On ne joue pas au con avec les flics. Ça ne se fait pas. Autant cogner dans une ruche d'abeilles tueuses avec un bâton. C'était un coup à se faire piquer.
Il monta le son de sa chaîne et un vieux morceau de rap s'échappa des hauts-parleurs dernier cri. Il en avait toute une collection, de Kurtis Blow à Eazy-E, en passant par the Furious 4+1 ou Public Enemy, des rappeurs classiques maîtrisant l'art de la rime dont le talent ne se limitait pas à énumérer leurs derniers achats. Même s'il n'y avait absolument rien de mal à posséder un Louis Vuitton.
- Je croyais que tu étais un spécialiste de l'effraction."
C'était vrai. Damon avait passé une bonne partie de sa jeunesse à crocheter des portes et à forcer des fenêtres, mais il était devenu plus corpiulant. Plus lent, plus massif, plus suant. Porter un survêtement jaune vif n'allait pas non plus jouer en sa faveur.
Miro aurait aimé écouter du reggae, un son old school comme Toots & The Maytals ou the Abyssinians. Et il aurait aimé fumer un joint, mais son poumon était toujours en pleine cicatrisation. Rire, tousser ou éternuer lui étaient formellement interdits. Ce qui était fort dommage car il allait passer quelques jours chez ses parents et qu'en leur compagnie, mieux valait être défoncé.
" " Bonjour. Est-ce que le type s'en est sorti ? Celui qui s'est fait tirer dessus? "
Le gros inspecteur au crâne rasé se tourna pour lui faire face.
" Il va s'en tirer."
Daniel [ mormon]} fut parcouru d'une décharge d'adrénaline. Son corps devint léger, s'emplit d'énergie ; ses prières avaient été exaucées, la puissance et la gloire du Seigneur déferlaient en lui.
" C'est un miracle."
L'inspecteur fit la grimace.
" C'est juste un putain de coup de bol."
Miro n'avait jamais apprécié Vincent. Ce type dégageait quelque chose de malsain. Il était comparable au liseron ; agréable à regarder, joli et inoffensif en apparence, mais sous ses fleurs violettes se cachaient des racines qui détruisaient tout. Un parasite qui se nourissait des autres plantes, qui les étouffait petit à petit et les laissaient pour mortes. Un danger public pour la communauté du cannabis.
" Tout va bien se passer", dit-il en l'enlaçant.
" Everything is going to be all right.
- Comme dans la chanson de Bob Marley ?
- Ouais, comme dans la chanson de Bob Marley."
Il avait obtenu un Bachelor of Arts en biologie végétale, avec spécialisation en agronomie tropicale. Son devoir de fin d'études sur les cultures du manioc et l'exploitation de plantain en république Dominicaine avait même été publié dans une obscure revue scientifique. Tout cela se révéla fort utile pour ses expérimentations sur la cannabis.
Il vit la jeune femme déballer son petit paquet, et se sentit étrangement émoustillé par le son du papier froissé. Elle en sortit un livre dont la couverture annonçait : Um Deux Passeando pela Brisa da Tarde.
« Tu es Portugaise ? » dit-il sans avoir voulu poser une question. Elle acquiesça. « Et toi, tu es Américain.
– Californien. Los Angelino. » Il étira trop le « Angelino » en essayant d’accentuer la prononciation espagnole, mais le « g » resta coincé dans sa gorge comme un gros chewing-gum, ce qui donna l’impression qu’il était frappé d’un défaut d’élocution.
Elle sourit de plus belle. « Un Californien complètement défoncé. »
Miro haussa les épaules. Que pouvait-il répondre ? Elle avait raison. Il regarda par la fenêtre, sans savoir comment poursuivre cette conversation, et pas franchement convaincu que c’était la meilleure chose à faire. Il fut distrait par un camion de livraison et les motifs dessinés par la pluie dans les flaques ponctuant le trottoir
Une balle peut vraiment foutre votre journée en l’air.