La saveur de l'interdit

C’est alors que le piège de son maudit sourire se referma sur moi. Une expression complice illuminant son visage, il me fit signe de la tête de le rejoindre à l’intérieur. Un mouvement à peine perceptible qui me précipita dans le désarroi.
Une autre que moi aurait fiché le camp en retournant à sa place. Après tout, on voyait ce genre de situation rocambolesque uniquement dans les romans ou au cinéma, n’est-ce pas ? Or, ma réaction fut tout autre. Après un temps d’hésitation qui parut s’éterniser, j’examinai les couloirs du train pour vérifier si personne ne me voyait. Le sang pulsant à tout rompre dans mes tempes, je rejoignis ensuite celui qui était en mesure de me rendre coupable des pures folies.

"Peut-être parce que je me sens attirante et capable de soulever des montagnes dans le reflet impénétrable de ses yeux. Aussi étrange soit-il, cet homme aspire à découvrir quelle femme je suis réellement. Il ne triche pas."

- Est-ce que tu regrettes ce que nous avons fait dans le train la dernière fois? m'interroge Bastian sans tourner autour du pot.


Nous passons enfin aux choses sérieuses. Sa question me prend au dépourvu même si je redoutais qu'il me la pose. Je tourne sept fois ma langue dans ma bouche avant de répondre.

- Oui, je ne bougerais pas de ma place assise dans le wagon si c'était à refaire.


Bastian glousse. Tout est sensuel chez lui, même son rire grave. Je déglutis avec peine. Les habitations en face de nous ont toutes leurs volets clos. Le quartier est un havre de paix. Les cheveux dorés du jeune homme gagnent en éclat sous la lumière artificielle du lampadaire le plus proche. Je reste immobile quand sa main se pose doucement sur ma cuisse.


- Navré de te contredire, mais je n'en crois pas un mot, susurre-t-il en se penchant à mon oreille.

Son souffle chaud émoustille mes sens tandis que ma volonté à ne pas commettre deux fois la même erreur vacille.


- C'est pourtant vrai. J'aurais voulu ne jamais te rencontrer, persisté-je en le fusillant du regard.

- Pourquoi donc?

- Parce que tu es quelqu'un qui n'en fait qu'à sa tête et qui ne tient pas compte de ce que les autres lui disent. Il y a toujours de fâcheuses conséquences quand on se comporte mal.


La voix de Bastian se fait aussi douce que le velours tandis que ses doigts quittent ma cuisse pour remonter le long de ma hanche.

- Allons, une pincée d'adrénaline dans la vie ne peut pas faire de mal.

- Bien sûr que si! De toute manière, faire des cochonneries n'est pas mon truc.

- Tant de certitudes.... Mignonne, sache qu'il n'y a rien de répréhensible à céder parfois à ses désirs. La vie devient fade si on ne l'assaisonne pas de temps à autre avec une pincée de folie.

Lorsqu’il est près de moi, j’ai l’impression de devenir quelqu’un d’autre. J’ai du mal à me reconnaître et je déteste ça.

Tout n’est pas rose, mais pour un premier « vrai » boulot avec des responsabilités, j’aurais pu tomber plus mal.

La magnifique inconnue possède une classe enviable. Sa sophistication empreinte de sensualité ferait fondre n’importe quel mec. Loin de sombrer dans la vulgarité, la générosité de ses formes, soulignée par un chemisier au décolleté plongeant, fait rayonner sa silhouette plantureuse. Une vraie bombe.
Dame nature a doté cette femme des atouts nécessaires pour faire tourner la tête à la gent masculine. Il y a de quoi éprouver une pointe de jalousie…

L’avantage d’exercer un boulot qui nécessite un investissement total, c’est que cela m’évite de trop cogiter sur ce mec.
Parce que ouais, je n’arrive toujours pas à me sortir complètement de la tête le physique envoûtant du jeune psychologue... Ni la sensation addictive de ses mains explorant mon corps.

Cuisinier est peut-être une profession, mais c’est également un acte de générosité quand on veut faire correctement son boulot. Pour ma part, travailler sur les nuances gustatives est aussi naturel que le fait de respirer.

Dénicher un chef de cuisine compétent est aussi ardu que de trouver une aiguille dans une botte de foin, surtout à cette époque de l’année.

L’adrénaline me permet de soulever mes bagages comme s’ils ne pesaient rien. Ces derniers sont pourtant pleins à craquer.