Mick est le prototype du loser. A 32 ans, il est un de ces chomeur célibataire en GDI, galère à durée indéterminée, qui préfère glandouiller devant sa télé et attendre un heureux coup du sort. Sa soeur, elle, est plutôt dans l'opulence mais n'hésite pas à faire sa radine. Pour couronner le tout, il doit supporter un père particulièrement détestable à son égard, qui lui renvoit constamment son image de raté. Ce dernier, éclopé par accident, a laissé la mauvaise humeur, l'aigreur et les critiques gouverner sa vie depuis la mort de sa femme, et est devenu un vrai emmerdeur.
Alors que la grand-mère de Mick vient à mourir, l'évènement provoque chez son père, Charles, l'envie de faire un tour du monde, pour revenir sur les lieux connus avec sa défunte femme. Il n'a pas bougé de chez lui depuis 25 ans, il ne sait pas se déplacer seul avec ses béquilles et estime donc avoir besoin d'une "nounou". Mick est contraint bon gré, mal gré à l'accompagner dans ce périple un peu fou qui ne manquera pas d'exacerber les tensions entre le père et son fils.
Voilà 2 hommes qui ne s'apprécient guère obligé de compter l'un sur l'autre. Alors que Charles multiplie les caprices et rend chèvre son pauvre fils, à force d'imprévus et d'inconséquence, Mick ronge son frein et résiste à l'envie d'avandonner son père à son propre sort. Pourtant, peu à peu, les pays défilants, le père et le fils vont finir par s'accepter et comprendre les motivations de chacun.
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Nous ne serons jamais des héros" est un chouette album qui relate des relations difficiles entre un père et son fils. Murés dans leurs certitudes, ils refusent de laisser la place aux questionnements et à l'avenir.
Mick campe dans son statut de jeune galérien qui ne peut pas grand chose pour réussir sa vie et doit faire face à l'image paternelle forte et héroique. Charles, quant à lui, s'est retiré en lui-même depuis la mort de sa femme et se refuse à vivre et être heureux.
Les portraits des deux hommes sont bien traités et on s'attache rapidement à ces 2 incompris.
Peu à peu, nous allons les voir évoluer : Charles cherche à apaiser ses regrets en revivant par procuration son histoire d'amour avec la mère de Mick, tandis que son fil immature va murir insidieusement, aidé par la rencontre d'une jeune et jolie voyageuse qui saura le faire réfléchir.
Mais l'album est aussi une réflexion sur les différences générationnelles, le poids des idéaux de nos parents qui pèsent sur les épaules des enfants et la part du vécu dans notre construction personnelle.
Mick est d'une génération sans combat et se cherche un but personnel alors que Charles a connu la guerre et l'émancipation libertaire de 68. Charles va raconter à son fils son parcours, son histoire d'amour, lui montrant ainsi qu'il a aussi été un jeune homme.
Chacun sortira grandit et apaisé de ce voyage, et la fin, forte et émouvante, cloturera cet album en beauté.
"Nos parents n'ont pas connu la guerre mais ils ont eu les couilles de faire la révolution, ce sont les héros de 68... Nous, on a ni guerre ni révolution à faire. Pas d'adversaire à combattre, pas de parents à affronter... Si on cherche à se distinguer d'une manière ou d'une autre, une marque de pompes ou un déodorant va s'empresser de récupérer tes idées pour vendre des merdes en masse... On sera jamais des héros, faut faire le deuil de ce vieux fantasme. On doit réussir notre passage sur terre d'une autre manière."
Je dois dire que j'ai beaucoup aimé cet album qui oscille entre voyage, histoire de famille et quête initiatique. J'y ai retrouvé des sentiments connus : voyage plus ou moins évident avec le père, relations compliquées avec lui, différence générationnelle. On peut dire que tout est extrêmement réaliste.
Un récit sur le sens de la famille et de l'histoire que je vous conseille fortement !
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