AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de kielosa



Dans nos bibliothèques et librairies les oeuvres d'auteur-e-s de la lointaine Moldavie sont rarissimes et devraient donc susciter notre curiosité. Ce livre répond à ce souci avec succès, puisqu'il a obtenu l'année dernière le prix de l'Union européenne de littérature. Ce prix a le considérable avantage de stimuler des traductions de livres qui autrement, à cause de la langue dans laquelle ils ont été écrits et publiés, resteraient probablement inconnus en dehors de leur pays d'origine, comme "Le jardin de verre" publié en Moldavie et rédigé en Roumain.

Pour cette dernière langue, nous avons sur Babelio le grand privilège de bénéficier parmi nous de la grande expertise de "Tandarica" ou de Gabrielle Danoux, de son vrai nom et qui très souvent nous offre des critiques, toujours intéressantes, de livres qui nous auraient autrement échappé.

Tatiana Tibuleac est née en 1978 à Chisinau, la capitale de la Moldavie, où à l'université d'État elle a été diplômée en journalisme et communications. Elle a démarré sa carrière littéraire en 2014 avec un recueil de nouvelles "Fabule moderne" qui n'a pas encore été traduit en Français (mais dont le titre ne nécessite pour nous guère de traduction). Trois ans plus tard a suivi "L'été où maman a eu les yeux verts" qui a été traduit dans de nombreuses langues et en 2019 donc ce roman-ci.

Un bref mot sur le pays : la Moldavie a une superficie comparable à la Belgique, mais nettement moins d'habitants 3,5 millions. Jusqu'en 1991 la Moldavie a été une république soviétique que de nombreux Moldaves ont fui pour chercher leur bonheur plus à l'ouest. C'est un des pays les plus pauvres d'Europe, ce qui explique peut-être l'influence importante actuellement des slavophiles. Au musée national à Chisinau, la louve romaine a été dérobée en tant que symbole latin. Les voisins ukrainiens y vont faire leurs courses à cause du niveau très bas des prix. le sinistre président Igor Dodon veut dénoncer l'accord avec l'UE pour le remplacer par une union douanière avec la Russie, la Biélorussie et le Kazakhstan ! Dodon est bien sûr une marionnette de Poutine, qui pratique son jeu habituel avec ses voisins !

Le début du roman surprend le lecteur non averti, à cause de l'environnement, Chisinau ne ressemble en rien à Paris, Marseille, Lyon ou Bruxelles et à cause de l'héroïne qui n'a que 7 ans et voit cet environnement avec des yeux de gosse de là-bas, ce qui pour le lecteur occidental ne simplifie nullement les données.

En plus, il y a plein de mots et d'expressions russes, qui bien que très soigneusement expliqués en notes de bas de pages ne contribue pas exactement à faciliter non plus la compréhension.

L'imagination, le style et le langage de Tatiana Tibuleac sont cependant tellement riches et poétiques que l'on prend volontiers ces petits inconvénients en patience,

La petite gamine de 7 ans, surnommée Lastotchka, Russe pour hirondelle, se trouve, tout au début du recit, adoptée dans un orphelinat par Tamara Pavlovna, qui gagne sa vie comme ramasseuse de bouteilles de verres. Cette occupation plutôt insolite ne l'empêche aucunement de prendre soin de notre Lastotchka.

Pavlovna veux que notre petite hirondelle apprenne pour son avenir le Russe, mais la môme préfère son Moldave. le Modave et le Roumain est en fait la même langue, mais était jusqu'en 1989 écrit en lettres cyrilliques. J'ignore si Tamara Pavlovna est slavophile comme son triste président ou si elle estime que ses possibilités professionnelles seront beaucoup plus larges si la gosse maîtrise la langue de Pouchkine et Dostoïevski.

D'où elles habitent, en haut de leur immeuble, elles ont à travers la fenêtre une vue panoramique de la grande cour où vivent les autres locataires. C'est cette réalité qui explique le titre du roman : "Le jardin de verre".
Et dans ce jardin habite une communauté colorée : il y a Zakhar Antonovitch avec sa seule main toujours appuyée sur sa médaille de guerre, mais c'est un amour de vieillard qui a toujours des bonbons dans ses poches. Il y a Chourotchka que tout le monde aime et qui aime tout le monde. Et l'auteure de conclure : "La cour de tout immeuble a besoin de quelqu'un pour aimer le cheptel qui l'habite."

Après ce long confinement, Tatiana Tibuleac vous invite à un dépaysement peut-être pas excessivement exotique, mais ... spécial et littéraire !
Commenter  J’apprécie          717



Ont apprécié cette critique (68)voir plus




{* *}