Citations sur Les Harmoniques (11)
La nuit à l'ambassade aura marqué ses jours. Tous les jours de sa vie. Aberrant, mais évident. Il y a dans l'existence des moments-clefs, des nœuds d'instabilité, qui condensent le hasard et le réduisent à la dimension d'une tête d'épingle. Ou un dard d'abeille. une piqûre, et tout bascule. un geste de retrait, et rien ne se passe : le chemin se prolonge à l'identique au lieu de bifurquer, les étoiles s’éteignent au lieu d'illuminer, le temps s'épaissit, le destin cristallise.
A bien y réfléchir, son véritable ami est à présent Samuel, qui erre par le monde en imperméable. Au fils du temps, s'est tissé entre eux un lacis de sollicitude et de respect, subtil amalgame de clairvoyance et d'opacité où chacun sait jusqu'à quel point il peut venir en aide à l'autre, et , tout en conservant l'option en cas de détresse, connaît les limites à ne pas franchir en régime de croisière.
Cet impalpable encordement lui convient ; il sait le constat réciproque. Tenir l'un à l’autre est ce que, communément, l'on nomme attachement. Tenir l'un par l'autre est du registre de l'alpinisme. progressant ensemble, mais chacun pour soi, sur des rochers escarpés, ils s'assurent mutuellement
Sur l'avenue Córdoba, qui incise le quartier des Colegiales, les frênes blancs bourgeonnent. On dit que question folioles, ces arbres-là préfèrent l'impair : ils vont par sept, comme les mètres de Verlaine. L'aspiration, par nature, se nourrit du déséquilibre.
Alors que Joseph [...] vient inviter Graciela à danser un tango, Keïla pose en silence un regard intérieur sur le temps à perdre et les occasions manquées.
Rock de fusion, douce expression. Keïla se dit en aparté que la fusion est probablement le sort ultime de toute activité humaine. A la conclusion de l'aventure, les corps eux-mêmes se rassembleront avec les éléments donc ils sont constitués et les âmes se réuniront. L'impossible quête trouvera enfin son terme.
Le champ des possibles est un univers. Le hasard, c'est ce que nous pouvons en attraper.
A bien y réfléchir, son véritable ami est à présent Samuel, qui erre par le monde en imperméable. Au fils du temps, s'est tissé entre eux un lacis de sollicitude et de respect, subtil amalgame de clairvoyance et d'opacité où chacun sait jusqu'à quel point il peut venir en aide à l'autre, et , tout en conservant l'option en cas de détresse, connaît les limites à ne pas franchir en régime de croisière.
Cet impalpable encordement lui convient ; il sait le constat réciproque. Tenir l'un à l’autre est ce que, communément, l'on nomme attachement. Tenir l'un par l'autre est du registre de l'alpinisme. progressant ensemble, mais chacun pour soi, sur des rochers escarpés, ils s'assurent mutuellement
Pierre s'est effacé le jour où elle (keïla) s'est trouvée errant parmi des monceaux de pierres carbonisées et de restes humains. Il y a un dessein, sinon une logique, dans cette disparition. Toutes les disparitions ne se valent pas, cependant, elle l'a appris dans sa chair, toute se répondent dans les harmoniques d'un vaste concerto silencieux recouvrant le temps humains comme un édredon de plumes
Pour Keila, ce mot résonne toujours étrangement. la mort a ses professionnels, comme ceux qui ont enlevé Nayla, leur oncle et leur tante. Extraites des décombres, les victimes du jour avaient des corps et des blessures. On les identifiait, on prévenait les familles. Les victimes qu'elle porte en elle n'ont ni blessures ni corps, ce sont, sans statut et sans substance, des victimes de l'air, des victimes absentes, des disparus
Pierre est l'explorateur d'un univers cruel, où la lumière ne filtre que par instants fugitifs. Il évolue depuis si longtemps, et avec un tel investissement personnel, dans cette jungle de symboles enchevêtrés qu'il est devenu étranger à ce que chacun considère comme la réalité. Étranger en terre des hommes, il a perdu cette commune impudence préalable au courage d'agir.