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Critique de afriqueah



Tolstoi a-t-il lu Marx ?
Même si Trotski le juge comme un vestige de l'aristocratie, bien assis sur ses privilèges de possédant terrien, avec serfs à son service, image d'un monde révolu, Lénine au contraire donne des conférences sur son importance historique.
Dans le doute, lisons « Maitre et serviteur «.
Le maitre, Vassili Andreitch part pour affaire en traineau tiré par un solide cheval, en hiver, avec son serviteur Nikita, alcoolique repenti , dont la présence près de sa femme ne revêt pas tellement d'importance : elle vit depuis douze ans avec un tonnelier, pas de souci.

Vassili se considère comme un bienfaiteur pour Nikita et les autres : bien sûr il ne les paye pas, il leur cède au prix fort des denrées en échange de leur travail, cependant il continue à les employer gratuitement, certes, mais à les employer.

Voilà partis les deux compères, pour acheter une portion de forêt avant que d'autres ne le fassent.
Il neige, « l'on ne discernait pas la ligne de jonction entre la terre et le ciel ».
Vassili ne veut pas s'arrêter, Nikita voudrait bien passer la nuit chez des paysans qui, citant Pouchkine, les conjurent de rester, mais il est habitué depuis longtemps à obéir aux ordres et à ne pas faire valoir de volonté propre.
Ils se perdent dans la neige, reviennent sur leurs pas, une fois, deux fois, et Vassili abdique finalement pour suivre docilement le chemin indiqué par Nikita. Puis il s'en veut d'avoir écouté l'imbécile de Nikita, qui n'a rien à perdre, lui.

Ils sont vraiment trop bêtes ces paysans, ces ignorants.

Vassili continue à réfléchir toujours à la même chose « son unique but, le sens, la joie et la fierté de sa vie, à savoir combien d'argent il avait gagné », car s'enrichir c'est prendre des risques, et lui veut s'enrichir.
Pourtant, sa volonté de réussir, son dynamisme, sa certitude et sa détermination ne seront rien devant la tempête de neige : la nature est la plus forte.
Dans l'enfer glacé, où des ténèbres imparables recouvrent les chemins, ils finissent par s'arrêter, le maitre dans le traineau, recouvert de paille, Nikita dans la neige avec un peu de paille.

Mais Vassili a peur, le froid le ronge et puis le jour ne vient pas.
Peur, mépris, regrets, angoisse comme l'angoisse d'Ivan Ilitch, impatience et énervement, solitude, essai vain de se sauver sur le cheval, tous les sentiments de Vassili s'égrènent durant cette nuit qui les conduit vers la mort.


S'il y a une dialectique entre maitre et esclave, la fin de la nouvelle la présente de façon imagée, visuelle et tellement parlante : Vassili presque paralysé, se couche sur Nikita, pour le réchauffer ; il sait que la mort l'attend et l'attire et cela ne lui procure que de la joie.

Plus aucune différence, aucune distance entre Nikita et lui, ils sont un, sa vie n'est plus en lui mais en Nikita.
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