Le sommet des dieux, tome 2

Il paraît que s'endormir, c'est mourir. Je ne sais pas si c'est vrai.
Pas possible de tester.
Si je meurs, je ne le saurai pas.

(Habu, seul attendant les secours)

C'était toujours comme ça.
Toujours.
Il tournait en rond sans parvenir à fixer sa résolution...
Et il finissait par se retrouver confronté à une décisio, qui ne venait pas de lui.
Tout le reste de sa vie...
Il allait devoir supporter le poids de décisions qu'il n'avait su prendre.

Ce n'est pas une question de "force" ou "d'énergie", ces mots ne conviennent pas. C'est quelque chose d'autre que m'a coûté cette ascension, quelque chose que je ne sais pas exprimer. Et tout ce que j'ai gagné, c'est le droit de vivre encore quelques heures. Les dieux ou le destin n'ont rien à voir là-dedans. Ce droit, je l'ai acquis moi-même.

Dans un moment pénible, il faut penser à une épreuve encore plus difficile. ça aide à tenir le coup.

C'est impressionnant d'écrire le verbe "mourir" en parlant de soi. Je suis encore plus effrayé manintenant que j'ai écrit ce mot dans mon carnet.

J'estimais être à 8100 mètres environ , sous une terrasse enneigée . J'avais décidé de chercher un endroit à l'abri pour bivouaquer . J'avais dépensé tant d'énergie que je n'avais qu'une envie , c'était de m'écrouler là . C'est à cet instant
précis que ...j'ai aperçu un éclat blanc au loin devant moi .
Je n'avais aucune idée de ce que ça pouvait être . C'était un éclat plus blanc que celui de la neige . Alors , j'ai avancé dans cette direction sans savoir ce que j'allais trouver .
En arrivant , j'ai découvert que ce que j'avais aperçu était le cadavre d'un alpiniste à moitié enseveli sous les pierres et la neige . Son équipement indiquait qu'il était là depuis longtemps . La corde qui enserrait sa taille était en coton . Il portait plusieurs couches de vêtements qui tombaient tous en lambeaux .
Mais le plus surprenant c'étaient les semelles de ses chaussures dans lesquelles étaient plantés des clous en guise de crampons .
Cet homme était GEORGE MALLORY .
Ca ne faisait aucun doute . J'en ai été immédiatement persuadé . Sa peau avait perdu sa couleur et était devenue blanche comme de l'albâtre . Etendu comme il était , on l'aurait cru en train de dormir . Cet homme était là depuis soixante-quinze ans exposé au vents et à la neige .
Et c'est là que j'ai bivouaqué , juste à côté de lui .

"Ecrire quelque chose. Tant que j'écris c'est que je suis vivant. Lorsque je ne pourrai plus écrire, c'est que je serai sur le point de mourir."