Alors que
Les raisins de la colère était encore frais dans mon esprit, j'ai beaucoup aimé passer de l'autre côté du livre, et suivre l'auteur dans l'élaboration de son récit. Il rédige ce journal en 1938 en même temps que le roman. D'une écriture hachée, il confie ses moments de doute, les soucis de la vie quotidienne qui l'empêchent de se concentrer, la Seconde Guerre Mondiale qui couve et à laquelle il ne croit pas…
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On découvre dans ces journaux un homme simple et pragmatique qui doute beaucoup de lui-même. Steinbeck à peur d'échouer, d'écrire “un roman ordinaire” (!)
Il lutte contre la procrastination et utilise beaucoup son journal pour rester motivé. Il revient y écrire un an après la parution des Raisins de la Colère et donne à voir le bouleversements stupéfiants que le livre a créés dans sa vie. En 1939, la Guerre a éclaté. Steinbeck est au sommet de sa gloire, mais il est aussi victime d'attaques très violentes, sa vie est menacée à cause de ce roman engagé, « propagande socialiste juive », roman coup de poing dans lequel il semble avoir tout dit. Pris dans les affres d'une profonde dépression, Steinbeck ne s'en sortira qu'en écrivant à nouveau.
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Le journal esquisse aussi la silhouette de Carol Steinbeck. Épouse dévouée, femme au foyer, c'est elle qui maintient le monde à distance pour qu'il puisse écrire. Elle aussi qui dactylographie jour après jour l'écriture illisible de son mari, elle qui trouvera le titre splendide de son roman. Ces journaux nous permettent d'approcher un grand auteur, mais aussi l'une de ces grandes femmes invisibles sans qui les chefs d'oeuvres n'existeraient pas. Merci, Carol Steinbeck