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Rappelée « chez elles » par sa mère désireuse de ranger l'appartement familial pour y effectuer des travaux, la narratrice, bientôt la quarantaine et désormais établie à Rome, revient, pour la première fois depuis longtemps, à Messine, la ville sicilienne où elle a grandi. Au milieu des objets accumulés depuis des décennies, Ida est assaillie par les souvenirs et réalise que, pour elle, le temps est toujours arrêté à l'heure où, il y a vingt-trois ans, son père gravement dépressif disparaissait sans un mot ni une trace, quand elle-même n'était encore qu'adolescente. Parviendra-t-elle enfin à trouver la paix en se confrontant au passé ?


Combien terribles sont pour les proches les interrogations sans fin et l'impossibilité du deuil, lorsque l'un des leurs disparaît sans trace ni explication : s'ouvre alors une longue attente où l'espoir ne peut jamais totalement s'éteindre, dans un tumulte d'inquiétude et de culpabilité, d'incompréhension et de sentiment d'abandon, de révolte et de colère. Ainsi, Ida, frappée à l'âge tendre, continue pendant des décennies à se retenir de vivre, craignant de s'engager dans quoi que ce soit qui pourrait à nouveau lui échapper.


Analysant avec justesse les souffrances de ses personnages, prisonniers d'une douloureuse relation triangulaire fille-mère-père disparu, l'auteur nous plonge dans une réflexion sur la mémoire, le deuil et la résilience, portée par une écriture fine et sensible. Pourtant, le ressassement du passé et le repli sur soi d'Ida m'ont rapidement pesé : proie d'un trou noir intérieur qui l'engloutit et la ferme à tout ce qui n'est pas son drame, la jeune femme n'en finit pas de gratter ses plaies, en ce qui m'a paru de si lassantes longueurs que toute émotion s'est trouvée chez moi balayée par l'ennui.


Malgré l'intérêt du sujet, la pertinence de l'observation et l'élégance du style, je suis passée à côté de cette histoire, incapable de sympathie pour son héroïne à mes yeux terriblement égocentrée, envahie par l'ennui à défaut d'autres émotions, et finalement dubitative face au soudain optimisme de sa certes jolie conclusion.

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Introspection fine, recherche du temps perdu, exploration de fêlures qui sont peut-être des gouffres... le tout dans la lumière de Messine, la chaleur de son soleil et la fraîcheur de son détroit. Adieu fantômes est un livre troublant. Mais le trouble ne vient pas de là où on l'attend...

Je l'ai lu avec une impression d'extrême proximité avec l'auteure, qui nous entraîne au plus près du coeur de l'histoire de son héroïne, stoppée en plein vol à 6h16 un matin de l'année de ses 13 ans, quand son père, dépressif, a disparu. "Le matin où mon père était sorti de l'appartement pour ne plus revenir n'était toujours pas achevé à l'intérieur de moi, l'horloge n'avait jamais marqué l'après-midi". le temps s'est figé ("Six heures seize pour toujours"), sa surface est devenue lisse et plus rien n'a plus pu s'y inscrire : l'eau de la mer, celle des orages, celle des larmes a coulé dessus sans l'atteindre. L'héroïne s'est mariée, mais elle est restée une éternelle pré-adolescente, réfractaire à la maternité, curieuse de la douleur des autres qu'elle ne peut pourtant interpréter qu'à l'aune de la sienne. "Je m'imaginai divisée en deux personnes : une étrangère de vingt-trois ans née le jour du départ de mon père et l'enfant de treize ans immobilisée à cet âge pour toujours."

Autant dire qu'on a l'impression de pénétrer sans filtre dans le coeur en fusion d'une inconnue. Est-ce une bonne chose, ou est-ce au contraire rédhibitoire ? Quelle est la différence avec la lecture dérobée d'un journal intime auquel nous n'aurions pas dû avoir accès ? Adieu fantômes ne relate aucune autre histoire que l'histoire intime de la narratrice, l'histoire de son passage de 6h16 à 6h17.

Je pourrais arrêter là ma chronique, sur ce trouble de la lecture interdite, qui peut tout autant fasciner que rebuter. Mais il se trouve qu'il y a un autre aspect assez original pour s'y arrêter. Car Adieu fantômes est brillant, à certains égards : on le lit en s'arrêtant à tous les paragraphes pour savourer des formules magnifiquement ciselées. Or, c'est un roman italien, traduit par Romane Lafore : et c'est bien pour la retrouver, elle, dont j'ai adoré Belle infidèle, que j'ai lu Adieu fantômes. Et pas seulement pour retrouver sa plume, mais aussi parce que dans son roman, Romane Lafore invente justement le personnage de Julien Sauvage, traducteur de l'italien, qui peine à écrire le roman qu'il porte en lui, mais en traduit un autre promis au prix Strega (le Goncourt italien). Prix Strega dont Adieu fantômes est passé suffisamment près pour que le bandeau sur le livre annonce qu'il faisait partie des finalistes de cette année... Bien sûr, Romane Lafore, elle, a écrit le roman que son héros n'écrit pas : elle a justement écrit l'histoire de cette impossibilité à écrire. Mais voilà une situation circulaire vraiment déstabilisante ! Belle infidèle emboîte les mises en abyme, et le roman de Nadia Terranova prolonge ce trouble en l'enveloppant dans une mise en abyme supplémentaire, en-dehors de toute fiction !

Alors finalement, quelle est la plume qui m'a envoûtée : celle de l'auteure, ou celle de la traductrice ? Les deux, bien sûr, mais bien plus que par le passage de l'héroïne de 6h16 à 6h17, c'est par le vertige de ces mises en abyme et la lecture, puis la relecture de passages choisis, que j'ai été emportée. Alors plus que la seule lecture de Adieu fantômes, c'est l'expérience étonnante de la lecture parallèle de ces deux romans que je vous recommande !
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Livre lu dans le cadre de l'opération Masse Critique de septembre 2019.

Je ne connaissais pas Nadia Terranova et je suis ravie d'avoir coché son Adieu fantômes parmi tous les ouvrages au choix. Je remercie vivement Babelio pour m'avoir sélectionnée, ainsi que les éditions Quai Voltaire pour l'envoi de ce merveilleux roman.

Ida, la narratrice, 36 ans, vit à Rome, est mariée depuis dix ans à Pietro et écrit de fausses histoires vraies pour la radio. Quand sa mère lui demande de revenir à Messine, sur sa Sicile natale, afin de trier ses anciennes affaires en vue de travaux puis de la vente de l'appartement, Ida n'y va pas sans réticences ni appréhensions.

La maison familiale, tachée d'humidité et de moisissures, est surtout marquée par une absence qui occupe une place considérable depuis vingt-trois années. Quand Ida avait treize ans, son père dépressif est parti un matin sans un mot d'explication. Toute la vie de l'adolescente puis de la jeune femme s'est construite sur cet abandon, avec toute la culpabilité générée chez celles qui restent . Et cette absence, elle l'a emportée avec elle en fuyant Messine pour Rome.

Le retour chez sa mère est l'occasion d'un retour sur sa vie, sur elle-même. La narratrice se livre à d'intenses introspections. Maison familiale oblige, les souvenirs affluent, ce qui posent aussi la question de leur nature. Est-ce vraiment des faits ancrés dans la mémoire ou est-ce plutôt une reconstruction de celle-ci? La rédactrice de fausses histoires vraies a de quoi s'interroger... Et nous avec elle.
La solitude ressentie à Messine la place face à la réalité de son couple tandis que les confrontations avec sa mère ou les rencontres avec des personnes de sa jeunesse la forcent à ouvrir les yeux sur elle-même.

Bref, un récit où l'ambiance navigue surtout dans des gris plus ou moins sombres. Il m'est difficile d'avoir un avis tranché sur Ida. Je ressens beaucoup de compassion pour ce qui reste un traumatisme pour elle tout en reconnaissant sa part d'égoïsme dans la souffrance. Celle-ci est devenue sa seule propriété - au détriment du ressenti d'autrui - et il devient difficile de s'en détacher lorsqu'on s'est bâti autour. Pourtant le titre que Nadia Terranova a donné à son roman laisse planer d'emblée l'espoir d'une possible résilience.

Je me suis retrouvée subjuguée, dès les premières lignes, par l'écriture pleine d'élégance de l'auteure. Son style évite les écueils des fioritures et du pathos pour depeindre avec justesse émotions et souvenirs, désarroi et réflexions. Beaucoup de finesse et de sensibilité émanent des pages de ce roman. Comme souvent dans les récits basés sur des réminiscences et sur la psychologie, Adieu fantômes nous renvoie également à nous-mêmes. Il y a, dans l'acte de lire, un dialogue entre le livre et son lecteur mais aussi un effet miroir et une sorte de reconstruction de l'histoire qui s'opère dans l'esprit de celui-ci en fonction de son propre passé, de son empathie et de sa faculté à s'abandonner au récit. Comme une incorporation de l'histoire à sa propre vie.

Je me suis lancée, totalement ouverte, dans cette lecture et en ai tiré un plaisir mêlé d'admiration et de mélancolie. J'ai vu que Nadia Terranova a écrit un précédent roman; je compte bien le découvrir dans les meilleurs temps. En attendant, si les histoires familiales un peu bancales et cabossées ne vous font pas reculer, Adieu fantômes devrait vous plaire. Avec en prime la mer et le soleil de la Sicile.
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Ida ne vit que dans l'ombre de l'absence de son père. Seul son mari lui offre encore un appui, mais il a fallu élaborer une relation distante pour que cela puisse durer - cela dit, apurée, cette relation en est devenue belle -. Avec sa mère, elle n'a pas su établir un terrain d'entente, emmurée dans un ressentiment tenace : celle-ci l'a laissée s'occuper de Sebastiano, le père, alors qu'il ne sortait plus de son lit pour cause de dépression.


Le ton est oppressant à la limite de la folie, des rêves entrecoupent des scènes difficiles où Ida tente de reprendre pied dans l'appartement familial. Elle doit y faire des rangements, sa mère a engagé des travaux avant de mettre en vente. Ici, elle a vécu des moments heureux qui se sont détériorés dans le temps jusqu'au brusque départ du père, toujours inexpliqué.

Certaines répétitions m'ont paru pesantes, mais elles reflètent bien l'état obsessionnel dans lequel se trouve l'héroïne, et sa douleur, l'auteure ne nous ménage pas. On sent qu'Ida s'est laissée piéger par son malheur. Comment va t'elle pouvoir avancer maintenant ?
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Ida, une trentenaire qui écrit des textes pour la radio, doit revenir à Messine, sa ville natale, pour aider sa mère à trier les affaires accumulées pendant des décennies dans l'appartement familial, avant des travaux, voire la vente de l'appartement en question. L'accumulation des objets jamais triés, est une sorte de métaphore des souvenirs jamais mis en ordre, toujours enfouis un peu plus loin dans la replis de la mémoire, et toujours potentiellement douloureux. La vie d'Ida a en effet basculé lorsqu'elle a eu 13 ans et que son père, dépressif, est parti un jour, sans qu'Ida et sa mère sachent ce qu'il est devenu, et même s'il est encore vivant. Ida n'a pas réussi à surmonter ce deuil qui n'en était pas vraiment un, sans cadavre ni enterrement ; revenir et trier la ramène à cet épisode douloureux jamais surmonté. Elle doit aussi cohabiter avec sa mère, avec qui les relations, entre les non-dits et rancoeurs accumulées, sont pour le moins complexes.

Il y a une ambiance, une sorte de musique, Ida est un personnage attachant, l'écriture est sobre, mais fourmille d'images et de métaphores dont certaines font mouche. Mais dans la deuxième moitié du livre j'ai commencé à décrocher un peu : une fois le cadre posé, il ne se passe plus grand-chose, pas seulement comme événements, mais aussi en terme d'évolution du personnage. J'ai eu au bout d'un moment la sensation de quelque chose qui tournait un peu en rond, qui se répétait, ce qui certes est le cas du personnage d'Ida, mais qui a fini par me paraître un peu surjoué à la longue. L'atmosphère mélancolique, les souvenirs doux-amers, et ici surtout amers, de l'enfance et de l'adolescence, ont souvent été évoqués ailleurs, et parfois d'une façon plus convaincante qu'ici.

J'aurais du mal à être explicite sur ce qui m'a quelque peu déçue dans ce roman, parce que le livre a d'indéniables qualités, mais il m'a manqué quelque chose. Pas grand-chose au final, mais ce petit rien d'indicible, qui fait qu'un livre honnête ne soit un livre inoubliable et réellement bouleversant. Là je n'ai jamais réussi à oublier qu'il s'agissait d'un roman, de bonne facture, mais pas incontournable.
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Ah, les relations mères-filles quel vaste sujet, quand en plus le père est absent, on comprend ce que ce duo peut avoir d'instable. Ida retourne en Sicile à la demande de sa mère pour l'aider à vider la maison familiale avant travaux. Elle va être confrontée à tous ses souvenirs d'enfance, ses traumatismes, ses blessures. Portée par un style soigné l'auteur nous donne un aperçu d'une vie construite autour de la disparition de ce père. Tout en retenue et en délicatesse nous allons explorer les failles qui ont laissées des traces indélébiles dans la vie d'Ida. C'était une belle expérience pour moi que de plonger dans les émotions, colères et peurs d'autrui car sans bien comprendre par quelle magie, je me suis retrouvée à songer à ma propre enfance, à mon rapport avec mon père, avec ma mère. Cette confrontation a été riche en émotion et par bien des côtés, je me suis sentie proche d'Ida. Cette peinture d'une famille bancale avec un père dépressif nous donne à voir la violence de la situation. On sent qu'Ida a besoin d'aplanir toutes ces blessures pour continuer à avancer, mais le peut-elle vraiment. Faire son deuil après toutes ces années où l'absence traumatisante de ce père en fait un vide palpable. L'auteur introduit quelques artifices comme les rêves ou l'eau comme un élément symbolique pour aider au cheminement, c'était bien pensé. le doute est un sentiment qui prend toute sa place ici, on ne sait pas ce qui est arrivé au père même si on peut se douter de son choix. Avec un titre qui nous fait penser à un mieux être une fois que l'adieu aux fantômes aura pu s'exprimer, c'est avec espoir et exaltation que j'ai profité de ma lecture jusqu'à la dernière ligne. Bonne lecture.
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Je mettais procurer ce livre il y a un certain temps
Je l ai sorti de ma PAL aujourd hui
Sa lecture ne me laissera pas un souvenir impérissable
Une dame nous racontent alternance son enfance et sa vie actuelle
En fait elle revient chez "elle" enfin plutôt chez sa mere pour débarrasser la maison où il va y avoir des travaux
Chaque objet qu elle souhaite jeter ou garder lui évoque des souvenirs plus ou moins heureux.
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Ida, la narratrice, 36 ans, vit à Rome, est mariée depuis une dizaine d'années et écrit de fausses histoires vraies pour la radio. Sa mère lui demande de revenir à Messine, afin de trier ses anciennes affaires en vue de travaux, puis de la vente de l'appartement.

L'appartement familial, dont le toit-terrasse, qui laisse entrer l'eau, doit être réparé, est marqué par une absence qui occupe une place considérable depuis vingt-trois ans. Quand Ida avait treize ans, son père dépressif est parti un matin, à 6h16, sans un mot d'explication. Toute la vie de l'adolescente, puis de la jeune femme, s'est construite sur cet abandon, avec la culpabilité qu'il a généré et une incapacité à vivre sa vie pleinement, par peur d'être encore dépossédée. Cette absence, elle l'a emportée avec elle en fuyant Messine pour Rome à l'âge de vingt ans.

Le retour chez sa mère est pour Ida l'occasion d'un retour sur sa vie, sur elle-même. La narratrice se livre à d'intenses introspections. Maison familiale oblige, les souvenirs affluent, ce qui pose aussi la question de leur nature ; réalité objective ou reconstruction ? « Non, un fait n'est pas un fait : il s'agit juste d'un détail auquel nous donnons de l'importance à un moment de notre existence..."

La solitude ressentie à Messine, les confrontations avec sa mère et la rencontre avec son amie de jeunesse placent Ida face à la réalité de son couple et la forcent à ouvrir les yeux sur elle-même et sur les autres.
« Je pensai à mon père, dépressif et asservi aux médicaments, privé de désir sexuel ; je pensai à ma mère, qui avait enduré encore jeune la négation de son corps, l'irrévocabilité de pulsions éteintes ; au miroir de leur mariage, je vis le mien, et tous les mariages du monde s'enliser dans cet orgueil illusoire qui nous pousse à demander à une seule personne d'occuper les rôles d'amant, compagnon, parent, ami, avant de nous exposer à la dévastation quand s'écroule une de ces attributions – sinon toutes en même temps. »

L'accumulation des objets jamais triés dans la chambre d'Ida est une sorte de métaphore des souvenirs jamais mis en ordre, enfouis loin dans les replis de la mémoire, et toujours potentiellement douloureux ; tout comme la réparation de ce toit-terrasse où l'eau s'infiltre (symbole du disparu qui garde ainsi une présence) est la métaphore de la réparation possible de cette blessure ouverte laissée par le départ du père et mari. « Pendant toute ma vie, j'avais été la fille de l'absence de Sebastiano Laquidara. »

L'Odyssée apparaît en intertextualité : le thème de l'enfant qui recherche son père, la présence géographique de Charybde et Scylla, étape dans le voyage de retour d'Ulysse vers Ithaque, et le thème de la mer si présent…

Dans ce roman si sombre, trois notes d'espoir :
- la dédicace, « Aux survivants »
- le titre, « Adieu fantômes »
- la fin optimiste, assez inattendue, après l'inertie et le ressassement égocentré dont l'héroïne fait preuve tout au long du récit (qui m'a paru de ce fait un peu ennuyeux, en dépit de sa brièveté et de ses indéniables qualités).


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Dans "Adieu fantômes", la narratrice nommée Ida revient à Messine pour aider sa mère à rénover la maison familiale : une grande partie du récit tourne autour de cet événement, continuellement imprégné par le passé et les souvenirs centrés sur la disparition du père de famille. Un matin, cet ancien professeur de lettres classiques, dépressif, a quitté le foyer familial pour ne plus y revenir. Telle une goutte d'eau, il s'est littéralement évaporé dans la nature. Une plaie ouverte pour la mère et sa fille qui nourrit une boucle obsessionnelle dans le présent, une fissure qui a fracturé l'identité de la narratrice, l'empêchant de grandir, de changer et de se transformer, fixant à jamais ce moment où son père est parti dans un passé qui ne veut pas finir. L'esprit d'Ida est incontrôlable, peuplé de fantômes, de souvenirs, de rêves intenses dans lesquels l'inconscient revient en force pour façonner le passé. le corps est au contraire la seule chose qui peut encore être contrôlée et Ida, qui ne veut pas avoir d'enfants « ne sème rien. » Pour pouvoir avancer, il faudra se libérer du passé, faire le deuil du père en l'exhumant du bric-à-brac de meubles et d'objets, arrêter de se noyer dans la mer des souvenirs et des obsessions. L'eau est un symbole très puissant qui court tout au long du livre et lui donne une étrange unité. Cette eau dans laquelle le père aimait nager, l'eau de pluie qui tombe à point nommé pour se sortir d'une situation compliquée, les pleurs et les suées des cauchemars, l'eau qui dégouline du toit et s'infiltre dans la maison. La prose de Nadia Terranova est dense, intense, terrible et précise comme un scalpel et au début du livre, j'ai pensé qu'une écriture si soutenue et pleine de métaphores ne tiendrait pas la distance. Mais on se laisse prendre par l'aisance avec laquelle Terranova associe le réalisme et le symbolisme, comment son récit peut parfois flirter avec le fantastique. La douleur envahissante finit par être submergée par les mots qui servent à l'exorciser. Un récit sombre mais d'une grande maturité.
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J'ai découvert la plume de Nadia Terranova à travers son premier roman « Les années à rebours » que j'avais adoré, et c'est avec grand plaisir que j'ai retrouvé son écriture stylée pleine d'émotions où les personnages sont emplis d'une profonde sensibilité.

Dans cette histoire, l'auteure explore les difficultés de faire le deuil des disparus auxquels nous sommes toujours attachés. Ida porte en elle des blessures profondes, réveillées par le fantôme de son père qui erre dans cette maison pleine de souvenirs.

Nadia Terranova pose un regard d'une grande précision sur les liens familiaux, les rapports mère fille. Elle nous emporte à travers cette histoire où le passé s'affronte avec le présent et permet au final l'ultime lâché prise pour un futur plus serein.

Décidément cette auteure me ravie à chaque fois, une belle plume italienne lumineuse à découvrir absolument.
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