Une allée aux peupliers
Une allée aux beaux colliers
Une boule de coton
Que me lance un rejeton
Les passants cachent leur nez
Les visages détournés
Les passants vont éternuer
Les flocons partent en nuées
Le coton des peupliers
La cohue au poulailler
Le combat des oreillers
Je les prends sans bouclier !
Le nuage de poussière
La fumée de doux pollen
La nuée de flocons de neige
Bénéfiques sortilèges !
La volée de pissenlits
De pétales de pommier
Ou de bulles de savon
Favorables tourbillons !…
L’enfant lance avec son pied
Le coton des peupliers
Ce brouillard m’est familier
C’est mon brouillard primordial
Ou c’est un voile nuptial
Le rideau de mousseline
Une bonne adrénaline
Ma petite idée maline
Et mon vers né du pollen
Dépourvu d’instinct bestial
Une simple cantilène
Dort dans son berceau royal
J’entends des sons secrets
À ma fenêtre en rhombe
Le Tombeau des regrets
Du grand Sainte Colombe
Les flocons qui voltigent
Poussés par un courant
Sur mes lèvres se figent
Baiser désaltérant
Ces flocons, c’est le ciel
Qui me fait ses aveux
Ce n’est pas essentiel
Qu’un amour soit verbeux
Les flocons sont mortels,
Les étoiles déchues,
Ces flocons fondent tels
Des atomes crochus
J’entends des sons secrets
Du Tombeau des regrets
Jean de Sainte Colombe
Archets tournent en trombe
Ce qui me passe par la tête
Ce qui me passe par la tête
Qui me dépasse et qui m'inquiète
Qui me tracasse à tous niveaux
Tout en restant en arrière-plan
Ce sont mes innommables peurs
Mes peurs voilant dans leurs vapeurs
La pauvre noix de mon cerveau,
Rendant celui-ci somnolent...
Je le préfère en cerf-volant
Qui se balance dans les airs,
Cerveau-rêveur, polyvalent,
Et non en lent cerveau polaire !
C'est ça, c'est ça, ce n'est pas ça
C'est ça mais ce n'est pas que ça
Tout sert à tout, rien sert à rien
Je m'en souviens, je m'en souviens
Rappelle-toi ton Odessa
Et les tricots de Raïssa
Mon Odessa, ma forteresse...
Et ma tristesse fait ses tresses
Celui qui dit qu'il n'a pas peur
Est-il plus fort ou inconscient ?
J'ai peur des moteurs rugissants,
Des lois, des réseaux, des bipeurs
Ma peur s'accumule en congères
Peur d'une mère est indicible
C'est infernal, c'est impossible
De la ranger sur l'étagère...
Je titube comme un pigeon
Un coup de bec par-ci par-là
Sans jamais retrouver le la...
Vivement le temps des bourgeons !
L'amour de mes vingt ans
Me revient délavé
Nous battions le pavé
Nous lisions sur des bancs
Sans jamais nous montrer
Amoureux aux passants
L'amour de mes vingt ans
Amour désespéré
Mais ses lèvres espiègles
Ont la couleur blue-jean
Tambourinant les rimes
Des lignes encor tièdes
La vie est un bruit ricanant
La vie est un bruit ricanant
Cacophonie et divergence
Tais-toi si c'est pour critiquer
Tais-toi si c'est pour t'lamenter
Et tais-toi si c'est pour hurler
Cligne des yeux au lieu d'parler !
Car ton accord ou désaccord
Ne change rien à ce vacarme
Si ta chaussette n'a pas de paire
Encore une fois, tu dois te taire
Fais d'la musique contemporaine,
D'la dissonance permanente !
La Bessarabie
La Bessarabie
La terre battue
Rime avec brebis
La brebis s'est tue
Le village s'est tu
Pas un chant perdu
Reste air monotone
D'oiseaux autochtones
Un sol plantureux
Aux temps de Babel
Un terme désuet
Pour les temps réels
La poussière nappe
La terre battue
Pas une sonate
Pas même un glandu
( Une partie de la Bessarabie se situe dans la région d'Odessa ( en Ukraine) et c'est la terre de mes ancêtres )
Escaliers
L'escalier Phénicien
Chaque marche un soupir
L'escalier d'Odessa
Chaque soupir un poème
Odessa Sacré-Coeur
Chaque poème un aveu
L'escalier d'Odessa
Escaliers sont nombreux
C'est un peu mon Montmartre
Mon Montmartre amoureux
Odessa Basilique
Odessa babélique
Odessa mon village
Odessa mon sillage
Odessa mon mouchoir
Ou mon échappatoire ?
Après une lecture du René Char, "Dans l'atelier du poète"
Dans ta boulangerie
Le pain est cuit sur place
Un moulin de Montmartre
Tournant aux quatre vents
Pas un matin sans pain
Et toi, dans ton fournil
Tu passes chaque nuit
La lune est ton soleil
La chèvre prend des fleurs
Dans sa garrigue ardente
Et toi c’est un quatrain
Qu’en nage tu mitonnes
C’est chaud comme un poème
Et fumant comme un thé
Dis-tu sans qu’on comprenne
Nous, humbles invités…
Le neige d'Odessa
Neige d'Odessa...
Elle est trop radieuse
Elle est trop fougueuse
Pour me tenir froid !
Souvent je l'invoque
Ma neige d'antan,
Et je soliloque
Au chaud sous ma toque
Souvent je l'invoque,
Ce blanc flamboyant,
Lorsque je sanglote
Mon amour en loques...
Ton vin est triste, mon Essenine,
Tes larmes chaudes exacerbées,
Rouges comme des baies, tombent dans mes mains,
Plus suaves que des sultanines
Mon Essenine,
La neige est là
Elle te ranime
Au son du glas !
Je te savoure à l’aube bleuâtre
Au grincement des vieilles carrioles
Je suis plus ivre que l’alcool
Ton feu pétille sur mon âtre
Mon cher poète
Du mois de mai,
Vivent les clochettes
Du muguet !