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Critique de LouisShc


Voilà un ouvrage dont on ne sait pas s'il nous est permis d'en écrire une "critique". Ouvrage massif, somme philosophique. Disons le tout de suite, ce livre a de quoi rebuter : il ne faudra pas moins de 800 pages pour arriver à la conclusion de cet essai d'ontologie phénoménologique. le vocabulaire est technique, les démonstrations longues et difficiles. Mais notons que la langue est d'une rare qualité pour un texte philosophique, ce qui rend la lecture très agréable sur certains passages, d'autant qu'il s'agit là de phénoménologie et donc de descriptions : celles-ci peuvent se révéler magnifiquement écrites. Que l'on songe ici aux célèbres pages sur le garçon de café où chaque mot est choisi avec une attention toute particulière, un poids et une exigence rare. Car Sartre sait user de la langue pour nous donner à voir les phénomènes, comme chez Heidegger ce jargon n'est donc pas artificiel ou inutile mais nécessaire pour mettre au jour des structures de la conscience et du monde jusque-là inouïes.
Une autre chose m'a beaucoup fasciné : la totalité que représente cet ouvrage. On sait que Sartre finit rarement ses oeuvres (Cahiers pour une morale ; Chemins de la liberté ; Critique de la raison dialectique ; Idiot de la famille etc.), et même ici la fin de L'Être et le Néant appelle un autre ouvrage sur la morale (Cahiers pour une morale) ; ceci dit, cette somme a quelque chose d'accompli : le texte est soigné et terminé. de plus, L'Être et le Néant est une totalité en un deuxième sens : il est le XXe siècle. Quelles autres sommes peuvent se vanter d'être à la fois écrites par un grand écrivain distingué du prix Nobel, de faire la synthèse entre Bergson, Husserl, Heidegger, Proust, Kojève (et bien d'autres auteurs antérieurs au XXe siècle), d'être la référence de toute une génération philosophique, littéraire et politique où l'existence, la responsabilité, l'engagement mais aussi l'angoisse et la liberté prennent un sens extrêmement important ? Bref, cet ouvrage est historique. Il était l'avant garde : il est maintenant son époque. Si Sartre est l'homme siècle, L'Être et le Néant et la somme de ce siècle (à ceci près que les sciences -hormis les sciences humaines- sont quasiment absentes des préoccupations de Sartre...).
C'est un livre sur la liberté, c'est un livre pour la liberté. "Spinoza voulut faire de lui-même un homme libre - aussi libre que possible vu sa philosophie" cite Deleuze en exergue de son petit livre sur Spinoza : on peut en dire autant de Sartre.
Nous sommes libres, à nous d'en saisir le sens et d'en faire quelque chose. La suite de L'Être et le Néant : c'est l'humain qui le lit, le comprend agit pleinement en conséquence.
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