Citations sur Chârulatâ (25)
Ce jour -là. , Bhupati n'avait rien à donner ni rien à dire. Il était venu auprès d'elle les mains vides, tel un suppliant. Une simple question prononcée sur un ton d'inquiétude affectueuse, une quelconque marque de tendresse auraient été un remède à ses blessures. (p. 71)
Les rires, les bavardages, les plaisanteries, les petites attentions quotidiennes pour se faire respectivement plaisir ne nécessitent pas beaucoup d'efforts. Le bonheur qui, pourtant en découle, est immense.
Le soir, sur la véranda régnait un parfum de jasmin. A travers les nuages, les étoiles apparaissaient dans la douceur du ciel. A la fin de cette journée, Châru n’avait pas attaché ses cheveux, n’avait pas changé de vêtement. Elle était assise à la fenêtre dans le noir ; le vent jouait doucement dans sa chevelure déployée, et de grosses larmes coulaient sans qu’elle comprît pourquoi.
Elle creusa ainsi un souterrain sous ses occupations ménagères, sous toutes ses obligations, et y édifia un temple de chagrin, décoré de guirlandes de larmes, au plus profond d'une obscurité silencieuse et impénétrable. (chapitre 15, page 93)
Bhupati se glorifiait de ne rien comprendre à la poésie. Toutefois, même s'il n'avait pas lu jusqu'au bout les écrits d'Amal, il éprouvait pour lui de l'estime. « Il n'a rien à dire, pensa-t-il, et pourtant il enchaîne les mots les uns aux autres. Moi, j'en serais incapable, même en me tapant la tête. Qui aurait pu imaginer qu'Amal en était capable ! » L'époux de Châru ne se considérait pas comme un fin lettré mais il n'était pas pour autant avare envers les belles lettres. Il donnait aux écrivains pauvres de quoi faire imprimer leurs livres à la seule condition que leurs ouvrages ne lui soient pas dédiés. Il achetait tous les hebdomadaires et les mensuels en bengali, grands et petits, connus ou inconnus, lisibles ou illisibles. « Je ne les lis déjà pas, disait-il ; si, en plus, je ne les achetais pas, ce serait commettre un péché et ne pas faire pénitence. »
Celle-ci, assise sur son lit, un oreiller sur les genoux, était absorbée dans sa rédaction, penchée sur un cahier posé devant elle. Quand Bhupati s'approcha, elle prit conscience de sa présence et, furtivement, cacha son cahier sous ses pieds. A celui qui souffre, le moindre coup fait très mal.
Sans rien dire, il s'assit auprès d'elle et se mit à la caresser doucement. Il ne savait pas consoler. Il ne comprit pas que si l'on veut tuer son chagrin en étouffant ses sanglots dans le noir, on n'aime pas avoir de témoin.
Le soir, sur la véranda, régnait un parfum de jasmin. A travers les nuages, les étoiles apparaissaient dans la douceur du ciel. A la fin de cette journée, Châru n'avait pas attaché ses cheveux, n'avait pas changé de vêtement. Elle était assise à la fenêtre dans le noir; le vent jouait doucement dans sa chevelure déployée, et de grosses larmes coulaient sans qu'elle comprît pourquoi.
Epouse d'un homme riche, Chârulatä était désoeuvrée. Tout au long des jours et des nuits, sa seule raison d'être était de s'épanouir, comme une fleur qui ne produit pas de fruit. Elle ne manquait de rien. Dans de telles circonstances, le mari devient le seul centre d'intérêt de son épouse, et les jeux de couple perdant toute retenue vont du convenu à l'inconvenant. Chârulatâ n'en eut pas le loisir. Il eût fallu écarter le voile du journal pour prendre possession de son mari, tâche qui se révéla par trop difficile.
[...]
A l'époque où les époux se découvrent l'un l'autre dans l'épanouissement et la splendeur toujours renouvelée des premiers rayons de l'amour conjugal, cette aube dorée passa sans que ni l'un ni l'autre ne s'en aperçut. N'ayant su apprécier leur nouveauté réciproque, ils prirent l'habitude de se considérer en vieilles connaissances.
Bhupati n'avait nul besoin de travailler, il avait suffisamment d'argent. Mais le destin avait fait de lui un travailleur et comme le pays était en pleine agitation politique, il fut amené à fonder un journal en anglais. Il n'eut plus ensuite à se lamenter sur la longueur de ses journées.