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Citations sur Correspondance : Gustave Flaubert / George Sand - Tu .. (130)

Nuit de mardi
[...]
La vie doit être une éducation incessante. Il faut tout apprendre, depuis Parler jusqu'à Mourir. [...]

Gustave Flaubert, février 1869.
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Nohant, 28 avril 1871

[...] Dis-moi si le tulipier n'a pas gelé cet hiver et si les pivoines sont belles. Je fais souvent en esprit le voyage, je revois ton jardin et ses alentours. Comme cela est loin, que de choses depuis ! On ne sait plus si on n'a pas cent ans.
Mes petites seules me ramènent à la notion du temps, elles grandissent, elles sont drôles et tendres, c'est par elle et les deux êtres qui me les ont données que je me sens encore de ce monde, c'est par toi aussi, cher ami, dont je sens le coeur toujours bon et vivant. Que je voudrais te voir ! Mais on n'a plus les moyens d'aller et venir.
Nous t'embrassons tous et nous t'aimons.

George Sand
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Flaubert à Sand,
mercredi 3 (décembre 1872)

Pourquoi publier (par l'abominable temps qui court) ? Est-ce pour gagner de l'argent ? quelle dérision ! Comme si l'argent était la récompense du travail ! et pouvait l'être ! Cela sera, quand on aura détruit la spéculation. D'ici là, non ! Et puis, comment mesurer le Travail ? Comment estimer l'Effort ? Reste donc la valeur commerciale de l'oeuvre. Il faudrait pour cela supprimer tout intermédiaire entre le Producteur et l'acheteur. Et quand même cette question est insoluble. Car j'écris (je parle d'un auteur qui se respecte) non pour le lecteur d'aujourd'hui mais pour tous les lecteurs qui pourront se présenter, tant que la langue vivra. Ma marchandise ne peut donc être consommée maintenant, car elle n'est pas faite exclusivement pour mes contemporains. Mon service reste donc indéfini, et par conséquent impayable. Pourquoi donc publier ? Est-ce pour être compris, applaudi ? Mais vous-même, vous, grand George Sand, vous avouez votre solitude. Y a-t-il maintenant, je ne dis pas de l'admiration ou de la sympathie, mais l'apparence d'un peu d'attention pour les oeuvres d'art ? Quel est le critique qui lise le livre dont il ait à rendre compte ? (p. 482)
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[...] C'est si discret, un livre ! C'est muet, cela dort dans un coin ; cela ne court pas après vous. C'est autrement modeste que la musique qu'il faut entendre, bonne ou mauvaise, et même que le tableau, qui flambe ou qui grimace sur la muraille. - Vous voulez absolument le lire ? Donc, vous voulez aller à Carthage... Eh bien ! vous y voilà. Vous ne vous y plaisez guère ? Je le comprends. Vous avez peur, dégoût, vertige, indignation ? Donc, le voyage a été fait. Le narrateur n'a pas menti, et si les cheveux vous dressent à la tête, c'est qu'il est à la hauteur de son sujet, c'est qu'il est de force à vous dépeindre vigoureusement ce qu'il a vu.
Mais vous avez le coeur sucré, comme disent nos paysans d'ici. Il vous fallait du bonbon et on vous a donné du piment. Vous pouviez rester à votre ordinaire : que diable alliez-vous faire à Carthage ?
J'ai voulu y aller, moi, je ne me plains de rien. Je me suis embarquée depuis ma petite serre chaude dans le cerveau de l'auteur. C'est aussi facile que d'aller dans la lune avec le ballon de la fantaisie ; mais, en raison de cette grande facilité et de cette certitude d'arriver en un clin d'oeil, je ne me suis pas mise en route sans faire mes réflexions et sans me préparer à de grands étonnements, à de grandes émotions peut-être. J'en ai eu pour mon argent, comme on dit, et maintenant, je pense comme tous ceux qui descendent les hautes cimes : je me dis que je ne voudrais pas retourner y finir mes jours, mais je suis fort aise d'y avoir été [...]. (Annexes, p. 641)

George Sand, La Presse, 27 janvier 1863
(Article paru en défense de Salammbô)
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L'homme qui a conçu et achevé la chose a toutes les aspirations et les ferveurs d'un grand artiste. [...] Je sens donc là une oeuvre complètement originale, et là où elle me surprend et me choque, je ne me reconnais pas le droit de blâmer. [...] En effet, est-on bien autorisé à étourdir d'avertissements et de conseils un homme qui gravit une montagne inexplorée ? Toute oeuvre originale est cette montagne là. Elle n'a pas de chemin connu. L'audacieux qui s'y aventure cause un peu de stupeur aux timides, un peu de dépit aux habiles, un peu de colères aux ignorants. Ce sont ces derniers qui blâment le plus toutes les hardiesses. Qu'allait-il faire sur cette montagne ? Qui l'y obligeait ? Qu'en rapportera-t-il ? A quoi bon gravir les cimes quand il y a plus bas de la place pour tout le monde, et des chemins de plaine si carrossables ? Mais quelques-uns pourtant, parmi ces ignorants, aiment ces sommets, et, quand ils n'y peuvent aller, ils aiment ceux qui en reviennent. je suis de ceux-là, moi.

Georges Sand à propos de Salambô
Dans La Presse du 27 janvier 1863

(Préface, p. 9 et Annexes p. 639-640)
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(George Sand à Flaubert)
Je veux voir l'homme tel qu'il est. Il n'est pas bon ou mauvais, il est bon et mauvais. Mais il est quelque chose encore... - La nuance ! La nuance qui est pour moi le but de l'art, - étant bon et mauvais, il a une force intérieure qui le conduit à être très mauvais et un peu bon - ou très bon et un peu mauvais.
Il me semble que ton école ne se préoccupe pas du fond des choses et qu'elle s'arrête trop à la surface. A force de chercher la forme, elle fait trop bon marché du fond, elle s'adresse aux lettrés.
Mais il n'y a pas de lettrés proprement dits. On est homme avant tout.
On veut trouver l'homme au fond de toute histoire et de tout fait. ça a été le défaut de l'éducation sentimentale, à laquelle j'ai tant réfléchi depuis, me demandant pourquoi tant d'humeur contre un ouvrage si bien fait et solide.
Ce défaut, c'était l'absence d'action des personnages sur eux-mêmes. Ils subissaient le fait et ne s'en emparaient jamais. Eh bien, je crois que le principal intérêt d'une histoire, c'est ce que tu n'as pas voulu faire.
A ta place, j'essayerais le contraire, tu te renouais pour le moment de Shakespeare, et bien tu fais ! C'est celui qui met les hommes aux prises avec les faits ; remarque que, par eux, soit en bien, soit en mal, le fait est toujours vaincu. ils l'écrasent ou ils s'écrasent avec lui.
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Sand à Flaubert
Nohant, 29 novembre 1872

[...] C'est comme ça et c'est tout simple. Du moment que la littérature est une marchandise, le vendeur qui l'exploite n'apprécie que le client qui l'achète, et si le client déprécie l'objet, le vendeur déclare à l'auteur que sa marchandise ne plaît pas. La république des lettres n'est qu'une foire où on vend des livres. Ne pas faire de concession à l'éditeur est notre seule vertu, gardons-là et vivons en paix, même avec lui quand il rechigne, et reconnaissons aussi que ce n'est pas lui le coupable. Il aurait du goût si le public en avait. (p. 479)
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Sand à Flaubert
Nohant, 21 septembre 1866

[...]Moi je présume que l'homme d'intelligence peut avoir de grandes curiosités. Je ne les ai pas eues, faute de courage, j'ai mieux aimé laisser mon esprit incomplet. Ça me regarde et chacun est libre de s'embarquer sur un grand navire à toutes voiles ou sur une barque de pêcheur. L'artiste est un explorateur que rien ne doit arrêter et qui ne fait ni bien ni mal que de marcher à droite ou à gauche, son but sanctifie tout. C'est à lui de savoir, après un peu d'expérience, quelles sont les conditions de santé de son âme (p. 77). [...]
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Les acteurs sont des instruments fragiles; si on les touche fort, ils se rompent. Il faut toujours leur dire que c'est bien, ils ne vibrent que sous la louange, la critique les brise.
Sand à Flaubert, 17 août 1869
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Flaubert à Sand

Dieppe, 11 mars 1871

Chère Maître,
Quand se reverra-t-on ? Paris ne m'a pas l'air drôle ? Ah ! dans quel monde allons-nous entrer ! Paganisme. Christianisme, Muflisme, voilà les trois grandes évolutions de l'humanité. Il est triste de se trouver au début de la troisième.
Je ne vous dirai pas ce que j'ai souffert depuis le mois de septembre ! Comment n'en suis-je pas crevé ? Voilà ce qui m'étonne ! Personne n'a été plus désespéré que moi. Pourquoi cela ? J'ai eu de mauvais moments dans ma vie, j'ai subi de grandes pertes, j'ai beaucoup pleuré, j'ai ravalé beaucoup d'angoisses. Eh bien, toutes ces douleurs accumulées ne sont rien, je dis rien [du] tout, en comparaison de celle-là. Et je n'en reviens pas ! je ne m'en console pas ! Je n'ai aucune espérance.
Je ne me croyais pas progressiste, et humaniste, cependant. N'importe, j'avais des illusions ! Quelle barbarie ! quelle reculade ! J'en veux à mes contemporains de m'avoir donné les sentiments d'une brute du XIIe siècle ! Le fiel m'étouffe ! Ces officiers qui cassent des glaces en gants blancs, qui savent le sanscrit et se ruent sur le champagne, qui vous volent votre montre et vous envoient ensuite leur carte de visite, cette guerre pour de l'argent, ces civilisés sauvages me font plus horreur que les Cannibales. Et tout le monde va les imiter, va être soldat ! La Russie en a maintenant 4 millions, toute l'Europe portera l'uniforme. Si nous prenons notre revanche, elle sera ultra-féroce. Et notez qu'on ne va penser qu'à cela, à se venger de l'Allemagne ! le gouvernement, quel qu'il soit, ne pourra se maintenir qu'en spéculant sur cette passion. Le meurtre en grand va être le but de tous nos efforts, l'idéal de la France !
Je caresse le rêve suivant : aller vivre au soleil, dans un pays tranquille !
Attendons-nous à des hypocrisies nouvelles : déclamations sur la vertu, diatribes sur la corruption, austérité d'habits, etc., cuistrerie complète !
J'ai actuellement à Croisset quarante Prussiens. Dès que mon pauvre logis (que j'ai en horreur maintenant) sera vidé et nettoyé j'y retournerai, puis j'irai sans doute à Paris, malgré son insalubrité. Mais de cela je me fiche profondément !
Amitiés aux vôtres, et tout à vous.
Votre vieux troubadour

Gve peu gai !

(p. 375 - 376)
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