Les pères ont souvent le beau rôle dans les histoires : ils doivent montrer l'exemple à leurs fils, éviter les bêtises et pousser leur progéniture vers le haut. Ici, dans cette BD, c'est tout l'inverse.
Le père de
Nous ne serons jamais des héros, prénommé Charles, ressemble à un vrai beauf en chemise à fleur, se bourre de médicament (il est handicapé) et terrorise son entourage (prenons par exemple la page 15 où le lecteur assiste médusé à des échanges pour le moins cordiaux avec sa vieille voisine), tout en étant porté sur la bouteille (pas le père idéal, vous en conviendrez).
A la mort de sa mère, Charles décide de faire une sorte de tour du monde, en demandant à son fils Michaël (au chômage, sans but précis dans la vie, un peu beauf lui aussi) de l'accompagner. Michaël devient en quelque sorte l'« esclave personnel » de son père (comme d'ailleurs celui-ci le désigne !) mais il se rebelle à certains moments tant son père lui en fait baver. Et gare à ceux qui veulent apporter leur aide lors des étapes de ce grand voyage : le vieil homme leur réserve ses meilleurs souvenirs. Cet ours mal léché et malpoli fait souvent honte à son fils...
Sur ce canevas pas banal, les auteurs se régalent et nous avec : quel pied cette BD ! Je viens de la relire et je ne l'ai pas lâchée, en retrouvant des réparties qui m'avaient marquées lors de ma première lecture. Les dialogues d'
Olivier Jouvray sont truculents, les dessins de
Frédérik Salsedo au poil (son frère Greg assure les couleurs).
Cette BD est un bonheur de lecture, drôle, émouvante et réconfortante car devinez qui se cache derrière ce père autoritaire et cassant ? Une sorte de grand gamin nostalgique qui souhaite (entre autre) que son fils sorte de sa douce mais tenace léthargie. Un vieil homme bourru mais philosophe. Un amoureux de la bonne chair qui a du mal à digérer que son fils soit à ce point peu gourmand. Un homme meurtri par la mort de sa femme, la mère de Michaël...
J'ai adoré cet album que je vais garder précieusement dans un coin de ma maison, pour que mon fils le lise plus tard, un peu comme un manuel de survie (même si son père est loin, très loin d'être un beauf !!!). Quoiqu'il en soit, je vous recommande fortement cet album, si vous aimez les histoires de transmission, de rêves cassés, de voyages brinquebalants...
Je tiens sincèrement à remercier Babelio et les éditions du lombard, qui m'ont envoyé cette pépite ainsi que plusieurs autres du même acabit : j'ai exploré de nouvelles pistes dessinées et ai rencontré de sacrés auteurs. Merci !