qu'on se leurre en supposant que des livres, des textes peuvent aider à comprendre le désordre grouillant, imprévisible, problématique de la vie humaine; on risque la folie ou la catastrophe à appliquer littéralement à la réalité ce qu'on a appris dans un livre.
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[incipit]
Séjournant à Beyrouth pendant la terrible guerre civile de 1975-1976, un journaliste français dit avec tristesse de la ville basse éventrée : « Elle avait semblé autrefois faire partie […] de l’Orient de Chateaubriand et de Nerval. » Pour ce qui est du lieu, il a bien raison, dans la mesure, du moins, où c’est un Européen qui est en cause. L’Orient a presque été une invention de l’Europe, depuis l’Antiquité lieu de fantaisie, plein d’êtres exotiques, de souvenirs et de paysages obsédants, d’expériences extraordinaires. Cet Orient est maintenant en voie de disparition : il a été, son temps est révolu. Cela semble peut-être sans importance que des Orientaux soient eux-mêmes en jeu de quelque manière, que, à l’époque de Chateaubriand et de Nerval déjà, des Orientaux aient vécu là et qu’aujourd’hui ce soient eux qui souffrent : l’essentiel, pour le visiteur européen, c’est la représentation que l’Europe se fait de l’Orient et de son destin présent, qui ont l’un et l’autre une signification toute particulière, nationale, pour le journaliste et pour ses lecteurs français.
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C'est, semble-t-il, un défaut fort courant que de préférer l'autorité schématique d'un texte aux contacts humains directs, qui risquent d'être déconcertants.
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Personne n'a jamais trouvé comment détacher l'homme de science des choses de la vie, de son implication (consciente ou inconsciente) dans une classe, dans un ensemble de croyances, dans une position sociale ou du simple fait d'être membre d'une société. Tout cela continue à peser sur son activité professionnelle, même si ses recherches et leurs fruits s'efforcent tout naturellement d'atteindre une relative liberté par rapport aux inhibitions et aux restrictions imposées par la réalité quotidienne brute. En effet, il existe bien quelque chose comme le savoir, qui est plutôt moins partial que l'individu qui le produit, tout empêtré et distrait par les circonstances de la vie. Cependant, ce savoir n'est pas pour autant non politique.
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On suppose toujours, quoi que de manière cachée, que, bien que les consommateurs occidentaux appartiennent à une minorité numérique, ils ont le droit soit de posséder soit de dépenser la plus grande partie des ressources mondiales. Pourquoi ? Parce que, à la différence des orientaux, Ils sont de véritables êtres humains. Il n’existe pas de meilleur exemple, aujourd’hui que ce que Anouar Abdelmalek appelle e l’ »hégémonisme des minorités possédantes » et de l’anthropocentrisme allié à l’européanocentrisme : un Occidental qui appartient à la bourgeoisie croit que c’est sa prérogative humaine non seulement de gérer le monde non blanc mais aussi de le posséder, justement parce que par définition « il »n’est pas tout à fait aussi humain que « nous ». On ne peut trouver d’exemples plus net de la pensée déshumanisée.
D’une certaine manière, les limites de l’orientalisme sont, comme je l’ai déjà dit, celle qui apparaissent lorsqu’on reconnaît, réduit à l’essentiel, dénude l’humanité d’une autre culture, d’un autre peuple ou d’une autre région géographique. Mais l’orientalisme a fait un pas de plus : il considère Lorient comme quelque chose dans l’existence non seulement se déploie pour l’Occident, mais aussi se fixe pour lui dans le temps et dans l’espace.
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Toutes sortes d'autres indications montrent comment la domination culturelle se maintient, tout autant par le consentement des Orientaux que par une pression économique directe et brutale des États-Unis. Par exemple, voici qui peut nous faire réfléchir : alors qu'il existe des douzaines d'organisations aux États-Unis qui étudient l'Orient arabe et islamique, il n'y en a aucune en Orient qui étudie les États-Unis ; ceux-ci représentent pourtant la principale influence économique et politique dans la région. Pire encore, il n'y a en Orient pour ainsi dire aucun institut, même modeste, qui soit consacré à l'étude de l'Orient.

Mais tout cela n'est rien, à mon avis, comparé au second facteur qui contribue au triomphe de l'orientalisme : l'idéologie de la consommation en Orient. Le monde arabe et islamique dans son entier est accroché à l'économie de marché occidentale. Il n'est pas besoin de rappeler que le pétrole, principale ressource de la région, a été totalement absorbé dans l'économie des États-Unis. Je ne veux pas seulement dire que les grandes compagnies pétrolières sont sous le contrôle du système économique américain, mais encore que les revenus pétroliers des Arabes, sans parler du marketing, de la recherche et de l'organisation industrielle, ont leur siège aux États-Unis. Les Arabes enrichis par le pétrole sont ainsi devenus de très importants clients pour les exportations américaines : c'est vrai aussi bien des États du Golfe que de la Libye, de l’Irak, de l'Algérie, États progressistes. Il s'agit d'une relation à sens unique, les États-Unis acheteurs d'un très petit nombre de produits choisis (pétrole et main-d'œuvre peu payée pour l'essentiel), les Arabes consommateurs d'une grande gamme de produits américains, matériels et idéologiques.

Cela a de nombreuses conséquences. Ainsi, dans la région, une grande uniformisation des goûts s'est produite, symbolisée non seulement par les transistors, les blue-jeans et le Coca-Cola, mais aussi par les images culturelles de l'Orient que donnent les mass média américains et que consomme sans réflexion la foule des spectateurs de la télévision. Première conséquence : le paradoxe de l'Arabe qui se voit comme un « Arabe » du type de ceux que montre Hollywood. Autre conséquence : l'économie de marché occidentale, tournée vers la consommation, a produit (et continue à produire à une vitesse accélérée) une classe instruite dont la formation intellectuelle est dirigée de façon à satisfaire les besoins du marché. L'accent est mis, très évidemment, sur les études d'ingénieur, de commerce et d'économie; mais l'intelligentsia se fait elle-même l'auxiliaire de ce qu'elle considère comme les principales tendances qui ressortent en Occident. Le rôle qui lui a été prescrit est celui de « moderniser », ce qui veut dire qu'elle accorde légitimité et autorité à des idées concernant la modernisation, le progrès et la culture qu'elle reçoit en majeure partie des États-Unis. On en trouve un témoignage frappant dans les sciences sociales et, chose assez étonnante, chez des intellectuels progressistes dont le marxisme est pris en gros chez Marx, dans ses idées qui font du tiers monde un tout homogène (j'en ai parlé plus haut dans ce livre). Ainsi, après tout, s'il y a un acquiescement intellectuel aux images et aux doctrines de l'orientalisme, celui-ci est aussi puissamment renforcé par les échanges économiques, politiques et culturels ; bref, l'Orient moderne participe à sa propre orientalisation. (pp. 349-350)
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Il ne faut pas croire que la structure de l'orientalisme n'est rien d'autre qu'une structure de mensonges ou de mythes qui seront tout bonnement balayés quand la vérité se fera jour. Pour ma part, je pense que l'orientalisme a plus de valeur en tant que signe de la puissance européenne et atlantique sur l'Orient qu'en tant que discours véridique sur celui-ci (ce qu'il prétend être, sous sa forme universitaire ou savante).
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