Médée

MÉDÉE : Le sort craint les cœurs forts et accable les lâches.
LA NOURRICE : C'est quand l'occasion vient qu'on prouve sa vaillance.
MÉDÉE : À cœur vaillant nulle occasion ne peut manquer.
LA NOURRICE : Nul espoir, nulle issue ne s'offre à ta détresse.
MÉDÉE : Que qui n'espère rien de rien ne désespère.
LA NOURRICE : Colchos est loin, plus de confiance en ton époux,
Et de tant de pouvoirs plus aucun ne te reste.
MÉDÉE : Médée reste, et tu vois en elle te mers et terres,
Et le fer et la flamme, et les dieux et la foudre !

Acte II, v. 159-167.

MÉDÉE
La seule chose qui puisse me calmer,
c'est qu'avec moi le monde entier s'effondre,
soit réduit à néant,
qu'avec moi tout disparaisse !
Tout entraîner avec soi dans sa perte, quel plaisir !

P.117

Jason : [...] La présence de mes enfants est ma raison de vivre, mon coeur consumé par les tourments et y trouve une consultation. Je pourrais plus facilement être privé de mon souffle,
de mes membres, de la lumière.

Tais-toi
Je t'en prie
Pleure mais en secret
Cache ta douleur
Il faut savoir encaisser les coups les plus rudes
Sans un mot
Rester impassible
Afin de pouvoir ensuite riposter
Seule la colère qui se cache est efficace
Avouer sa haine c'est perdre sa vengeance.

JASON : Ô sort toujours cruel, destin toujours pénible,
Aussi méchant quand il fait grâce et quand il frappe !
Combien le dieu m'inventa-t-il de médecines
Pires que mes périls ! Si je veux reconnaître,
Fidèle, les bienfaits de mon épouse, il faut
Présenter ma tête au trépas, si je refuse,
Hélas, trahir ma foi. Je l'ai fait non par peur,
Mais, père, par piété, car outre moi mes fils
Étaient tués.

Acte III, (431-439).

MÉDÉE : Qui profite du crime le commet !
(MEDEA : Cui prodest scelus is fecit.)

Acte III.

Médée : O haine, mène-moi où il te plaît: je te suis. Que la nombreuse postérité de la superbe Tantalide n'est-elle née de mes flancs et que n'ai-je mis au monde quatorze enfants! J'ai été trop stérile pour ma vengeance: je n'ai- mais cela suffit du moins pour mon frère et mon père- mis au monde que deux fils.

L'Indien boit l'eau glacée de l'Araxe, le Perse boit celle de l'Elbe et du Rhin. Un temps viendra, dans le cours des siècles, où l'Océan élargira la ceinture du globe, pour découvrir à l'homme une terre immense et inconnue ; la mer nous révélera de nouveaux mondes, et Thulé ne sera plus la borne de l'univers.

Le Choeur, II, 371

Si la mère que je suis
cache encore en elle quoi que ce soit
qui puisse témoigner de son amour,
je fouillerai mes entrailles avec mon épée,
et je l'extirperai du tranchant de ma lame.

Trop audacieux celui qui, le premier, sur un frêle esquif, fendit les flots perfides et, tournant le dos à sa terre natale, confia sa vie aux caprices des vents et qui, sillonnant les mers en une course incertaine, a pu se fier à une mince structure de bois, trop mince frontière délimitant les chemins de la vie et de la mort.