Thomas avait imaginé un appartement plus en désordre, plus crasseux, moins accueillant que ce foyer bien ordonné avec ses fauteuils en cuir. Ça aurait mieux correspondu à l'idée qu'il se faisait du pédophile.
Mais ça ne changeait rien, cet homme était un monstre, quelles que soient les apparences.
Comment faisait-on pour défendre un délinquant sexuel ? Comment supportait-on un client qui commettait des viols sur des gosses ? On avait sûrement souvent posé la question à Anderson, qui avait tout aussi sûrement dû y trouver une réponse qui lui permette de bien dormir la nuit.
Thomas n'arriverait jamais à comprendre .
L’apparence n’était pas sans importance, les jures et les juges étaient aussi des êtres humains. Une allure soignée inspirait davantage confiance qu’une tenue mitée. Ce n’était pas pour rien si les prévenus issus des catégories sociales les plus élevées recevaient des peines plus clémentes que les défavorisés, aussi injuste que ce soit.
Jonas avait déjà rapporté des cartons d'orchidées lors de vols vers Bangkok. On les vendait tout emballées à l'aéroport. En Asie, une douzaine coûtaient le prix d'une seule fleur en Suède.
Les nuages étaient bordés d'or, les derniers rayons du soleil teintaient le ciel de traînées roses.
Le nez contre les cheveux d’Emil, Christian respira son odeur de bébé.
Emil, bien trop petit pour comprendre le mal que les gens pouvaient se faire. La vie était simple, quand elle se réduisait à manger et dormir.
Les peluches de Benjamin reposaient sur son lit, près de l'oreiller. Il adorait son vieux nounours, dont le pelage était mité et usé par endroits jusqu'à la trame. Benjamin ne voulait jamais s'endormir sans lui, même s'il entrait en sixième à la rentrée. De nouvelles larmes inondèrent ses joues. Asa ne se donnait plus la peine de les essuyer. Elles coulaient sans discontinuer.
Elle écarta le dessus-de-lit et caressa des doigts l'oreiller de Benjamin. Fourré dessous, son pyjama bleu. Cela ne faisait que cinq jours qu'il l'avait laissé pour partir au camp de voile. Il était toujours imprégné de son odeur d'enfant. Asa s'assit sur le lit et pressa le pyjama contre ses lèvres.
Ce n’était pas parce que lui avait aimé ça que ce serait pareil pour son fils. Benjamin n’était pas sportif comme son père, ni particulièrement extraverti et sociable. Il préférait rester dans son coin, assis sur le canapé avec un jeu vidéo.
Il referma la fermeture éclair de son sac et entra dans la chambre d’Elin.
Comme d’habitude, des poupées Barbie jonchaient toute la pièce, mais Elin jouait par terre avec sa tablette. L’idéal féminin des années cinquante côte à côte avec Internet. Etrange que Barbie soutienne malgré tout la comparaison.
Il lui avait envoyé des lettres de menace et semblait instable, mais pouvait-il vraiment être à l'origine de l'enlèvement d'un enfant pour influencer un témoin? Un enfant qui avait joué avec ses propres fils?
Nora ne voulait pas le croire.