Une fois de plus,
Pierre Thiry nous enchante avec des
sonnets très musicaux.
La musique est en effet au coeur de ce recueil de
sonnets. L'ouvrage est dédié au musicien Louis Thiry, amoureux de Bach et passionné de linguistique. La musique et les mots. Chez les Thiry, le talent se transmet de père en fils.
Avec ces
sonnets,
Pierre Thiry précise (en postface) qu'il n'a pas voulu faire de la poésie. Et c'est tant mieux car le fait de devoir respecter la structure et la rigueur de la poésie ferait perdre leur charme et leur vivacité aux cent
sonnets (« San
sonnets »).
Je discutais justement de mes futures lectures avec une collègue, il y a quelques temps, et nous en sommes venues à parler de
William Shakespeare. Elle m'a dit ne pas aimer ses pièces mais adorer ses
Sonnets, qui lui procuraient une émotion bien plus forte que la poésie habituelle : les
Sonnets auraient quelque chose en plus par rapport à la poésie « traditionnelle ». Cette conversation m'est revenue en mémoire en lisant Sansonnet c'est du bouleau…, car c'est exactement cela que l'on ressent en lisant les trois San
sonnets (= 300
sonnets dans trois ouvrages) de
Pierre Thiry : on rit, on s'inquiète, on s'amuse, on tremble… Des poèmes n'auraient pas la même saveur et ne nous feraient pas ressentir autant d'émotions différentes.
Outre la musique, les arts en général (peinture, cinéma, et bien sûr écriture) et la nature (arbres, oiseaux et autres animaux, cycle des saisons, mois de l'année, fêtes diverses) sont également mis à l'honneur. En lisant les
sonnets dédiés aux mois de l'année, ceux qui se concentrent sur l'automne, sur Halloween ou la Saint-Nicolas, on a l'impression de parcourir une année entière enfermée au sein de quelques pages : c'est magique !
Et la magie ne s'arrête pas là. J'ai été enchantée de retrouver, dans un même recueil, des
sonnets qui parlent d'oiseaux qui chantent au milieu des branches d'arbres, de violoncelle et de Code civil (oui, oui) ! La plupart de mes centres d'intérêts réunis en une seule lecture, c'est rare… Et, en même temps, ça ne m'étonne pas du tout de les retrouver chez
Pierre Thiry : il est probablement le seul auteur contemporain qui était capable de composer un tel trésor.
D'ailleurs, en parlant de Code civil, j'ai particulièrement apprécié le sonnet dans lequel des san
sonnets découpent le Code civil en 14 vers (Sonnet 15, intitulé Code civil) : cela m'a rappelé l'Empire romain qui fonctionnait avec 12 lois que les préteurs romains adaptaient selon les cas qui leur étaient soumis. Puisque
Sansonnet sait du bouleau… me rappelle le droit romain, l'une de mes grandes passions, il ne pouvait être qu'un coup de coeur !
Mais ces
sonnets « juridiques » ne sont pas les seules bonnes surprises de ce recueil : d'autres ont retenu mon attention. C'est notamment le cas du Sonnet n 9, intitulé Satire au sens « cave-hallier », qui est tellement musical ! Avec les
Sonnets 87 et 89 (intitulés respectivement Elle était fière et Avancer dans le noir), il forme la « trilogie » des
sonnets qu'il faut à tout prix lire à haute voix afin de les apprécier à leur juste valeur. Je les ai récités à mes chats qui ont paru apprécier. Ils ont d'ailleurs apprécié l'ouvrage aussi : ils ne l'ont pas quitté depuis hier soir, le reniflant dès qu'ils le peuvent :
Pierre Thiry aurait-il un chat ? Un Charles Hockolmess (clin d'oeil à
Ramsès au pays des points-virgules) que mes affreux félins ont repéré à distance ?
Le Sonnet 35 nous parle de l'Automne qui « est sombre en décembre. Il sait qu'il doit partir. » Ambiance « de saison » avec ce sonnet, car en ce moment les journées sont très courtes et les arbres déjà dénudés : l'automne est en bout de course et sera vitre remplacé par l'hiver…
Le Sonnet 36 (Ce parc est…) et ses étourneaux qui plagient Mozart m'a fait sourire : il est très amusant, tout comme le Sonnet 78, court et très mignon (il s'intitule d'ailleurs Minuscule, un titre très adapté) ou encore le Sonnet 96 (L'artiste certifié), où un oiseau se fait attraper par un ver/vers « Ce vers est épicé/ Songea l'oiseau pincé/ Est-ce du paprika ? »
Enfin, voilà mes deux grands favoris :
- le Sonnet 48, intitulé Février : mon mois !
Pierre Thiry joue sur les années bissextiles pour composer un hommage au plus beau mois de l'année (selon moi, bien entendu, puisque je suis née en février) ;
- Et le Sonnet 98 (Dans le vaste palais…) qui m'a rappelé la Princesse Elodie de Zèbrazur, l'héroïne créée par
Pierre Thiry.
San
sonnets, un cygne à l'envers et
Sansonnets aux sirènes s'arriment étaient déjà de magnifiques recueils. Avec
Sansonnet sait du bouleau…, la boucle est bouclée, en quelque sorte : nous avons, à notre disposition, 300
sonnets qui ne demandent qu'à nous faire rêver.