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Citations sur Tous tes enfants dispersés (163)

Je suis assise dans ta petite chambre, sur ton lit couvert d'une poussière muette de sécheresse. Le ciel est clair derrière les vitres où coulent des gouttes d'eau, perles cristallines qu'une main invisible semble avoir enfilées régulièrement sur un fil de sisal. Elles se poursuivent sagement, glissent avec une rapidité gracile le long du verre et s'arrondissent harmonieusement, traversées par un rai de lumière brillant avant de disparaître sur le mur qui avale ces centaines de fantômes d'opale pressés.
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«  Les mots peuvent être tranchants ou s’enfoncer brutalement en nous comme des lances, nous écraser tels les gourdins cloutés que les tueurs utilisaient pour défoncer les crânes des nôtres au printemps 94.

Les mots sont souvent comme de jolies calebasses décorées, creuses ou fêlées sous leur apparence reluisante , ou traîtres quand un serpent s’y est lové, profitant de la nuit pour se glisser à travers son fin goulot et faire pénétrer dans le cœur des suspicions ou des inimitiés »
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C’est une prison sans murs. Se pendre avec sa langue, n’est-ce pas cela que j’ai fait ? Tu te souviens qu’on avait autrefois un ministère de la Condition féminine ? J’ai toujours trouvé cela cocasse, une seule femme désignée par le président pour porter la voix des femmes. Ont-ils la moindre idée de ce que c’est, « la voix des femmes » ? Ceux qui disent que nous sommes bavardes ignorent tout des fleuves de mots que nous taisons. Que se passerait-il si nous nous mettions à parler littéralement, à dire les désirs innombrables d’avortements, les désirs liquéfiés de jouissance interdite, les désirs brûlants de pouvoir absolu ? Que se serait-il passé si, au lieu de ne m’ouvrir que le ventre, le médecin m’avait ouverte tout entière, avait mis à nu mon coeur et ma gorge qu’on appelle si bien umutemeli w’ishavu, le couvercle du chagrin ?
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vous étiez si naïfs, mes enfants, vous sembliez ne pas avoir encore compris que la guerre n'est pas destinée à rendre justice.
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Qu’est-ce qui avait changé ici ?
Peut-être que les centaines de milliers d’anciens exilés tutsi qui étaient rentrés après la guerre avaient importé d’autres façons de vivre, qu’on ne se préoccupait plus tant d’égrener les généalogies, à moins que je n’aie dramatisé à outrance le souvenir des interactions avec mes compatriotes d’autrefois, ces moments de présentation où je me liquéfiais, prise au piège de ma carnation. J’étais surprise de voir que la conversation prenait un autre tour, plus sinueux. Il ne me demanda pas de parler de ma mère, ni de son mari. Il dit: «Tu es partie en 94?», je hochai la tête. Puis il laissa un silence presque complice s’installer. Il avait respecté mon mutisme en poussant l’accélérateur en même temps que le volume de la radio qui diffusait une rumba congolaise identique à celle qui passait sur Radio Rwanda, trois ans auparavant. J’avais redressé la tête, laissant mon regard se perdre dans les méandres de la route en macadam. p. 28
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Vous êtes la douceur, vous donnez la vie. Que d’injonctions paradoxales accrochées arbitrairement par d’autres à nos existences, que de mensonges rapiécés depuis mille ans et que nous nous devons de porter dignement, parce qu’il fut décidé un jour que ça devait être ainsi et pas autrement. C’est sans doute pour cela que nous apprenons à louvoyer très tôt. Mentir comme on respire, pour accepter, se couler dans cette arrangeante affabulation. L’instinct maternel, la belle
affaire. Parce que nous donnons plus souvent la vie que nous ne la prenons, nous nous devrions d’être la solution humaine à la violence des hommes.
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Plus tard j’apprendrais que de nombreux Hutu avaient à la fois caché des proches et tué des inconnus, emportés par l’impératif de l’extermination, pour ne pas éveiller les soupçons, parce qu’il leur fut difficile d’être courageux plus d’une semaine ou d’un mois. Je suppose. (Immaculata, p. 160)
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«  Je relis les livres que j’aime et j’aime les livres que je relis, et chaque fois avec la même jouissance ( ........) :
Celle d’une complicité , d’une connivence, ou plus encore, au- delà, celle d’une parenté enfin retrouvée .
Georges PEREC .
W ou le souvenir d’enfance .
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(Sur le génocide rwandais). C'es l'heure où la paix se risque dehors. Nos tueurs sont fatigués de leur longue journée de travail, ils rentrent laver leurs pieds et se reposer.

C'était la saison sèche, les collines étaient moins verdoyantes que sur les photos du National Geographic.

Si les femmes tuent moins, ce n'est pas par un trop plein de tendresse, c'est par dégoût de la violence contenue, celle qui réside là, au creux de leur corps fécondable, propriété de toute la société.

(Les hommes) S'ils restent, ils deviennent nos héros, s'ils partent, nous devenons des filles-mères.

Je ne t'ai pas fait exprès. Je tentai de te chasser de mon intérieur avant qu'il ne soit trop tard, mais personne n'accepta de m'aider. Tu restas donc accroché. Alors, je t'eus.

Ton père ne sut sans doute jamais que tu existais.

De toi, je ne parlai pas. Nous ne t'avions pas fait exprès.
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L'instinct maternel, la belle affaire. Parce que nous donnons plus souvent la vie que nous ne la prenons, nous nous devrions d'être la solution humaine à la violence des hommes.
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