Béatrice Nash vient d'arriver à Rye (Sussex) pour enseigner le latin à des élèves indifférents, voire hostiles. Son père, un universitaire réputé, est mort récemment, la laissant par testament à la merci d'une vieille tante acariâtre, pas prête du tout à laisser sa nièce vivre indépendante. L'époque est encore victorienne, très corsetée et la place de la femme est celui d'une éternelle mineure, forcément sous la tutelle d'un homme.
Mais Béatrice n'est pas faite de ce bois-là et elle n'entend pas se laisser régenter sans rien dire et quémander une maigre obole à sa tante en échange de sa soumission. Heureusement elle a des appuis sur place, surtout en la personne d'Agatha Kent, son époux John et ses neveux Hugh et Daniel. Les rumeurs de guerre commencent à circuler, sans perturber la vie bien réglée de cette bourgeoisie anglaise très étriquée.
Il m'a fallu deux cents pages pour entrer véritablement dans l'histoire. J'ai trouvé que la mise en place des personnages et des situations était un peu longue. J'ai cru m'être fourvoyée dans un banal roman "pour fille", mais quand l'action a démarré, j'ai été agréablement surprise par l'évolution des personnages. L'arrivée des premiers réfugiés belges va bouleverser la donne, le ton se fait plus grave, l'histoire gagne en épaisseur.
Le patriotisme gagne la jeunesse britannique qui s'engage à tour de bras. Béatrice de son côté héberge une jeune réfugiée belge. Elle se heurte par ailleurs, à l'étroitesse d'esprit de la petite communauté villageoise, toujours prête à l'éliminer au profit d'un homme. Le cloisonnement des classes sociales est impitoyable, elle a l'occasion de s'en rendre compte avec un de ses jeunes élèves, Snout, le plus doué, mais d'origine tzigane, donc éliminé d'office.
Il y a des histoires d'amour dans ce roman, à foison, mais aussi la réalité de la guerre ; les jeunes gens qui se retrouvent dans les tranchées abandonnent vite leurs naïves illusions ; en Angleterre de plus en plus de familles perdent un des leurs, les temps s'assombrissent.
A travers Béatrice, le féminisme est présent. Toutes les injustices faites aux femmes sont évoquées, certaines s'en font les complices, d'autres comme Béatrice ne le supportent pas et se révoltent dans le mesure de leurs moyens. La société est organisée de telle façon, qu'elles sont ligotées bon gré, mal gré. Elle fait l'amer constat du peu de confiance que lui accordait son père, alors qu'elle le secondait avec une grande efficacité.
C'est une bonne lecture de vacances, suffisamment distrayante, sans être creuse pour autant. On sent que l'auteure a dû beaucoup se documenter sur la période.
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