Citations sur Soeur Fidelma, tome 3 : Les cinq royaumes (48)
Cuan Doir, le port de Dor, n'était distant que de trois miles des grilles de l'abbaye. Le chemin qui y menait n'était jamais très éloigné de la mer que l'on voyait écumer au loin, il serpentait dans les landes sauvages d'ajoncs et de bruyère, avec des affleurements de rochers polis par les siècles. A cause de la proximité de l'océan, les arbres étaient rares et prenaient des formes étranges, sculptées par les vents côtiers. À mi-chemin, ils tombèrent sur un site de pierres levées. Les sentinelles de granité gris couvertes de lichens témoignaient des croyances et des pratiques des Anciens. Elles étaient disposées en un cercle d'une trentaine de pieds de diamètre, juste à côté d'une maisonnette en pierre. Ce témoignage des coutumes d'autrefois semblait s'intégrer parfaitement au paysage sauvage, balayé par les vents, et faisait surgir des images du passé.
Ils cheminaient dans les hautes montagnes et les vallées encaissées de Muman. Le deuxième jour, la tempête s'était calmée mais les pluies incessantes rendaient la progression des chevaux difficile, sur un sol boueux aspirant leurs sabots comme des mains suppliantes. Plus d'une fois ils faillirent s'embourber dans des prairies marécageuses et durent mettre pied à terre pour tirer les bêtes hors de ces pièges invisibles à l'oeil nu. Le ciel, d'un gris maussade et menaçant, ne s'était jamais entrouvert sur la splendeur d'un ciel d'automne. Les nuages bas noyaient le ciel et la terre d'une même lumière blafarde. Le vent, qui gémissait dans la cime des arbres où les feuilles avaient presque disparu, ne parvenait pas à disperser les nappes de brouillard.
Cass tira les rênes de sa monture et attendit que Fidelma le rejoigne. Puis il pointa du doigt les collines boisées et, au-delà, la plaine ondulante qui disparaissait dans les brumes. En Irlande, Dieu seul savait où finissait la terre et où commençait le ciel...
Dans les cinq royaumes [d'Eireann, d'Irlande], la plupart des rituels étaient encore célébrés en grec, la langue qui avait servi à rédiger les Saintes Ecritures (1). Mais les religieux se tournaient maintenant vers le latin, la langue de Rome qui se substituait peu à peu au grec.
Fidelma passait indifféremment de l'une à l'autre et, en plus de sa langue maternelle, elle parlait aussi un peu celles des Bretons d'Angleterre et des Saxons, et lisait l'hébreu.
(1) Note de bas de page : Le Nouveau Testament, l'Ancien Testament ayant été écrit en hébreu et en araméen. (N.d.T.)
"Ce n'est [la prédestination] que l'excuse du tyran pour ses crimes, et le prétexte invoqué par l'idiot pour ne pas lui résister." (p. 103)
"La considération qu'inspire la peur n'est pas authentique. Le loup est respecté mais personne ne l'aime." (p'108)
Oups, j’avais mis critique ici, désolée. C’est donc rectifié
"Platon a écrit que si les hommes censurent toujours l'injustice, c'est parce qu'ils craignent d'en être les victimes et non qu'ils répugnent à la commettre." (p. 214)
La bibliothécaire recevait ses sujets, trônant dans un fauteuil en bois sculpté, tout au fond d'une salle magnifique dont l'étendue et les voûtes étaient presque aussi impressionnantes que celles de l'église [de Ros Ailithir].
L'édifice en imposa à Fidelma qui avait pourtant visité bon nombre de bibliothèques dans les cinq royaumes d'Eireann [d'Irlande].
La plupart des livres n'étaient pas conservés sur des étagères.
Chaque ouvrage, étiqueté et protégé par un taig liubhair, une sorte de sacoche en cuir, était pendu à l'une des patères qui s'alignaient le long des murs. (...)
Les livres contenus dans les sacoches étaient souvent des ouvrages de référence, fréquemment consultés par les lettrés.
Mais ici et là étaient entreposés des recueils d'une grande valeur, avec des couvertures magnifiquement enluminées, rehaussées d'émaux, d'or, d'argent, et même incrustées de pierres précieuses. On disait qu'Assicos, le chaudronnier de [Saint] Patrick, avait fabriqué des reliures rectangulaires en cuivre pour mieux protéger les livres du saint homme. Certains de ces volumes étaient aussi placés dans des coffrets de bois ou de métal.
Quant aux baguettes d'orme et de coudrier où étaient gravés les textes en alphabet ogham, elles étaient rangées dans des coffres sculptés.
Malheureusement, ces œuvres disparaissaient peu à peu car elles tombaient en poussière. Avant leur destruction, on les retranscrivait souvent sur des parchemins dans le nouvel alphabet.
- Le Christ est le fils de Dieu, dit-elle avec fermeté. Il approuverait l'hommage de la raison, car le doute est également garant de la foi.
- Vous philosophez, Fidelma de Kildare. Je ne m'attendais pas à ce qu'une religieuse questionne sa foi.
- Mon scepticisme est né de trop de mauvaises expériences en ce monde, Cass de Cashel. L'incertitude est un bon guide, surtout quand nous faisons notre examen de conscience.