« La pensée de la cessation de notre existence [...] doit raisonnablement aussi peu nous attrister que la pensée que nous n'aurions jamais existé. [...] Il faut envisager la vie comme une sévère leçon qui nous est infligée. »
[ dialogue entre Philalèthe et Thrasymaque]
PHILALÈTHE :
_" tu tiens donc ton individualité pour si agréable, si excellente, si parfaite et si incomparable, qu'il ne peut y en avoir de supérieure ?
et tu ne voudrais l'échanger contre aucune autre, même si on te donnait l'assurance que tu t'y trouverais plus à ton aise ?
THRASYMAQUE :
_" mais sûrement, mon individualité, quelle qu'elle soit, c'est moi même.
(rien au monde n'est au-dessus de moi : car Dieu est Dieu et je suis moi) .Goethe.
"moi, moi, je veux exister. c'est à cela que je tiens, et non à une existence qu'il faut d'abord me démontrer être mienne."
Après ta mort,tu seras ce que tu étais avant ta naissance.
Plus un homme a la conscience claire de la fragilité,du néant et de la nature chimérique de toute chose,plus aussi il a la conscience claire de l'éternité de sa propre essence intime.
Ce n'est en effet que par opposition à elle que l'on reconnaît la susdite nature des choses,comme on ne perçoit la course rapide d'un vaisseau qu'en le regardant de la terre ferme,et non en contemplant le vaisseau lui-même.
Aussi la pensée de la cessation de notre existence,ou d'un temps où nous ne serons plus,doit raisonnablement aussi peu nous attrister que la pensée que n'aurions jamais existé.
Or,comme cette existence est essentiellement personnelle,la fin de la personnalité ne doit pas être regardée comme une perte.
L'état auquel la mort nous ramène,au contraire,est notre état originel,c'est à dire l'état propre de l'être dont la force primitive se manifeste par la production et le maintien de la vie qui maintenant cesse.
C'est,en un mot,l'état de la chose en soi par opposition au phénomène.