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Critique de Arthur409


Dans un coin perdu du Wisconsin, au milieu années 1960, il y a une ferme où vit, seul, un certain Enoch Wallace. Pas très causant, il fréquente peu ses rares voisins, mais discute volontiers avec le facteur qui semble son seul lien avec le monde extérieur.
Mais Enoch est bien occupé, car la ferme est en réalité un relais spatial : elle sert d'étape à des extra-terrestres de toutes sortes qui voyagent d'un bout à l'autre de la galaxie. Ils se déplacent par une sorte d'intrication quantique instantanée, s'incarnent dans un corps temporaire fabriqué à l'aide d'un « matérialiseur » relié à une cuve adaptée, et quand ils repartent pour une nouvelle étape de leur voyage, leur corps provisoire est détruit dans une installation spéciale.
En plus de son rôle d'hôte d'accueil, Enoch est une sorte de correspondant de la Terre auprès des galactiques. Il leur transmet un grand nombre d'observations sur l'avancée des sciences et des techniques sur notre planète, sur l'évolution de nos sociétés. L'enjeu, très important, est l'entrée éventuelle de la Terre dans la puissante Fédération Galactique !
Mais quelques grains de sable viennent perturber le fonctionnement de cette organisation. Un agent des services secrets, genre Mulder des X-Files, découvre qu'Enoch, qui paraît âgé d'une trentaine d'années, a combattu pendant la Guerre de Sécession et serait âgé de plus de cent vingt ans… Et quelque part dans la Galaxie, le Talisman, qui permet aux membres de la Fédération Galactique d'être reliés à une puissante force spirituelle, a été volé !
Je laisse le lecteur découvrir le dénouement de cette intrigue, qui, au-delà du récit imaginaire, est sous-tendu par une réflexion sur la violence humaine et la guerre.
Le livre a été écrit en 1963, et a reçu le prix Hugo 1964. Nous sommes alors en pleine guerre froide, la crise des missiles de Cuba vient d'avoir lieu. L'atmosphère est lourde dans le monde, ainsi que peuvent l'évoquer des chansons comme « Il y avait une ville » de Claude Nougaro (1958) ou « A Hard Rain's a-Gonna Fall » de Bob Dylan (1962). Je me souviens personnellement de cette époque et de son ambiance oppressante.
Dans sa retraite solitaire, Enoch, marqué par ses combats de la Guerre de Sécession, se livre à une analyse de la violence qui lui semble inhérente à la nature humaine. Violence collective de la guerre, absurde, bien sûr, mais aussi la violence qui semble ancrée dans chaque individu, et qu'Enoch ressent quand il la libère dans le stand de tir ultra-réaliste que les extra-terrestres lui ont aménagé au sous-sol de la ferme. Comment une race aussi violente que l'humanité pourra-t-elle être admise dans la Confédération Galactique ? Il existerait bien une solution, suggérée par le mentor extra-terrestre d'Enoch mais elle supposerait une régression totale de l'humanité, et Enoch ne peut s'y résoudre.
La solution fait appel à une part de merveilleux, comme si la sagesse humaine était insuffisante pour résoudre le problème …
Ce roman n'est pas une épopée spatiale à grand spectacle, il n'y a pas de vaisseau futuriste, les extra-terrestres sont à peine décrits, car ce n'est pas leur apparence qui importe, mais leur message. Il n'y a pas d'aliens hostiles (sauf un…), ils sont plutôt amicaux et ne transitent jamais par la ferme d'Enoch sans lui apporter un cadeau (dont souvent il ne sait pas que faire !). Non, ce livre est plutôt une fable, un conte philosophique que l'auteur de « Micromégas » n'aurait peut-être pas renié.
Deux commentaires sur la forme pour terminer :
- Cette nouvelle édition du roman est issue d'une excellente traduction de Pierre-Paul Durastanti. Je me permets cependant une remarque : avoir appelé les voyageurs en provenance de Vega des « végans » est certes logique, mais un peu déstabilisant étant donné que ce mot a été récemment créé dans une tout autre signification…
- J'ai bien aimé l'illustration de couverture, avec le symbole « Google maps » planté sur la ferme d'Enoch, avec cependant un style de dessin très « Amazing Stories » qui rappelle les années 50 -60.
Merci à Babelio et aux éditions « J'ai Lu » pour cette lecture originale qui incite à réfléchir, dans le cadre d'une « Masse Critique ».
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